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Jett Lawrence « Je suis impatient d’en découdre »


Jett Lawrence est pour le moins décontracté à l’approche de la saison 2025. Champion de Supercross 450 en titre, le pilote Australien aborde la nouvelle année en pleine confiance, bien conscient qu’il est considéré par ses principaux concurrents comme l’homme à battre, une nouvelle fois. Présent à Anaheim, notre confrère Jonathan McCready s’est entretenu avec le champion en titre à la veille de l’ouverture du championnat de Supercross US. Micro.

Jett, nous voilà à Anaheim 1. Cette fois-ci, tu es le tenant du titre en 450. Tu ressens un peu plus de pression cette année ou pas du tout ? Tu avais l’air plutôt détendu pendant la conférence de presse…

Non, il n’y a pas de pression en plus cette année. C’est pareil que l’année dernière, en fait. Tu vois, l’an dernier, j’arrivais ici sans avoir de titre en Supercross en 450 et cette année au moins, j’en ai un en poche donc je peux être un peu plus relax. Au moins, je sais que je suis capable de viser à nouveau ce type d’objectif, que je suis capable de gagner. Je suis impatient d’en découdre. On va juste prendre cette première épreuve de la saison comme elle vient, peu importe la position qu’on décrochera lors de la finale. Après quoi, on verra. Parce qu’on sait qu’on ne peux pas gagner le championnat dès la première épreuve, mais on peux clairement le perdre. Il faut juste passer ce premier round et ensuite, on fera le point pour voir où on en est.

Beaucoup de pilotes qui visent le titre disent que tu es le mec à battre cette année. Ça paraît logique, mais d’habitude, ils évitent de pointer du doigt leurs concurrents. Là, t’es carrément leur référence, ils te courent tous après. Ça te fait quoi de savoir que t’es celui que tout le monde veut battre ?

Franchement, c’est cool, parce que ça montre que je fais exactement ce qu’il faut. Je veux dire, certains peuvent voir ça comme quelque chose de négatif, se demander pourquoi ils ont une cible dans le dos. Moi, je me dis que ça montre que je fais tout ce que je peux, et que tout le monde voudrait être à ma place et porter la plaque de numéro un. C’est cool. Il faut juste que je reste sur mes gardes et que je continue à faire ce que je sais faire. Il ne faudra pas se reposer sur ses lauriers, tu vois. Il faut toujours être prêt à tout, et s’attendre à l’inattendu.

Tu as parlé des critiques dans une conférence de presse il y a environ un mois de ça. À chaque fois que je suis venu aux États-Unis, la file d’attente pour avoir un de tes autographes est énorme. Tu es bien soutenu en Europe, ici, c’est pareil, et en Australie, n’en parlons même pas. C’est dur de trouver un équilibre ?  Un peu de haters, ça te touche plus que les 90% d’autres personnes qui te soutiennent ?

Ouais, c’est vrai, je suis tombé dans le panneau lors de cette question la dernière fois. C’est vrai qu’il y a beaucoup de positif, mais j’ai fait une fixette sur quelques petits points négatifs, tu vois ? Parce que je suis le genre de mec qui voudrait être apprécié par tout le monde. Je veux que tout le monde soit content de moi, quoi. Et les gens, ils ont essayé de critiquer mon pilotage, ma façon de rouler, mais ça n’a pas marché. Alors ils s’en prennent à ma personnalité, à qui je suis, ou à des trucs que je dis, ce qu’ils peuvent. Ils cherchent toujours un truc à critiquer. Mais bon, c’est comme ça. Heureusement, j’ai un super frère qui m’a remis les idées en place. Il m’a dit : « Ecoute, arrête de t’en faire. Il y a plein de points positifs, et toi, tu bloques sur les deux ou trois trucs négatifs. » Là, on est de retour sur les bons rails, et on est juste contents d’attaquer cette nouvelle saison.

Niveau pilotage, tu me rappelles un peu Stefan Everts, mais sur le plan mental, plutôt Ricky Carmichael. Tu veux vraiment gagner et si tu perds, t’es du genre à t’énerver. C’est toi au naturel, où tu as développé ça ?

C’est juste comme ça que je suis. J’apprends au fur et à mesure si on parle de la partie pilotage. Mais pour le mental, je pense que c’est juste ma personnalité. Je suis hyper compétitif. J’aime gagner. Alors oui, tout le monde aime gagner, mais moi, je fais en sorte de faire les heures en plus à l’entraînement pour que ça paye. Je pense que c’est juste comme ça que je suis. J’apprends des autres aussi, et j’essaie toujours de m’améliorer.

Qu’est-ce que t’as appris de Stefan Everts en Europe ? Je sais que tu n’as roulé qu’en 85cc et sur l’Europe 250 à l’époque, mais qu’est-ce qu’il t’a appris ?

Stefan m’a aidé sur quelques points mais en fait, c’était surtout Harry Everts qui nous a filé un gros coup de main. Harry était vraiment super, et il nous a beaucoup aidés. Il était bien plus impliqué. Stefan nous disait des petits trucs de temps en temps. Genre quand Stefan était déçu, il était du genre à te le faire comprendre, mais c’était surtout Harry qui était vraiment à fond derrière nous. Ils m’ont bien aidé à bosser sur mon style de pilotage, principalement.

Désormais, tu bosses avec  Johnny O’Mara. Tu as toujours eu les meilleurs coachs pour apprendre. Ça t’a aidé ?

C’est sûr, à 100 %. Je pense que l’un des trucs les plus importants pour moi, c’est d’avoir eu ces mecs-là à mes côtés pour pouvoir apprendre d’eux, mais aussi de pouvoir retenir ce qu’ils m’enseignaient, tout en l’appliquant. Tu peux être entraîné par les meilleurs coachs, mais si tu ne captes rien ou que tu ne mets rien en pratique, ça ne sert à rien. Donc ouais, j’ai des gens incroyables autour de moi, avec qui j’ai eu de super relations. Franchement, je n’aurais jamais imaginé avoir les numéros de Ricky Carmichael ou James Stewart dans mon téléphone. Je n’aurais jamais pensé pouvoir appeler James pour aller jouer au golf, ou même Ricky. C’est fou et je suis super reconnaissant. Johnny O’Mara, c’est une légende aussi. Être coaché par Stefan et Harry, c’est pareil, ce sont des légendes. Donc ouais, j’ai vraiment de la chance de connaître ces gens, et de pouvoir travailler – comme passer du temps –  avec eux. Quand j’étais gamin, je ne m’en rendais pas compte, mais maintenant, en prenant le temps d’y repenser, c’est juste fou.

Tu es un peu le McGrath des temps modernes. Tu es devenu la star de cette génération, tu as le charisme pour porter le sport et peut-être le rendre encore plus grand public. Tu ressens de la pression ou une certaine responsabilité par rapport à ça ?

Non, je vais juste me concentrer sur moi, sur ce que j’ai à faire. Pour le reste, je laisserai les choses se faire. Je ne me lève pas tous les matins en me disant que je vais rendre le sport meilleur. Si je fais ce que je fais et que des opportunités se présentent, je ferai de mon mieux en tout cas. Je pense que le sport ira là où il doit aller, mais pour l’instant, je me concentre juste sur moi et sur le fait d’être la meilleure version de moi-même.

Si quelqu’un t’avait dit – à l’époque de l’Europe – que tu allais devenir l’un des incontournables du sport, tu l’aurais cru ?

J’aurais répondu que ce serait super, mais que ça allait être dur. J’ai toujours eu ces objectifs en tête, mais peut-être pas autant ancrés à l’époque. J’avais des plus petits objectifs, sur le court terme, donc je pense que ça m’aurait surpris d’entendre ça.

Maintenant que tu as déjà tout gagné du haut de tes 21 ans, est-ce que tu vises les records pour un jour prendre ta retraite en ayant le titre de nouveau GOAT ?

Comme tu l’as dit, j’ai déjà gagné tout ce que je pouvais gagner ici en termes de championnats. Il reste toujours des terrains sur lesquels je ne me suis pas imposé, donc on peut se servir de ça comme d’une motivation. Chercher les records, c’est quelque chose qui peut me permettre de rester sur mes gardes. Il faut se fixer des objectifs sur le court terme, mais aussi des plus gros sur le long terme même si les gens ne comprennent pas toujours ça. Il faut penser plus loin parce que si l’objectif c’est juste le titre, tu risques de vite ne plus avoir de nouveaux objectifs et prendre la porte de sortie plus tôt que prévu. Je veux rester dans le sport aussi longtemps que possible, en bonne santé, jusqu’à ce que je me dise que j’en ai assez. On se donne des objectifs qui peuvent sembler stupides, mais c’est histoire d’avoir un plan sur le long terme, c’est comme ça que je fonctionne.

Un mot sur les Nations. Tu as dû te battre avec Herlings, Tomac, Roczen, Gajser & les autres. Tu es celui qui arrive, et tu te bats avec ces légendes. Ça te fait quoi ?

C’était vraiment cool. Franchement, c’est une belle expérience de rouler contre tous ces gars-là. C’était déjà génial de les voir en piste, mais en plus de pouvoir les dépasser, c’était encore mieux [rires]. Surtout, c’est une expérience incroyable. Pouvoir rouler avec ces gars-là, c’est un honneur pour moi.

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