Remonté sur la moto seulement trois mois après une opération des croisés, Jett lawrence arrivait à Fox Raceway avec un paquet de questions. Le garçon est reparti de l’ouverture de l’outdoor avec des réponses, et une plaque rouge. Auteur du doublé, le pilote Australien est – déjà – de retour sur la plus haute marche du podium après une (première) blessure compliquée. Il raconte.
Jett, tu es passé par une opération des croisés plus tôt dans la saison et tu fais un retour remarquable à Fox Raceway. Comment s’est déroulée ta convalescence et ça te fait quoi de revenir de cette façon-là pour l’ouverture de l’outdoor ?
La convalescence a été longue. J’ai aussi découvert que les antidouleurs, c’est vraiment pas le top. Chaque corps réagit différemment à ce genre de médicaments. Évidemment, je ne me drogue pas donc quand tu introduis ce genre de substance dans ton organisme, il réagit un peu violemment au début. En même temps, il fallait gérer la douleur au niveau de mon genou. Disons qu’il y a eu des hauts et des bas. Heureusement, j’ai pu compter sur mon frère. Pas la première semaine car il roulait mais ensuite, et malheureusement, il s’est blessé à son tour. Du coup, on a passé plusieurs semaines ensemble, et c’était vraiment cool de pouvoir être tous les deux. Ça a rendu toute cette période un peu plus fun. On va dire que c’était une bonne expérience sur le plan mental, parce que devoir rester assis dans le canapé, ça craint. honnêtement, les courses dans la boue ne m’ont pas manqué, mais j’aurais vraiment aimé être en piste sur toutes les épreuves où les tracés avaient l’air cool.
Forcément, je suis super content d’être en mesure de gagner comme ça aujourd’hui. Dernièrement, il y a eu beaucoup de distractions, de bruit, de choses que je ne contrôlais pas. C’est bon de pouvoir venir ici, de mettre tout ça de côté, de me concentrer sur mon job et de bien le faire.
C’était comment de revenir dans ces conditions ? Avec la pression, la blessure qui est encore récente. Est-ce que tu te demandais où tu allais te situer, comment le genou allait tenir le coup ?
Je pense que j’ai passé assez d’heures sur la moto pendant la semaine pour savoir que ça irait. Je me sentais plutôt bien avec ma jambe, globalement. Évidemment, quand il s’agit de poser le pied par terre, par réflexe, c’est le genre de scénario qui te fait le plus flipper. Clairement, je n’avais pas envie de poser le pied, j’avais tendance à bien lever la jambe, à la garder bien haute. Ce n’était pas si pire. Au fil du temps, tu t’habitues et tu retrouves aussi les sensations. Quand tu reviens, évidemment, tu es super excité à l’idée de rouler de nouveau, mais une fois que la grille tombe, tu sais ce que tu as à faire parce que tu l’as déjà fait des centaines de fois avant. En fait, c’est surtout une question de retrouver les habitudes et les automatismes. Savoir ce qu’il faut faire pour récupérer entre les manches par exemple. Ce n’est pas si compliqué que ça de revenir, pas autant qu’on pourrait le croire. On se repose beaucoup sur notre mémoire musculaire, en fait.
Le duel avec Eli sur l’outdoor est attendu. C’était comment de te battre avec lui en seconde manche ?
Même si Eli était derrière moi, je n’entendais que lui. Je me dis que son échappement doit sortir à l’avant de sa moto, parce qu’elle était bien plus bruyante que la mienne [rires]. C’était cool. En fait sur cette piste, il y a très peu d’endroits où tu peux vraiment attaquer pour faire une grosse différence. Et dans ces portions— comme les vagues à l’arrière du circuit — Eli prenait l’extérieur alors que moi je prenais l’intérieur; c’était plus sûr pour défendre ma position. Quand je l’entendais sur mes talons, je donnais tout ce que j’avais pour rester devant. Sur le reste de la piste, c’était surtout de la gestion, du choix de trajectoire; on se suivait.
C’est compliqué de doubler à Pala, tu es bien souvent bloqué dans une ornière dans les descentes, et elles sont également très longues dans les virages. La plupart du temps, tu n’as qu’une trace vraiment rapide. C’était cool quand même, ça ressemblait un peu à une partie d’échecs: un coup à toi, un coup à moi. On avait chacun des portions où on attaquait, et on savait aussi où il ne fallait pas trop tenter le diable parce qu’on pouvait se foutre par terre.
Après la seconde manche, tu semblais vraiment ému. Ce genre de moment, ça représente quoi pour toi ? Il y a beaucoup de victoires dans une carrière, mais certaines victoires représentent plus que d’autres. On aurait dit que celle-ci était spéciale pour toi. C’était le cas ?
Ouais, carrément. Je pense que le plus dur avec ma blessure, ça a surtout été l’aspect mental. La seule autre grosse blessure que j’ai eue, c’était au pouce. Et quand tu compares les cicatrices de mon pouce à celles de mon genou, franchement, il n’y a pas photo. Pour le pouce, c’était six semaines et je pouvais quand même m’entraîner un peu. Alors qu’avec le genou, tu passes la plupart de ton temps assis sur le canapé. C’est difficile de faire quoi que ce soit donc mentalement, ça devient très compliqué.
Il y a eu toutes ces distractions aussi, qui t’éloignent un peu de tes objectifs. Des choses que tu ne peux pas contrôler. Donc c’était bon de pouvoir revenir en piste de cette façon-là. Il y a beaucoup d’émotions qui s’accumulent pendant la rééducation, quand tu essayes de revenir plus fort. En fait, tu te poses plein de questions, tu te demandes si tu es aussi fort que ça parce que la réalité, c’est que tu ne sais pas répondre vu que tu ne te mesure plus aux autres. Évidemment, je suis avec Hunter, on s’entraîne dur, on est en forme, mais on se demande quand même si on sera au niveau quand on reviendra. La réponse, tu ne l’auras pas tant que tu ne seras pas de retour derrière une grille de départ.
Disons que beaucoup d’émotions se sont accumulées pendant ma convalescence, il y a eu des trucs bien inutiles qu’on a dû gérer aussi. Disons que c’était cool de pouvoir mettre tout ça derrière.
À Anaheim 1, toi comme ton frère, vous sembliez avoir des problèmes avec la nouvelle Honda. Là, ça semblait être carrément l’inverse.
C’est sûr qu’on était arrivés un peu en retrait à Anaheim 1 pour le début de la saison de Supercross. L’outdoor, on adore ça et je pense pouvoir parler pour Hunter aussi. On est forcément plus à l’aise en Motocross, parce qu’on en fait depuis qu’on est gamins. On a enchaîné les tours en Motocross pendant des années, encore, et encore. Je pense que ça joue beaucoup.
Sur la moto, on est encore en train de travailler, de chercher ce qui fonctionne. On a un châssis complètement différent, donc on teste des trucs, on voit comment la moto réagit, on continue d’aller de l’avant. La moto est clairement assez bonne pour gagner, la preuve ce week-end. On va juste continuer à bosser pour être de plus en plus performants. On va faire tout ce qu’on peut pour améliorer la moto même si dans ce sport, c’est jamais facile. Mais je sais que chez Honda, ils vont tout donner, et nous aussi.
Tu t’es battu avec Eli à San Diego, de nouveau ici à Fox Raceway. C’est ce à quoi tu t’attendais, finalement ?
Disons que c’est plus fun de se battre avec lui en Supercross qu’en Motocross parce qu’il fait moins chaud [rires]. Se battre avec un pilote comme lui, qui est un des grands noms du sport et qui a accompli beaucoup de choses, c’est génial. Je me souviens de certaines courses où il mettait une minute d’avance à tout le monde. C’était flippant au début, parce que je me disais « il va falloir que je roule contre un gars capable de faire ça ? ».
C’est cool, j’apprends. À San Diego, j’ai pu voir les traces qu’il prenait, voir que j’avais tendance à délaisser certaines trajectoires aussi. Ce soir-là, j’ai perdu la finale dans les virages qui traversaient la ligne droite de départ. Il a adapté sa trajectoire durant la finale alors que j’étais bloqué dans la même trace pendant toute la manche. Ça, ça vient avec l’expérience, quand tu sais quoi faire, et comment t’adapter.
Là, j’étais devant, mais tu apprends quand même dans ce genre de situation. Tu sens qu’il cherche des solutions, qu’il essaie de voir où il peut planifier un dépassement, tu l’entends à certains endroits. C’est cool de rouler contre Eli, contre un gars qui en connaît autant.

Depuis 2020, Jett a disputé huit épreuves à Fox Raceway. Il les a toutes remportées. @MX Sports Pro Racing, Inc.
On se demande parfois s’il t’arrive d’attaquer à 200% quand on te vois rouler. C’était le cas ce week-end ?
C’est vraiment très rare d’être à fond, même à fond pendant un tour complet lors d’une manche. Surtout sur ce genre de piste où tu manques de traction et où tu peux vite glisser. Tu ne peux pas aller plus vite que ce que le tracé te permet. J’aurais du mal à dire à combien de pour cent j’étais et, en plus, c’est du tout ou rien à Fox Raceway. Un moment tu attaques et l’autre, tu enroules et tu essaies de soulager la moto pour passer des portions plus difficiles. Ça varie tout le temps, donc c’est difficile à dire.
Quelle sera l’approche pour Hangtown, maintenant que tu sais que tu es de retour au top, que tu es en mesure de gagner.
Je ne sais pas. Quand je pense à Hangtown, j’ai toujours cette – fausse – image d’Eli qui plie tout le monde avec une minute d’avance. Il va falloir que je m’enlève ça de la tête et que je sois confiant. Je vais me pointer là-bas de la même façon que je suis venu ici à Pala. Je vais essayer de prendre de bons départs, de limiter au maximum les erreurs, et de ne pas me compliquer la vie.
Tu reviens de blessure. Cette saison, c’est le titre que tu vises, où tu prends les choses comme elles viennent ?
Je pense pouvoir parler pour tout le monde. On se pointe sur les épreuves pour jouer le titre, sinon on ne viendrait même pas. On met nos corps à rude épreuve, on bosse comme des fous toute la semaine, toute l’année, juste pour avoir une chance de décrocher ce titre. On roule tous dans le but de gagner le championnat. Que ce soit nous trois avec Eli et Hunter, mais aussi un paquet d’autres mecs qui sont derrière la grille chaque week-end. Il y a beaucoup de pilotes qui sont capables de gagner.
Publié le 26 mai 2025
