La belle histoire du week-end, c’est sans aucun doute l’énorme performance de Jeremy Martin à Millville. C’est sur son propre tracé de Spring Creek que le garçon – soutenu par Star Racing Yamaha – a décidé de faire ses adieux au monde professionnel, en participant à une toute dernière épreuve. Résultats, « J-Mart » sort par la grande porte en signant un 3-1 en manches. Après de nombreuses blessures et galères, le garçon n’aurait pas pu rêver d’un meilleur scénario et ne s’en cache pas. Séquence émotion à l’arrivée; micro.
Jeremy, tout le monde ne parle que de toi désormais, tu es un peu la star du week-end. On peut revenir sur cette journée, ces deux départs de dingue, et cette seconde manche incroyable ?
Ouais, franchement, c’est dingue. Finir ma carrière de cette façon-là, c’est vraiment la cerise sur le gâteau. À la base, cette année, j’étais chez Star Racing pour m’occuper du programme VIP du team. Puis j’ai roulé à Pala et Hangtown et c’était vraiment le carnage ; j’étais complètement à côté de la plaque. De là, j’ai pris du recul, j’ai fait un break, j’ai bien bossé et tout s’est remis en place. Et là, c’était vraiment une journée de rêve pour moi. C’est un vrai bonheur que de pouvoir me bagarrer avec cette nouvelle génération. Sérieusement, le rythme des petits jeunes, là… wow. Je n’étais pas un manche à l’époque, mais là, ils sont vraiment, vraiment très chauds.
Tu remportes la seconde manche. Est-ce que tu t’es surpris ? C’est le genre de résultat que tu attendais ?
Honnêtement, j’ai été très mauvais lors des deux premiers rounds de la saison. Si j’avais ramené un 5-5 à Spring Creek, ça aurait déjà été une petite victoire pour moi, en toute franchise. Après, je sais qu’on m’a fait des cadeaux ce week-end. Haiden n’a pas pris un aussi bon départ que moi en seconde manche. Plus tard, Jo a eu un souci avec son frein arrière et il est sorti de la piste en catastrophe. Donc, je sais qu’on m’a fait quelques cadeaux, mais j’ai saisi l’opportunité. J’étais complètement cuit en fin de manche, mais je savais que j’étais en train de boucler les derniers tours de ma carrière de pilote professionnel alors je me suis simplement dit : « Jeremy, tu en es capable. » Et j’ai tout donné.
À quel moment t’es-tu dit que la victoire en seconde manche était peut-être pour toi, finalement ?
Mon mécanicien m’a panneauté pour me dire qu’il me restait 5 tours. J’ai regardé derrière, et j’ai vu que la plaque rouge arrivait. J’ai compris que j’étais dans la « danger zone ». Je ne savais pas trop si c’était faisable de tenir ces 5 tours. J’avais mené quelques tours car Jo était sorti de la piste, et je me suis dit que c’étaient les 5 derniers tours de ma carrière et qu’il fallait que je donne tout. L’an dernier, j’ai fait une course de VTT de 160 km et j’étais cuit à la fin. Je savais qu’au fond, j’avais ce qu’il fallait pour tenir la durée, et je me suis dit : « Désolé Haiden, mais je ne vais pas lâcher. » J’étais prêt à tout donner jusqu’au bout, et j’étais prêt à me faire du mal pour aller la gagner. J’ai essayé d’être un peu plus propre dans certaines portions, de continuer d’attaquer vers la fin pour creuser l’écart sur Haiden. Je savais aussi qu’on était dans deux situations différentes. Haiden joue le championnat et moi, je n’avais vraiment rien à perdre. Les perspectives étaient différentes. Lui est là sur le long terme et moi, j’étais là pour boucler ma toute dernière manche.

Les blessures à répétition ont fait dérailler la carrière de Jeremy Martin, mais le destin a voulu que sa dernière sortie en piste soit remarquée pour les bonnes raisons. Tant mieux.
Est-ce qu’on peut dire que c’est l’une des manches où tu t’es le plus donné de ta carrière, en finalité ?
J’y ai mis beaucoup de cœur, c’est certain. Garder le leader du championnat derrière soi, ce n’est pas une chose facile. Comme je l’ai dit, la nouvelle génération affiche une vitesse incroyable. Je me souviens avoir déjà dû me donner à 200 % ici à Spring Creek, et j’ai aussi souvenir d’une grosse bataille avec Dylan Ferrandis en 2020 – pendant le Covid – pour aller chercher la victoire dans le dernier tour en seconde manche. Franchement, je suis vraiment reconnaissant. J’ai vraiment fait de mon mieux pour contenir mes larmes et j’ai fini par craquer sur le podium. J’ai vu mon frère et ma famille durant toute la journée, à différents moments. Je me disais qu’il fallait que je reste concentré, que je me contienne, parce que j’étais sur le point de disputer les deux dernières manches de ma carrière. J’y suis parvenu, et comme dirait Deegan, j’étais « locked in » et j’ai fait ce qu’il fallait faire.
Les mécanos du team t’ont écrit « Job Well Done » sur trois pitboards dans le dernier tour. Tu l’as vu ? Ça représente quoi pour toi, de voir le team partager cette victoire avec toi ?
Ça représente beaucoup pour moi. Il y a beaucoup de pilotes, de motos et de choses en mouvement au sein du team Star Racing Yamaha. Ils ont 8 pilotes juste en 250. Quatre se sont malheureusement blessés, et c’est aussi comme ça que j’ai eu l’opportunité de rouler cette saison, au final. C’est un groupe de gars qui bossent vraiment bien ensemble. J’ai eu différents mécaniciens toute l’année, il y avait des gars qui venaient, qui partaient, mais tout le monde mettait la main à la pâte pour me filer un coup de main. J’ai pu apprendre à connaître tout le monde très personnellement et je suis vraiment reconnaissant envers le team et ces gars-là. C’était vraiment spécial d’avoir tout le monde au sein du team, et dans le paddock en général, être vraiment et sincèrement content pour moi.
Finalement, après ce genre de performance, est-ce qu’une part de toi-même ne souhaite pas continuer sa carrière ?
Je me doutais bien que cette question allait être posée. Actuellement, je suis en paix avec cette décision. Je l’ai acceptée. Après, cette motivation qu’on a en nous et ce sentiment qui nous envahit quand on monte sur la plus haute marche du podium, c’est comme une drogue. Gagner, c’est vraiment l’un des sentiments les plus incroyables. C’est ce après quoi on court tous chaque samedi, finalement. C’est une drogue, et c’est elle qui te consume. Quand tu y goûtes, année après année, c’est difficile d’accepter de tirer un trait là-dessus. Oui, ça va me manquer, mais je suis prêt à ouvrir un nouveau chapitre de ma vie. À un moment, il faut savoir tourner la page. Je transmets le flambeau à la nouvelle génération, et je vais prendre du recul, je serai de nouveau en charge du programme VIP, j’encouragerai les pilotes, je serai là pour eux, pour boire une bonne bière aussi, et pour essayer de nouvelles choses dans la vie.
Publié le 14 juillet 2025
