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Harri Kullas « je veux finir ma carrière aux Etats-Unis »


Présent sur l’outdoor 450 la saison passé, Harri Kullas avait décroché un ticket qualificatif pour les épreuves du SMX et le garçon n’avait pas démérité en ramenant une 9ème place lors de la finale de Las Vegas. De quoi lui donner des idées pour la suite. Revenu sur le sol US en janvier dernier, Harri Kullas s’est lancé à l’assaut de son premier championnat de Supercross US, en catégorie 250cc. Blessé après 2 épreuves, le pilote Estonien a finalement repris du service en 450cc sur l’outdoor. Après 8 épreuves, il pointe 14ème du championnat, aux portes d’une nouvelle qualification directe pour les play-off du championnat SuperMotocross. Andy McKinstry a profité de la pause pour s’entretenir avec Harri qui envisage – lui aussi – de finir sa carrière de l’autre côté de l’Atlantique. Micro.

Harri, il me semble que tu es arrivé aux USA en début d’année et de là, tu as rapidement commencé à rouler en Supercross… C’était comment ?

Oui, je suis arrivé aux États-Unis à la mi-janvier. Il y a eu un petit peu de retard à cause du visa, mais j’ai eu environ trois semaines et demie sur place avant ma toute première épreuve de Supercross US. Ce n’était clairement pas suffisant, surtout que beaucoup de choses étaient nouvelles pour moi : le Supercross US, l’équipe, etc. Je ne savais pas trop dans quelle direction aller, surtout au niveau des réglages de mes suspensions – en plus, j’étais redescendu en 250cc. En Supercross cette saison, j’avais pour but d’apprendre, de me familiariser avec la discipline et, si possible, de me qualifier pour quelques finales, mais ma saison a été écourtée très rapidement.

C’était quand même plaisant de découvrir le Supercross US, non ?

Oui, j’aime bien le Supercross, peut-être même un peu plus les Supercross européens, car ils sont un peu plus accessibles et je commence à me faire vieux [rires]. Mais le spectacle là-bas, tout l’environnement, c’était vraiment le top. Dommage que je n’aie pas réussi à me qualifier pour les finales sur les deux courses que j’ai pu faire. Il m’aurait fallu faire une meilleure préparation, et surtout plus longue, pour y arriver.

Comme tu dis, tu n’as pas eu beaucoup de temps pour te préparer, et même si tu as de l’expérience en Arenacross, le Supercross US reste très différent… Tu savais à quoi t’attendre ?

Oui, l’Arenacross et le Supercross européen n’ont vraiment rien à voir avec le Supercross US. Aux USA, les transitions sont beaucoup plus raides et techniques, et les pilotes roulent dans la discipline depuis qu’ils sont gamins donc pour eux, enchaîner des triples ou faire des 4-3 dans les enchaînements, c’est presque une seconde nature. Il faut être ultra-précis. Et pour ne rien arranger, j’ai eu droit à l’une des séries de whoops les plus difficiles de la saison à Tampa !

J’ai quand même réussi à me qualifier pour le programme de la soirée à Tampa et j’ai pris part à la première manche qualificative. C’était de la folie : ils refont la piste après les essais et ensuite, on enchaîne directement avec la manche qualificative sans avoir fait de tour de reconnaissance, rien du tout. Tu ne sais jamais vraiment ce qu’ils ont refait sur le tracé. C’est l’une des plus grosses différences avec l’Europe, où tu sais toujours à quoi t’attendre. Ici, ils arrosent, ils refont les whoops en les blindant avec de la poussière, et franchement, c’était chaud pour moi. Je ne m’attendais pas à grand-chose, je voulais juste profiter de l’expérience, prendre du plaisir, participer à chaque épreuve et, avec un peu de chance, parvenir à me qualifier pour quelques finales.

Engagé pour sa première saison en SX US 250, Harri Kullas s’est fracturé le sternum à l’entraînement avant le SX de Daytona @Ralphie Hansen

Tu t’es blessé, ce qui t’a forcé à mettre un terme à ta saison de Supercross. Ça a dû être dur à encaisser pour toi, non ?

Oui, c’est difficile de se blesser à l’entraînement. En course, tu donnes tout, tu prends des risques, c’est normal que les risques soient plus élevés car c’est là que ça compte vraiment. Donc si tu te blesses en course, c’est plus simple à accepter, ça fait partie du sport. Mais là, c’était vraiment une blessure bête, et ça a mis un terme prématuré à ma saison de Supercross.

Est-ce que tu as envie de retenter ta chance en SX à l’avenir, ou tu préfères te concentrer sur le Motocross et SMX ?

Mon objectif, c’est de rester aux USA jusqu’à la fin de ma carrière. On a trouvé un bon équilibre ici, on s’est bien installés et habitués à la vie aux Etats-Unis. Mais décrocher un guidon uniquement pour faire l’outdoor, c’est compliqué, voire impossible – sauf si tu payes tout de ta poche. Donc je suis partant pour faire une saison complète en Supercross et en Motocross, mais cette fois avec une vraie préparation, plus sérieuse et plus longue.

Tu pointes 14e du championnat Outdoor 450 après huit épreuves. Tu n’étais sans doute pas à 100 % lors du premier round, mais on sent que tu montes en puissance. Quel bilan tires-tu de l’outdoor jusqu’ici ?

Oui, ces dernières semaines, ça va beaucoup mieux pour moi. Tout était nouveau avec l’équipe cette année ; c’est leur première année en tant qu’équipe professionnelle, donc on a dû apprendre à se connaître, à comprendre ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas. J’ai trouvé de bons réglages sur la moto en cours de saison, et on a vraiment progressé au niveau des résultats. C’est dommage d’avoir perdu autant de points sur les deux premières épreuves, mais au moins, on a su inverser la tendance. Et puis, je n’ai pas pu faire de courses de pré-saison, comme j’en ai l’habitude en Europe. Il reste trois épreuves, donc je suis motivé pour finir la saison sur de bons résultats.

Harri Kullas a décroché 5 top 15 sur l’outdoor 450, en 8 épreuves @DR

Valentin Guillod, Benoît Paturel ou encore Jorge Prado participent également à l’outdoor cette année. C’est comment de rouler – à nouveau – contre eux, tout en affrontant les meilleurs Américains ?

Oui, c’est sûr que c’est fun. Mais ici, ce sont des pilotes comme les autres. Jorge est venu l’an dernier pour faire quelques piges en Supercross avec un contrat usine, mais je pense que j’ai montré que même en étant totalement privé, il était possible de rivaliser. Et aujourd’hui, on voit que de plus en plus de pilotes Européens tentent leur chance.

Penses-tu que dans les années à venir, davantage de pilotes du mondial MXGP suivront vos traces que ce soit les tiennes, celles de Guillod, Paturel ou Prado, pour venir rouler aux États-Unis ?

Comme je l’ai dit, je pense que oui, on verra encore quelques pilotes franchir le cap des USA. C’est compliqué de réussir à gagner ta vie en étant pilote en Grand Prix. Ici, à chaque épreuve, tu peux repartir avec un petit quelque chose en poche. Et en tant que pilote, j’apprécie beaucoup plus le format de course aux USA. Je pense que c’est un environnement qui convient bien aux pilotes privés.

Penses-tu que les opportunités aux États-Unis te permettront de prolonger ta carrière plus longtemps que si tu étais resté en Europe ?

Je ne dirais pas forcément ça. Si tu regardes, il y a encore de bonnes équipes et des championnats nationaux solides, comme en Angleterre ou en Allemagne. Donc même en vieillissant ou si les GP deviennent trop exigeants, tu peux continuer à rouler. Mais à haut niveau, sur des championnats professionnels, je dirais que les États-Unis offrent un peu plus de possibilités que l’Europe.

On n’a pas encore vu le meilleur de Jorge Prado cette année. Est-ce que ça t’étonne ?

Jorge, c’est clairement un très bon pilote. Il sait ce qu’il veut. Moi aussi, avec l’âge, j’ai appris que si ma moto est bien réglée, mes résultats sont bien meilleurs. Je ne connais pas tous les détails, mais je pense que c’est un peu pareil pour lui. Il cherche encore les bons réglages. Les pistes sont différentes ici, il doit apprendre les circuits, découvrir une nouvelle moto, une nouvelle équipe… Ça prend du temps, surtout quand tu as roulé toute ta carrière sur une seule et même moto.

Lui aussi espère pouvoir finir sa carrière aux USA: un de plus @DR

Qu’est-ce qui a été le plus dur à assimiler pour toi aux USA ?

Je dirais que le plus difficile, c’est d’être éloigné de sa famille et de ses amis.

Tu es récemment devenu papa. C’est comment, cette nouvelle vie ?

Oui, je suis papa maintenant, et c’est génial. J’adore ça, voir ma fille grandir, ce n’est que du bonheur. C’est aussi sympa de voyager tous ensemble, de vivre ces dernières années avec ma femme et mon enfant. Et quand un week-end ne se passe pas comme prévu, c’est quand même plus facile de se réveiller le dimanche matin à côté d’elle !

As-tu déjà des plans pour 2026 ? J’imagine que tu aimerais rester une année de plus aux États-Unis ?

Oui, clairement, je veux rester ici et finir ma carrière aux Etats-Unis. Mais ce n’est pas simple non plus. On travaille dessus, et j’espère qu’on réussira à trouver un bon deal pour l’an prochain.

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