L’arrivée de Jorge Prado aux États-Unis n’a pas été simple, et les résultats du pilote espagnol sur la Kawasaki officielle sont au centre des interrogations. Blessé après quelques épreuves du championnat de Supercross, le double champion du monde MXGP était attendu sur l’outdoor, mais ce dernier peine à répondre à ses propres attentes dans le championnat de Motocross US. Une déconvenue qui étonne Ken Roczen, lequel admet avoir été surpris par les résultats de Jorge Prado lors des quatre premiers rounds, dans le podcast AC & JB Clips animé par Adam Cianciarulo et Justin Brayton.
« Le Supercross, c’était tout nouveau pour Jorge et il s’est blessé d’entrée de jeu. C’est toujours dur de revenir de blessure, peu importe la situation. Ajoutez à cela que tout est nouveau pour lui, et c’est difficile », admet le pilote HEP Suzuki, qui a suivi le début de saison du pilote espagnol sur l’outdoor. « Je suis un peu surpris que Jorge n’ait pas été meilleur que ça, quand même. Peut-être que les réglages de la moto lui posent un problème, c’est ce que j’imagine. Moi, il me faut une moto vraiment bien réglée pour que je sois en mesure de rouler vite, sinon, je ne suis pas terrible. Ceci dit, j’ai du mal à croire qu’un team d’usine comme Kawasaki n’ait pas de réglage de base qui soit correct, qui soit roulable, et qu’ils puissent modifier facilement […] »
D’expérience, le pilote allemand sait que la situation peut vite devenir compliquée, même dans les équipes d’usine qui se refusent à certains changements — raison qui avait justement motivé le départ d’Eli Tomac de chez Kawasaki, fin 2021. « Encore une fois, et je l’ai vu de mes propres yeux chez Honda. Parfois, tu te retrouves juste dans une situation où rien ne fonctionne. La marge de progression sur la moto n’est jamais énorme. Je ne suis pas certain de savoir ce qui pose problème à Jorge. Je ne veux pas le descendre, mais je m’attendais à ce qu’il soit meilleur et surtout après quelques rounds, je n’ai pas vraiment vu d’améliorations de sa part. Il faut lui laisser du temps, car je ne serais pas surpris si, en fin de saison, il devenait soudainement capable de jouer le podium. C’est surprenant que Jorge n’ait pas été en mesure de trouver les pièces du puzzle. Je suis curieux de voir ce qu’il en sera d’ici deux ou trois épreuves […] »
Particularité de Jorge Prado : le garçon a toujours exigé une moto puissante pour s’exprimer, et les Autrichiens ont su répondre aux attentes de l’Espagnol en GP. Jeffrey Herlings — qui avait testé la moto de Jorge — en témoignait d’ailleurs. Mais, toujours selon Ken Roczen, les problèmes de puissance de la Kawasaki Factory sont à écarter. « Aucune chance que la moto ne soit pas assez puissante, comme on a pu entendre certaines personnes le dire », explique Ken Roczen, qui balaie d’un revers de main l’idée que la puissance de la KX-F officielle puisse être mise en cause. « Au départ, ça peut faire une différence, oui, mais ils ont largement ce qu’il faut pour faire en sorte que ça fonctionne. Je ne crois pas un seul instant que ses problèmes viennent de la puissance du moteur. C’est certain qu’ils ont tout ce qu’il faut de ce côté-là pour trouver des solutions. J’imagine que ce serait bien plus un problème de châssis et de suspensions […] »
Les différences entre les circuits européens et américains sont-elles à prendre en compte ? Ken Roczen — qui passait par cette transition il y a 15 ans — estime que celles-ci ne devraient pas constituer un frein pour un pilote du calibre de Prado.
« Les tracés en GP sont plus diversifiés. Il y a du béton, du sable, du dénivelé, des terrains plus lents où tu dois te faufiler, mais ils ont aussi des tracés comme Matterley Basin qui sont vraiment rapides. Pour moi, les tracés ne sont pas si différents, et Jorge a roulé sur assez de circuits et disputé assez de courses pour être capable de se débrouiller de ce côté-là. Qu’il galère aux essais parce que c’est plus court, je peux comprendre. Mais quand tu es un pilote de son calibre, il faut que tu trouves des solutions rapidement. Après, certains pilotes apprennent les pistes rapidement, et d’autres non. »
Enfin, Ken Roczen revient sur sa propre expérience et souligne les différences de contexte entre son arrivée aux USA en 2012, et celle de Jorge Prado, en 2025. Ken Roczen, Marvin Musquin, Dean Ferris, Arnaud Tonus, Dylan Ferrandis, Thomas Covington, Tom Vialle, Dylan Walsh, Harri Kullas & Co… Ces 15 dernières années, une poignée de garçons ont précédé Jorge Prado en tentant — avec plus ou moins de réussite — l’aventure américaine. Tous prenaient leurs marques en 250, à une petite exception près… Max Anstie. Le pilote britannique, en difficulté en 450, a complètement relancé sa carrière en redescendant en 250 dès 2023. Luxe que ne pourra pas se permettre Jorge Prado.
« On est arrivés aux USA dans des circonstances bien différentes, Jorge et moi », conclut Ken Roczen. « Moi, j’étais en 250 et je n’avais pas beaucoup de titres en poche. J’étais encore un ado. Jorge n’est plus un ado, il a roulé en MXGP et il a décroché des titres dans la catégorie. Je dirais aussi qu’on peut trouver bien plus d’aide, que les gens sont plus à l’écoute et présents aujourd’hui pour aller dans la bonne direction qu’à l’époque. Il y avait beaucoup de choses à apprendre quand je suis arrivé aux USA aussi. Quoi qu’il en soit, je suis certain que Jorge va trouver des solutions. La question, c’est de savoir quand, et surtout quand il sera de retour à son meilleur niveau. Est-ce qu’il sera en mesure de jouer la gagne à chaque fois ? J’imagine, mais il y a Eli, Jett, Aaron roule bien dernièrement… Il est dans une période de façonnage, ça va prendre du temps, et demander beaucoup de boulot […] »

Jorge Prado a fait de longues séances de testing à Club MX avec le staff du team Kawasaki pendant le break @Octopi Media
Publié le 27 juin 2025
