Troisième en 2023 – ex æquo avec Tom Vialle – puis second en 2024 – ex æquo avec Tom Vialle –, Anthony Bourdon accroche enfin ce titre de Prince of Paris à son palmarès. Soutenu par Honda SR Motoblouz pour la fin de saison 2025, le pilote français prend une belle revanche après une année marquée par une lourde blessure sur le sol américain. Tout sourire ce dimanche soir et auréolé d’une prestigieuse couronne, Anthony se prête au jeu de l’interview et nous raconte son week-end parisien, tout en évoquant son avenir aux États-Unis et ses objectifs futurs. Micro.
Anthony. Félicitations pour le titre de Prince of Paris. L’an dernier, tu terminais ex aequo avec Tom Vialle. Cette fois, c’est pour toi. Gagner à Paris, devant ton public, ça doit être quelque chose de fou. Sachant ce qui t’est arrivé en début d’année, c’est une belle revanche, non ?
Ouais, c’est clairement ça, comme tu dis. J’ai passé quelques mois vraiment compliqués en début d’année, en février, aux USA. Tout le monde le sait, j’ai eu une grosse blessure. Je ne pouvais pas avoir une plus belle récompense ici, à Paris, qu’en montant sur la plus haute marche du podium. Être Prince of Paris, ça faisait trois ans que je courais après, donc c’est cool d’enfin parvenir à finir sur la plus haute marche ce week-end.
Je vais te la poser d’entrée de jeu, comme ça ce sera fait. Les gens vont forcément se demander pourquoi être redescendu en SX2 pour Paris alors qu’aujourd’hui tu es un pilote SX1 sur le SX Tour.
C’est vrai que maintenant, je suis un pilote 450 sur le SX Tour. En fait, c’est tout simple : on a fait le choix de rouler en 250 parce qu’il y avait l’opportunité de faire un podium et même de jouer la victoire. En 450, on ne va pas se le cacher, c’était compliqué à envisager. Jouer les premières places avec les frères Lawrence, Webb, Malcolm et compagnie, ce n’est pas donné à tout le monde. Le but, c’était de mettre la Honda sur la plus haute marche en 250. C’est chose faite, voilà pourquoi j’ai décidé de rouler à Paris en 250.
Tu t’es bien battu avec Luke Clout tout le week-end. Je pense que personne ne le connaît vraiment en France. Tu t’attendais à ce qu’il affiche ce type de niveau à Paris ?
Oui, c’est vrai que Luke Clout, assez peu de monde le connaît chez nous. Mais c’est un des meilleurs Australiens chez lui, là-bas, sur les championnats australiens. Ce sont des championnats qui affichent quand même un bon niveau, et Luke fait partie des meilleurs pilotes. Il roule devant, il a battu Cédric – il me semble – sur les dernières courses à quelques reprises. Il a déjà gagné en Australie, donc ce n’est pas n’importe qui. C’est juste qu’on n’entend pas trop parler de lui.
Le week-end dernier, il était en Allemagne et – pareil – il fait un podium, il me semble, sur les deux jours. On va dire que ce n’est pas un peintre, quand même ! Je me suis battu avec lui tout le week-end. C’était une belle bagarre. On a vu qu’on était quand même un peu au-dessus du lot. C’était cool qu’un pilote comme lui vienne ici à Paris, pour qu’on puisse se battre ensemble.

Ce week-end à Paris, Anthony Bourdon a soit gagné, soit terminé second. Une régularité qui lui permet de décrocher le titre de Prince of Paris 2025
Avant la dernière manche, tu avais une assez grosse marge de manœuvre sur Luke Clout, mais on a vu que tout peut arriver. Tu étais dans quel état d’esprit pour la dernière ? Plutôt à compter les points et à faire attention, ou à tout donner et advienne que pourra ?
Je suis parti à la dernière manche pour tout donner, pour aller chercher la victoire. Malheureusement, je ne suis pas très bien parti, je dois être 6ᵉ ou 7ᵉ dans les premiers virages. J’ai fait le forcing pour remonter, je suis assez rapidement passé second, à la mi-manche il me semble. De là, j’ai attaqué pour revenir et je suis revenu dans la roue de Luke, mais il m’a manqué un peu de temps pour aller le chercher. Je savais que j’étais quand même Prince of Paris en terminant second. J’ai montré que j’avais la vitesse et que je méritais cette victoire ; c’est plutôt cool. Luke, c’est un très bon pilote, mais il est quand même un peu chaud, et il fait pas mal d’erreurs. Je me doutais un peu qu’il allait bien finir par en faire une ce week-end. Il s’est retrouvé dans un accrochage au départ, c’est malheureux pour lui mais c’est comme ça, et j’en ai profité.
Un mot sur les whoops du Supercross de Paris. C’est un peu leur marque de fabrique désormais. Ils étaient énormes une nouvelle fois, surtout en début de week-end. En SX2, c’était vraiment le plus gros séparateur, en fin de compte.
Grave. Ils étaient encore bien costauds. Tous les ans, c’est quand même du lourd, les whoops de Paris. C’est vrai qu’on voit qu’on peut vraiment faire la différence dedans, que ce soit en 450 ou en 250. Je pense que j’étais plutôt à l’aise dedans tout le week-end ; on l’a vu, et ça m’a aussi aidé à faire la différence.
Tu as parlé de cette grosse blessure en début d’année. Est-ce qu’on en garde des séquelles aujourd’hui ?
Aujourd’hui, je suis quasiment comme neuf. Je les ressens encore un peu de temps en temps. J’ai encore du matériel dans le bassin : une plaque et des vis. D’ailleurs, j’ai eu un petit souci cet été, j’ai tapé assez fort le bassin. Après des radios de contrôle, on a vu qu’une vis s’était cassée dans le bassin. Ça expliquait les tensions que je pouvais ressentir vers le mois d’août. J’ai un peu galéré avec ça pendant un mois. J’ai fait une petite pause et après, c’est passé. Là, je suis quasiment à 100 %, je ne ressens pas spécialement de gêne pour rouler. C’est juste que ça me lance parfois, après de gros entraînements.
Le matériel médical, ils m’ont conseillé de le laisser, mais je peux l’enlever si je veux. Que ce soit mon chirurgien aux US qui m’a opéré ou quand j’ai été suivi en France, ils m’ont conseillé de garder plaque et vis. Pour l’instant, ça reste comme ça. On verra ce que ça donnera par la suite.
BarX a annoncé la composition de leur équipe pour 2026. J’imagine que les gens se sont rendus compte que tu n’étais pas dans les effectifs. En 2024, tu étais leur meilleur pilote en SX 250. En 2025, pareil avant ta blessure. Cette blessure, c’était dû à un problème mécanique à l’entraînement, de mémoire. Il doit y avoir un peu d’incompréhension quant à savoir pourquoi ça ne continue pas avec eux pour 2026. C’est ta volonté, la leur ?
Comme tu le dis, la blessure a été causée par une casse mécanique, ce n’est pas vraiment de ma faute… Comme tu l’as aussi dit, ça fait deux ans que je roule pour eux, et deux ans que je rapporte les meilleurs résultats à l’équipe. Donc ouais, ça m’embête un peu de ne pas continuer avec eux car je pense que c’est quasi acté qu’on ne continuera pas. Même si j’ai encore eu des contacts la semaine dernière avec le patron. Ils me disent qu’ils cherchent du budget pour essayer de me garder, mais bon, ils ont déjà annoncé leurs pilotes, alors je ne compte pas trop là-dessus non plus. Mais je suis toujours en contact avec le team, rien n’est fait.
Sinon, j’ai eu quelques touches, mais rien d’extraordinaire. Franchement, si je retourne aux USA, c’est pour être dans de bonnes conditions. Je n’ai pas envie d’y retourner à moitié, de galérer, et de prendre des risques pour ne pas parvenir à gagner ma vie, voire à dépenser de l’argent pour rouler. Je n’ai pas envie que retourner aux USA me coûte de l’argent à ce stade de ma carrière, en fait. Je pense que j’ai fait mes preuves aux USA, et que je peux prétendre à y retourner sans avoir à payer de ma poche.

La porte SX US n’est pas encore refermée pour 2026, et Anthony espère pouvoir prendre sa revanche sur le sol Américain l’an prochain
Et un programme à la carte ? On a du Soubeyras en Australie, du Aranda au Brésil. On sait pourquoi vous partez là-bas. Les gens sont parfois frileux avec l’aspect financier, mais il faut bien gagner sa vie en roulant. Tu envisages ce genre de programme ?
Ouais, bien sûr. Après, en ce moment, je suis vraiment concentré à 200 % sur le Supercross. Je ne fais que ça toute l’année. On voit qu’il y a des championnats qui se développent, comme au Brésil par exemple. Moi, je fais aussi le Supercross en Inde, qui se développe pas mal. Je fais aussi le World Supercross, donc je suis un peu partout. On arrive quand même à trouver des courses. Là, mon calendrier est rempli jusqu’à Noël, tous les week-ends ! C’est cool de pouvoir avoir tous ces championnats.
Du coup, tu mets le Motocross de côté pour de bon ?
Mon objectif, c’est quand même de retourner aux USA tant que je peux le faire, parce que je sais très bien que ce ne sera pas le cas pendant encore 10 ans. C’est pourquoi j’ai pour objectif de vraiment me focaliser sur le Supercross. Pour la suite ? On verra plus tard. Pourquoi ne pas revenir en Motocross après ça ? Faire du sable aussi, comme le Touquet. Ça me botterait vraiment bien, mais pas pour tout de suite.
Tu es avec Honda SR Motoblouz pour le SX Tour et la fin de saison. Est-ce qu’il est acquis que ça continuera sur un programme français en 2026, ou pas ?
Pour l’instant, ce n’est que pour la fin d’année. On a discuté un peu pour l’année prochaine, mais rien n’a été fait. Aujourd’hui, je ne sais pas ce que je ferai l’an prochain. Je me concentre vraiment sur les courses à venir en fin de saison. On n’a pas eu énormément de courses sur le SX Tour cet été. Et malheureusement, lors des deux seules courses qu’on a faites jusqu’à présent, je me suis un peu loupé. C’est comme ça. Voilà pourquoi je mise tout sur la fin de saison. Déjà, on a bien commencé les courses hivernales avec un beau Supercross de Paris. La suite, c’est à Lyon le week-end prochain. J’espère faire une belle finale du SX Tour là-bas pour essayer de rattraper mes deux courses loupées de cet été.
On avait fait un sujet avec les pilotes du SX Tour pour parler des changements qu’ils aimeraient voir. Beaucoup parlaient de redonner l’envie aux jeunes. C’est ce que JLFO a fait avec les 85cc et les 125cc. Les juniors ont pu rouler à Paris. Aujourd’hui, les jeunes ont une excellente raison de se mettre au Supercross, et ça pourrait leur ouvrir des portes plus tard, non ?
Carrément. Franchement, bravo à eux pour tout ce qu’ils ont mis en place pour les jeunes, parce que c’est vraiment le top. S’ils ne font pas ça, c’est sûr que la relève ne sera pas là. C’était compliqué, on voyait bien qu’il n’y avait pas grand monde non plus derrière. Là, on voit que des petits jeunes en 125cc commencent à mettre du gros gaz. Je pense à Yannis Lopez, et même au petit Tim Lopes qui s’est malheureusement blessé. C’est incroyable ce qu’il a fait le samedi.
C’est cool de relancer les 85cc, les 125cc. Après, c’est juste un peu dommage pour nous parce que j’ai l’impression qu’on a été un peu délaissés. Ils ont vraiment eu beaucoup de courses, et nous, on ne fera que 3 épreuves sur la saison du SX Tour. C’est un peu embêtant pour nous, pour nos sponsors et tout ce qui va avec. Mais voilà, j’espère qu’on aura plus d’épreuves au championnat de France SX Tour dans les années à venir.