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Grégory Aranda « Parfois, tu passes juste à côté d’un contrat qui aurait pu changer beaucoup de choses »

Image: Beyond Prod

De ses débuts sur le mondial MX2 à aujourd’hui, plus de 18 années se sont écoulées pour Gregory Aranda. Véritable incontournable des paddocks Français et plus que reconnu au niveau Européen, le pilote GSM Yamaha s’apprête à souffler sa 35ème bougie. Les années passent, mais la compétitivité du garçon ne cesse de s’accroître et le pilote Français affiche probablement l’une des meilleures formes de sa carrière depuis son arrivée au sein de la structure de Serge Guidetty, en 2023. Notre confrère Tom Jacobs s’est entretenu avec Grégory, histoire de faire un point sur sa carrière, de revenir sur les années de grand-prix ou encore de tirer certains bilans avant de se lancer à l’assaut de l’ouverture du World Supercross à Vancouver, ce samedi. Micro.

Grégory ! Champion de France, champion ADAC, une superpole au SX de Paris devant Ken Roczen & les frères Lawrence, une sixième place finale sur le mondial de Supercross. Ces derniers 12 mois ont été incroyables pour toi !

C’est vrai qu’on peut dire que je suis plus en forme que jamais. Par le passé, je n’ai jamais été en mesure de rester au top de ma forme pendant une aussi longue période. J’avais souvent la vitesse nécessaire pour rouler aux avant-postes, mais pas de façon totalement contrôlée. Rouler à ce rythme, c’était être proche de la catastrophe pour moi. Si j’ai atteint ce niveau aujourd’hui, ce n’est pas seulement grâce à mes propres efforts. car l’équipe GSM Yamaha a été d’un très grand soutien.

D’où viennent ces changements ? Tu avais presque disparu des radars à cause d’une blessure il y a quelques années.

Oui. J’ai contracté une petite blessure au pied en 2019 au Supercross de Paris. Ensuite, j’ai souffert d’un staphylocoque et j’ai été contraint de me mettre au vert pendant toute la saison 2020 alors que j’avais déjà 31 ans, ce n’était pas la façon dont je voulais terminer ma carrière. Il y a aussi eu l’apparition de quelques doutes, je me demandais ce que j’allais faire par la suite. Au final, je n’ai pas pu rouler pendant un an et demi. À cause de ma blessure, je ne pouvais pas courir et je pouvais à peine marcher, alors il m’était difficile de rester en forme. À ce moment-là, j’ai pensé que ma carrière de pilote était terminée. Puis, petit à petit, j’ai retrouvé la forme et j’ai recommencé à rouler. J’ai signé avec Tech32 KTM pour reprendre la compétition. C’est sûr que mon état d’esprit a changé. Je n’avais jamais été aussi sérieux au sujet de la compétition avant, et j’ai décidé de faire tout ce qui était nécessaire pour aller chercher des résultats. Ce genre de détermination, c’était nouveau pour moi.

Tu as refait tes bases en 2022, mais il semble que toutes les pièces du puzzle se soient mises en place après avoir rejoint le team GSM Yamaha la saison dernière ?

Sans aucun doute. L’équipe a un excellent préparateur physique en la personne de Didier Rochette. J’aime la Yamaha. Serge Guidetty, le patron de l’équipe, a beaucoup d’expérience et il est très impliqué. Il y a un soutien et un suivi sur tous les aspects. Et bien sûr, tout le monde dans l’équipe travaille dur pour obtenir des résultats et ça porte ses fruits. Par rapport à l’année dernière, j’ai l’impression d’avoir encore franchi un step.

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Est-ce que des pilotes comme Brayton et Reed t’ont inspiré pour continuer à aller de l’avant ?

Oui, ces pilotes ont prouvé qu’il est possible d’être très compétitif en fin de carrière. En général, je dirais qu’il y a maintenant beaucoup d’athlètes qui performent à un âge plus avancé. Pas seulement en motocross ou en supercross, mais aussi en tennis ou en course à pied. Aux Jeux olympiques, les trois médaillés du marathon avaient plus de 33 ans, par exemple. Je pense que beaucoup de choses dépendent de ton approche et de ce que tu as fait avant. Comme je l’ai dit, avant je n’étais jamais investi à 100 %. Mentalement, je ne ressens pas de limite à cause de mon âge, et je suis au top de ma forme physique.

Es-tu conscient du fait que tu es devenu une sorte de héros national ? Un pilote spectaculaire avec un talent unique sur la moto. C’est certainement le cas pour les fans français, mais même certains pilotes US sont impressionnés par ton style.

C’est sûr que c’est cool d’être vu comme ça. Je pense que ça remonte à loin. En terme de vitesse pure, j’ai fait beaucoup de pole positions. Même en MX1, j’étais régulièrement aux avant-postes lors des essais chronométrés, dans le top 5. Seulement, je n’ai pas su retranscrire cette vitesse pendant les manches où je n’ai signé que des top 10 pour meilleurs résultats. Donc pas en adéquation avec la vitesse pure que je pouvais montrer lors des qualifications ou des essais libres. Même chose au Supercross de Paris où j’ai remporté la Superpole. Heureusement, je peux maintenant maintenir ce rythme plus longtemps, alors j’ai vraiment hâte d’être à Paris SX cette année ! Quand tu vois les frères Lawrence te féliciter pour ta Superpole ou que tu entends les fans, c’est vraiment satisfaisant. Sur un tour, je suis capable de réunir tous les ingrédients pour m’approcher du tour parfait. Réussir à suivre le même rythme pendant toute une manche, c’est autre chose, mais c’est ce à quoi on travaille.

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Tu as toujours eu cette capacité à tout donner sur un tour ?

Oui et non. Ce qui est sûr, c’est que c’est un truc que j’aime. Il faut trouver l’équilibre entre se donner à fond, mais sans faire d’erreurs. C’est un compromis difficile à trouver. Et il y a aussi l’aspect mental. Surtout dans un stade, tu peux sentir que les gens ont des attentes. Tu l’as déjà fait avant, alors les gens s’attendent à ce que tu le fasses de nouveau. Ma première saison en GP y est aussi pour quelque chose, je pense. À l’époque, ils avaient introduit les manches qualificatives en MX2. Si tu ne te qualifiais pas, tu étais relégué à la LCQ. Comme c’était ma première année sur le championnat du monde, j’ai souvent participé à la LCQ. C’était une dernière séance chronométrée qualificative, et il fallait affronter des pilotes comme Tommy Searle, Marc de Reuver ou Davide Guarneri quand ils avaient rencontré des problèmes lors de la manche qualificative. Seuls les six pilotes les plus rapides étaient repris pour le dimanche, alors tu devais tout faire pour te qualifier. Je pense que c’est resté depuis. Et à l’entraînement, j’ai aussi beaucoup travaillé là-dessus.

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À 16 ans, tu as rejoint Christophe et Sébastien Pourcel chez GPKR Kawasaki. C’était comment ?

Assez difficile. Christophe était assez caractériel, même si on s’entendait bien. Je me suis aussi bien entendu avec Sébastien, et l’équipe était bonne. Mais j’étais très inexpérimenté à ce moment-là. En fait, je suis entré dans l’équipe alors que je n’avais que 15 ans. Vivre seul en Belgique, c’était difficile pour moi. Tout était différent. Ces années ont été difficiles sur le plan personnel et, à un moment donné, j’ai voulu arrêter de rouler. En 2008, j’ai signé avec Jean-Jacques Luisetti et CLS Kawasaki, qui étaient basés dans le sud de la France, beaucoup plus près de chez moi. Ça m’a aidé à retrouver le moral.

C’est au cours de cette première saison chez CLS que tu t’es fait remarquer.

Exact. L’équipe était bonne et la moto était performante, même si ce n’était pas une moto d’usine. J’ai terminé 6e lors du GP de France et j’ai réussi à faire quelques autres coups d’éclat chez CLS, ce qui était génial compte tenu que nos motos étaient standards.

Les pilotes de motocross français ont vraiment commencé à se faire présents la scène mondiale à cette époque-là. Il y avait beaucoup de bons français. C’était comment, de faire partie de cette vague de talents français ?

On n’avait pas tous le même âge, mais la compétition entre français nous a clairement poussés à nous améliorer. L’infrastructure mise en place par la fédération française avait commencé à porter ses fruits. Le passage du Minivert au Cadet, puis au Junior s’avérait être une bonne école pour progresser et arriver en GP. La Fédération a réuni les jeunes les plus talentueux pour les entraîner et de nombreux pilotes français ont réussi à participer au championnat du monde. Du coup, le niveau des championnats Elite s’est élevé par la même occasion.

Quand as-tu découvert que tu avais un don pour le supercross ?

Quand je roulais en 80cc, je faisais déjà beaucoup de supercross. J’avais ma propre piste et j’adorais ça ! Mais la plupart des équipes de GP n’étaient pas très chaudes à l’idée de faire du supercross, par peur des blessures. Donc j’ai arrêté d’en faire pendant un temps. Les choses ont changé quand je suis allé chez Bud Racing Kawasaki, qui considérait le supercross comme une discipline aussi importante que le motocross. J’ai donc recommencé à en faire. J’ai gagné le titre européen en 2010, j’ai fait le SX de Paris et le SX Tour. En gros, j’ai toujours aimé le supercross, mais il s’agissait plutôt d’avoir les bonnes opportunités.

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Au cours de toutes ces années, quel est le coéquipier qui t’a le plus impressionné ?

Christophe Pourcel. Il était spécial. Il prenait plaisir à alimenter des fake news on va dire ! Il laissait entendre qu’il ne s’entraînait jamais. Lorsqu’il s’entraînait, c’était en cachette pour que personne ne le sache [rires]. Je pourrais écrire un livre sur ce type ! Ensuite, il y a eu Steven Frossard. Il m’arrivait de le déposer à l’entraînement et d’être 3 secondes plus rapide que lui. Puis, quelques jours plus tard sur un GP, il était vraiment capable de trouver de la vitesse sortie de nulle part. Il pouvait être 2 secondes plus rapide que moi. Steven se transcendait lorsque c’était important, d’une manière qui m’a vraiment impressionné. Même lorsqu’il ne se sentait pas particulièrement bien, il pouvait trouver la vitesse lors des qualifications en s’accrochant à Cairoli ou à n’importe quel autre pilote. Chez Bud Racing, j’avais Davide Guarneri comme coéquipier et il était très fort physiquement. Un véritable guerrier ! Sur la moto, Nicolas Aubert était lui aussi très doué. Dans l’ensemble, j’ai eu la chance de rouler aux côtés de mecs formidables.

De tous les pilotes qui tentent l’aventure aux US, difficile de dire qui va réussir ou non. Avais-tu anticipé le succès que Dylan Ferrandis rencontrerait aux États-Unis ?

J’ai fait la connaissance de Dylan très jeune, lorsqu’il est arrivé chez Bud Racing pour rouler en 125cc. Même à cette époque, il ne parlait que de supercross. Dylan avait des objectifs très clairs et il était déjà très, très fort mentalement. Même lorsqu’il était sur 125cc, il voulait me battre alors que j’étais en MX1, et Nicolas Aubin en MX2. On avait tous les deux une assez bonne vitesse, alors voir ce jeune vouloir relever ce genre de défi, c’était assez drôle pour nous. D’un autre côté, je pense que c’est cette volonté et cette détermination qui lui ont permis de remporter quatre titres aux États-Unis.

Si tu pouvais remonter dans le temps et te donner un conseil, ce serait lequel ?

Tu as toujours des regrets, il y a toujours des choses que tu aurais pu mieux faire. Qui sait où j’en serais arrivé aujourd’hui si j’avais travaillé aussi dur à mes débuts ? On ne le saura jamais. La carrière d’un athlète est fragile, et compliquée. Parfois, tu passes juste à côté d’un contrat qui aurait pu changer beaucoup de choses. La seule chose que je pourrais me donner comme conseil, ce serait d’arriver sur le mondial un peu plus tard. En 2007, Gautier Paulin et Marvin Musquin gagnaient en EMX250 – on faisait partie de la même génération – alors que je luttais en MX2 parce que je n’étais pas encore prêt. Mentalement, c’est dur de voir des pilotes que tu as battus chez les juniors réussir sur l’Europe 250 alors que pour moi, c’était difficile de me qualifier sur les grands prix.

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Avec Bud Racing Kawasaki, tu as participé au SX d’Anaheim 1 en 2010. Tu t’es qualifié 7e en heat, et tu as terminé 13ème en finale. Des débuts solides ! Tu n’avais que 20 ans et tu étais très inexpérimenté en SX US, il y avait donc une grosse marge de progression. C’est dingue que tu n’aies participé qu’à un seul Supercross US.

L’année suivante, Kawasaki US m’a contacté pour remplacer Jake Weimer sur la moto factory. Juste avant la saison 2011, Jake s’était fracturé le bras à l’entraînement. Malheureusement, et pour des raisons politiques, je n’ai pas pu y aller. Bud Racing était associé à Rockstar Energy et Kawasaki US avait déjà son accord avec Monster Energy. C’est finalement Fabien Izoird qui l’a remplacé. C’était une grosse déception pour moi et, par la suite, je n’ai pas eu d’autres opportunités de rouler aux États-Unis.

Revenons au présent. Qu’est-ce qui fait que Serge Guidetty est si efficace ? Maxime Desprey roule mieux que jamais, Thomas Ramette et Anthony Bourdon se sont bien débrouillés au sein de son équipe. Jace Owen et Carson Brown ont dit beaucoup de bien de l’équipe GSM après avoir participé au WSX.

Serge a lui-même roulé en supercross. Tout d’abord, il est très attentif aux besoins de ses pilotes. Ensuite, Serge a créé une excellente ambiance dans son équipe et il fait tout pour nous fournir ce dont nous avons besoin. J’ai déjà mentionné Didier, notre préparateur physique. Autre exemple, si on fait un bootcamp, Serge se déplace avec le camion et les mécaniciens pour ne rien laisser au hasard. Afin d’être le plus compétitif possible pour le World Supercross, l’équipe GSM Yamaha a intensifié la mise au point des motos. Dans l’ensemble, c’est un gros, gros engagement pour une équipe privée.

Le World Supercross va débuter au Canada. Que penses-tu du format des courses ?

C’est intense, les finales s’enchaînent rapidement ! Les courses sont très serrées, mais on insiste beaucoup sur les départs parce que les courses sont courtes. C’est un désavantage pour moi car je ne suis pas le meilleur starter. À chaque fois, je dois revenir de derrière. La seule fois où j’ai réussi à prendre un bon départ l’année dernière – lors de la deuxième finale de Melbourne – je me suis battu pour la victoire, et j’ai fait deux derrière Ken Roczen. Avec ce format, signer trois bons résultats est très compliqué. À Melbourne, j’ai manqué de peu le podium en terminant 5e derrière Dean Wilson et Joey Savatgy. C’est clair que je dois améliorer mes départs pour monter sur le podium, alors c’est ce sur quoi j’ai travaillé dernièrement.

Quel est ton objectif sur le WSX cette saison ?

Honnêtement, on est tellement similaires sur la piste que je ne veux pas m’avancer. Je vais prendre les choses course par course. L’objectif est toujours de monter sur le podium et de prendre du plaisir. Battre Eli Tomac ou Ken Roczen n’est jamais chose facile, alors on verra dans quelle forme les pilotes seront. Logiquement, la prochaine étape pour moi est d’intégrer le top 5 après ma 6e place de l’année dernière. Et idéalement, j’aimerais voir à quel point je suis en mesure de me rapprocher du podium.

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Avec ton coéquipier Maxime Desprey en SX2, tu domines le Supercross français. À 31 ans, il est également l’un des vétérans. C’est comment d’avoir un coéquipier comme Maxime ?

Les choses sont un peu plus faciles pour nous parce qu’on roule dans des catégories différentes. Maxime roule toujours avant moi, alors il peut me donner des conseils sur l’évolution de la piste. Quand je le vois rouler, il y a toujours quelques trucs que je peux lui dire, donc c’est cool. Sur le championnat de France de motocross, on s’est battu tous les deux pour le titre en MX1 cette saison, donc c’est une autre situation. Mais, on a beaucoup de respect l’un pour l’autre, alors tout s’est bien passé et Maxime a fait une bonne saison. Il a décroché le titre et j’ai terminé troisième. C’est génial pour l’équipe. Max a les pieds sur terre, il n’y a pas de faux-semblants avec lui. Ça contribue à l’ambiance au sein de l’équipe. Je m’entends bien avec Lucas Imbert, et notre nouveau pilote Julien Lebeau aussi.

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Par le passé, les pilotes se préparaient chacun dans leur coin, avec leur propre programme. Même lorsqu’ils roulaient pour la même équipe.

Je pense qu’on a trouvé un bon équilibre. Rouler et s’entraîner ensemble, c’est motivant. On se pousse les uns les autres, donc tout le monde s’améliore. Mais quand tu te bats à l’entraînement presque tous les jours, les choses peuvent vite devenir compliquées. Après, on vit dans des régions différentes de France, alors se retrouver pour faire des bootcamps ou quelques entraînements, ça fonctionne très bien. C’est vrai que pendant la période où j’ai roulé en GP, dans l’équipe, chaque pilote restait dans son coin. Ce qui revenait aussi à ne pas trop se montrer, à ne pas dévoiler ses cartes  aux autres.

Il y a un tas de spécialistes du Supercross comme toi Cédric Soubeyras, Angelo Pellegrini, Maxime Desprey, Anthony Bourdon, Thomas Ramette, Harri Kullas qui ont ouvert la voie sur la scène européenne. C’est étrange qu’il y ait si peu de jeunes qui vous suivent en Supercross ?

Oui. Ça fait un moment qu’on voit les mêmes pilotes aux avant-postes. En France, le SX Tour est très conscient de la situation. Ils ont relancé la catégorie 125cc Junior cette année, et ça va au-delà de l’ajout d’une simple catégorie supplémentaire au championnat. Ils organisent des journées d’initiation pour permettre aux pilotes inexpérimentés de se familiariser avec le supercross. Je pense que les choses évoluent dans le bon sens. Cependant, le cœur du problème reste toujours le même en Europe. Les équipes interdisent à leurs pilotes de faire du supercross, mais en regardant l’incroyable saison de Jorge Prado, je ne pense pas que les quatre courses qu’il a faites en SX US aient nui à ses chances de titre ! Au contraire, il est arrivé au championnat du monde cette année avec un gros bénéfice. Espérons que les directeurs d’équipe commencent à y penser pour laisser à leurs pilotes une certaine liberté pour faire du supercross. L’expérience acquise en Supercross est un véritable atout pour un pilote de motocross en ce qui concerne la technique et la précision. Je parle des petits détails qui se perdent parfois lorsque tu enchaînes des manches de 40 minutes pour être en forme. En ce qui concerne la technique, Prado avait une longueur d’avance sur Gajser, Herlings et Febvre lorsqu’il a commencé la saison; c’était impressionnant !

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Tu as pensé à la suite en reprenant une piste dans le sud de la France, le MC Des Costières. Le temps passé sur le bulldozer à préparer la piste t’a-t-il appris quelque chose de nouveau ?

J’aimerais bien, mais non. Lorsque j’étais sur la touche à cause de mes problèmes de santé en 2020, j’ai dû trouver quelque chose d’autre à faire. Je me disais que c’était terminé pour moi, alors j’ai repris la gestion de ma piste locale à Beauvoisin. Le timing était parfait car le président du club estimait qu’il était temps pour lui de faire autre chose. Tout s’est bien passé, mais en ce qui concerne la préparation de la piste, ce n’est pas ma piste personnelle, donc je ne la prépare pas pour m’améliorer moi ! On veut proposer une piste accessible et amusante que les pilotes de tous les niveaux pourront apprécier. En fait, j’ai même rendu les sauts plus faciles, alors c’est peut-être le contraire de ce que tu pensais ! Pour les pilotes de haut niveau, la piste n’est pas assez difficile parce qu’on la refait entièrement. Dans notre cas et en tant que club, on ne peut pas survivre en se concentrant uniquement sur les pilotes de haut niveau.

Tu es l’un des pilotes les plus performants de l’histoire du SX Allemand. Quel est le secret de ton succès en Allemagne ?

J’aime les courses là-bas, et le fait qu’ils invitent de bons pilotes américains; ça permet de garder de la fraîcheur. Au fil des ans, j’ai connu de belles batailles sur l’ADAC, par exemple avec Jace Owen. C’est toujours fun d’aller là-bas. Je roule pour Sturm Racing depuis de nombreuses années en Allemagne, et c’est une équipe au top. Il y a une très belle amitié qui s’est créée avec la famille Sturm, ça rend les choses encore plus personnelles. Ils me soutiennent même en tant que sponsor personnel lorsque je roule pour GSM Yamaha. Il y a quelques années, j’ai fait des saisons complètes pour eux, où j’ai participé à l’ADAC MX Masters et au championnat de Supercross. Enfin et surtout, ils me permettent d’utiliser la marque de moto que j’utilise en France, ce qui rend la transition entre le SX français et le SX allemand très facile pour moi.

L’autre histoire d’amour de longue date que tu as, c’est celle avec le Supercross de Paris.

C’est difficile à décrire, et c’est sûr que c’est encore plus important parce que j’y roule devant mon public. J’en ai la chair de poule à chaque fois. Le Supercross Paris, c’est le plus grand Supercross en dehors des États-Unis. C’est une épreuve iconique, à part entière dans la capitale la plus cool du monde ! Que ce soit à Bercy, même à Lille ou maintenant à La Défense Arena… Il y a de la magie dans l’air. Le Supercross de Paris fêtera son 40e anniversaire cette année et je suis content d’en faire partie. Des fans de toute la France et de toute l’Europe viennent à Paris pour ce Supercross, et pour voir les meilleurs pilotes des États-Unis et d’Europe. J’ai tellement de bons souvenirs au Supercross de Paris, et j’espère en créer d’autres !

Je ne sais pas combien de départs tu as pris dans ta carrière, mais le rush de stress est-il toujours le même après toutes ces années ?

C’est toujours un peu spécial, et je ne pense pas que ça disparaîtra un jour. Je pense que ce ne sera jamais quelque chose de banal que de prendre un départ, comme aller chercher un pain par exemple ! Les bruits du moteur, les vibrations de la moto, ton corps et ton esprit en pleine alerte avec l’adrénaline … C’est toujours un moment particulier. Bien sûr, avec l’âge, on apprend à mieux gérer ses nerfs. L’expérience te permet de relativiser les choses. Tu te dis que tu es déjà passé par là plein de fois, et que le stress que tu ressens ne t’a jamais empêché de donner le meilleur de moi-même, alors tout ira bien !

Interview: Tom Jacobs (adapté)

Grégory Aranda « Parfois, tu passes juste à côté d’un contrat qui aurait pu changer beaucoup de choses »
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