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Jack Chambers “Je ne connaissais aucun des pilotes du mondial MX2”


L’arrivée de l’Américain Jack Chambers sur le mondial MX2 était l’une des attractions de ce week-end en Suisse. Le garçon, qui évoluait encore sur le Supercross US il y a quelques semaines de cela, a traversé l’Atlantique pour finir la saison au sein de l’équipe de Steve Dixon – MTX Kawasaki – pour qui l’entraîneur de Jack – Zach Osborne – avait fait ses débuts en Europe en 2008. 21ème de la qualif’ du samedi en ayant rencontré un problème mécanique, le pilote Américain terminera 14ème et 12ème en manches et il ne lui manquait – déjà – pas grand chose pour aller chercher le top 10 pour sa première tentative en MX2 à Frauenfeld. 13ème du GP de Suisse, on est allé à la rencontre de Jack Chambers pour en apprendre un peu plus sur ce qui a motivé le garçon à tout quitter outre-Atlantique pour tenter l’aventure à l’Européenne. Micro.

Jack, la première chose que je veux te demander, c’est comment tu as décroché un contrat pour rouler sur le mondial MX2 alors que tu évoluais encore sur le SX US il y a deux semaines ?!

Mon entraîneur – Zach Osborne – est venu rouler en Europe en 2007 je crois, avec Steve Dixon, et il a vraiment fait de belles performances. Zach m’a envoyé un texto il y a peu de temps, un texto vraiment hyper court pour me présenter l’opportunité avec l’équipe MTX et je lui ai dit que j’étais intéressé. Il y a beaucoup de choses qui me sont chères aux USA, mon équipe – Rides Unlimited – mon programme là-bas, mon terrain, donc ce n’était pas une décision simple mais d’un autre côté, je savais que ça allait être une superbe expérience et que ça allait être une véritable leçon de vie. Je suis donc entré en contact avec Steve et avec Zach, on a tout mis en place, on s’est assuré que ça valait le coup pour moi de venir sur le mondial MX2, que j’allais avoir ce qu’il fallait, que j’allais avoir un bon cadre de vie, et me voilà en Suisse !

Après ce week-end, mes parents rentrent aux USA donc je vais vivre seul, dans un pays différent mais un pays dans lequel on parle anglais, c’est un plus [rires]. Je suis déjà venu dans le coin par le passé car j’ai roulé sur le MX Master Kids en France, donc on avait pris des vacances ici quand j’étais plus jeune mais ces derniers temps, je ne fais plus que du Supercross. Je me suis fait les croisés sur l’outdoor US l’an dernier, j’ai pris 6 mois de repos avant de reprendre directement l’entraînement en Supercross sans même faire de Motocross, et j’ai roulé six jours en Motocross avant de venir ici ce week-end. C’était un peu le rush pour moi, en plus, je n’avais jamais roulé sur une Kawasaki de toute ma vie.

Tu as roulé combien de temps sur la moto avant ce GP concrètement ?

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Une heure. J’ai roulé en Angleterre sur cette moto en arrivant. J’avais testé une 250 KX-F qu’on m’avait prêté quand j’étais encore à la maison, pendant 30 minutes, et je me suis senti à l’aise et bien équilibré sur cette moto et je me suis dit que c’était une bonne option pour moi. Les résultats sur le papier ne reflètent pas vraiment ce que je peux faire je pense, même si je suis content de ce premier jet, j’ai bien roulé en seconde manche, bien mieux qu’en première manche. Il y avait moins d’écart qui me séparait des tops pilotes, j’avais des temps chronos plus proches mais comme je l’ai dit plus tôt, j’étais à fond dans le Supercross dernièrement et j’étais concentré pendant l’entraînement à m’améliorer dans les enchaînements, dans mon timing et là tout est différent. Il faut que je roule à fond, et que je trouve à quel rythme je dois rouler pour tenir pendant des manches de 30 minutes.

Est-ce tu savais à quoi t’attendre en arrivant ici ? Tu suis le mondial, tu connais tous ces mecs ?

Je ne savais pas du tout à quoi m’attendre, très franchement. Je ne regarde pas le mondial car d’habitude le dimanche, je rentre d’un Supercross où d’une épreuve de l’outdoor et je n’ai jamais trop eu l’occasion de regarder. J’ai dû voir des courses ici et là mais pour te dire, je ne suivais même pas la page MXGP sur les réseaux sociaux jusqu’à la semaine dernière. En fait, c’était une bonne chose de ne même pas connaître les gars que j’allais affronter, c’était plus simple de m’aligner sur la grille de départ sans savoir qui était présent face à moi, sans avoir à regarder les noms des autres pilotes; je ne connaissais aucun des pilotes du mondial MX2.

Aux USA, dans le top 20, on ne retrouve que des pilotes qui ont gagné des titres chez les amateurs à Loretta Lynn’s et moi, je n’en ai jamais gagné même si j’ai signé des bons résultats. Du coup, je me retrouvais derrière une grille avec des mecs qui m’avaient battu à chaque fois chez les amateurs et c’est toujours difficile d’être confiant et de te dire que tu peux finir devant eux cette fois-ci et ça, avant même que la manche ne débute. Ici, et même s’il y avait 11 mecs devant moi en seconde manche, j’ai pu me mettre en confiance, trouver mon rythme, apprendre de la catégorie, de la nouvelle moto, dans des ornières monstres, ce que je n’avais plus rencontré depuis un bail.

J’imagine que Frauenfeld, c’est plutôt … différent des terrains de l’outdoor US.

Beaucoup de gens m’ont envoyé des messages en me disant que ce n’était probablement pas le meilleur des terrains pour faire mes débuts, mais si je peux commencer sur l’unsdes terrains les plus pourris, c’est encore mieux pour me permettre de m’améliorer. Je pense que ça va le faire. Zach Osborne essaye toujours de me mettre dans les plus mauvaises conditions pour me tester, voir comment je performe, comment je m’adapte. Ce samedi, c’était mon troisième jour sur la Kawasaki et je pense que je me suis plutôt bien adapté. Je roule avec le 12 désormais, aux USA, je roule avec le 192 mais mon numéro de base c’est le 102 car c’est le numéro avec lequel mon père roulait. J’ai pris le numéro le plus bas disponible, je suis en haut de la liste des engagés chaque week-end désormais. Les gens vont voir mon nom, ils vont savoir que j’arrive ! [rires]. Il va falloir se construire, s’améliorer, devenir plus fort. Je vais pouvoir voyager à travers le monde tout en faisant de la moto et ça, c’est plutôt cool.

Etant donné que tu es le seul pilote Américain sur le mondial cette saison, beaucoup de gens de ce côté-ci, mais également de l’autre côté de l’Atlantique vont suivre tes performances. Ça te met de la pression supplémentaire ?

C’est sur que les gars contre qui je roule aux USA vont regarder ce que je fais, vont comparer les résultats qu’ils ont faits contre moi. Honnêtement, je pense que j’ai plutôt bien performé ce week-end, plus que ces derniers temps aux USA. Ceci étant dit, je sais que je peux en faire beaucoup plus. Si aujourd’hui, j’affiche ce niveau et j’ai cette base, que c’est le pire week-end que je peux faire compte tenu des circonstances, je pense que je vais pouvoir faire une belle saison par la suite.

Vu ce que tu as montré ce week-end, tu pourrais rapidement être capable de jouer le top 10 de grands prix, tu n’étais pas bien loin en Suisse.

J’étais 8 secondes derrière le 10ème en fin de seconde manche, et je me suis battu avec des mecs qui roulent dans les 10/15 pendant tout le week-end. En fin de manche, j’ai vu que j’avais encore de l’énergie, j’ai l’endurance pour ces courses grâce à Zach et à son programme. Je suis content, pas vraiment avec les résultats sur le papier mais c’est plutôt un bon début pour moi pour une première épreuve en Europe. Zach est content également.

Tu as été bien accueilli dans les paddocks des grands prix ?

Oui, très bien accueilli. Je me suis déjà fait des amis. Ça me faisait un peu peur pour être franc car mes parents n’étaient pas certains de pouvoir venir ici pour la première épreuve, on parlait de m’envoyer seul à l’aventure pour voir comment je m’en sortais mais finalement, ils m’aiment bien trop pour me faire ça [rires]. Mon père nettoyait mon casque entre les séances, s’occupait de mes bottes, je suis gâté car on fait beaucoup pour moi alors que je débarque des USA. Par la suite, je vais vivre ici tout seul. À la maison, je vis chez mes parents, c’est encore ma mère qui me fait à manger, qui me prépare mes affaires pour la journée. J’ai 20 ans et à cet âge, on va au lycée au général alors que moi, je débarque pour une aventure nouvelle en Europe.

Il y a toujours ce débat, à savoir quel est le championnat de Motocross le plus relevé de la planète, l’outdoor ou le MXGP ? Tu as eu un avant-goût ce week-end de ce qu’étais le MX2. Relevé, le niveau du mondial ?

C’est clair. Là où ça change, c’est qu’aux USA on a beaucoup plus de pilotes qui se battent dans le fond du paquet, après la 30ème place. On a souvent 80 mecs qui tentent de se qualifier pour l’outdoor. Ici, on était quoi, 36 ? Tous les mecs qui se sont engagés ont roulé alors que chez nous, il faut se qualifier. Le niveau en fond de paquet ici est selon moi moins relevé qu’aux USA pour les mêmes positions. Certains de ces gars n’ont pas le programme, le temps et les moyens que certains peuvent avoir aux USA pour performer. C’est assez difficile de comparer les deux championnats. Rien qu’aux USA, je connais énormément de pilotes, je sais ce qu’ils ont fait, je connais leurs résultats. Ici, je ne connais personne. Un pilote peut très bien terminer 20ème d’une manche et être en fait un vainqueur de grand prix qui n’était pas dans un bon jour, et je n’en saurais rien. En fin de saison, on verra. Ce qui est dingue, c’est que j’ai regardé le classement du championnat après ce week-end et je suis déjà 18ème du mondial MX2 alors que je n’ai fait qu’une épreuve sur trois. Hey, peut-être que je peux finir dans le top 10 du championnat d’ici la fin de la saison !

Evidemment, tu vivais de la moto aux USA, tu peux relativement bien gagner ta vie chez toi rien qu’avec tes résultats. Ici, c’est différent car comme tu le sais, le promoteur ne reverse pas de primes aux pilotes. C’est quelque chose que tu as pris en compte avant de venir ici ?

On est plutôt bien avec quelques sponsors qui ont rejoint l’aventure. Pour moi, ce sera plutôt kif-kif. Aux USA, mon team ne me payait pas pour rouler, ils m’aidaient bien mais je devais payer pour faire apporter ma moto sur les épreuves. Il y a bien plus de pilotes privés aux USA car ces mecs touchent les primes de résultats, ils voient l’argent arriver sur leur compte en banque à chaque épreuve et se disent “Hey, je peux participer à la prochaine maintenant”. C’est un peu difficile de se dire que je sors de ce format avec les primes mais en fin de mois, j’aurais mon salaire. Aux USA, après chaque Supercross, mon compte en banque se remplit un peu chaque week-end alors qu’ici, ce sera plutôt l’inverse car je vais devoir payer mes courses et d’autres trucs, même si le team prendra en charge beaucoup de choses. Les gens m’ont demandé pourquoi j’allais en Europe, me disant que je n’allais pas me faire d’argent en MXGP. Je vais me faire assez d’argent pour que le bilan soit positif en fin d’année et franchement, je n’ai que 20 ans et jusqu’ici, je vivais avec mes parents donc je ne suis pas vraiment dans une position où j’ai besoin de me faire beaucoup d’argent pour l’heure. D’ici quelques années, ce sera différent mais j’aurais plus d’expérience et de fait, je serais en mesure de mieux gagner ma vie. L’expérience que je vais engranger ici me permettra d’être un meilleur pilote le jour ou je retournerais aux USA.

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