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Jessy Nelson “J’avais trouvé ma voie, j’avais tracé ma carrière”

“Arrivé à l’hôpital, je passe les scanners, ma colonne n’était pas déplacée, elle était juste fracturée, alors je me suis dit que ça allait s’arranger.”

C’est à l’âge de 17 ans que Jessy Nelson est devenu pilote professionnel, en 2012, avec l’équipe Troy Lee Designs Lucas Oil Honda avant de faire son ascension vers les sommets de la catégorie 250.

C’est dans l’Indiana, en août 2014, que Jessy Nelson signe son tout premier podium d’épreuve (3eme). Il remporte sa première finale de Supercross lors de l’ouverture de la saison suivante,  à Anaheim 1 en 2015.

Au total, Jessy Nelson est monté 8 fois sur le podium d’une compétition AMA avant d’être coupé dans son élan. Durant la saison de motocross en 2016, le pilote Californien a subi une blessure qui mettra fin à sa carrière et qui le laissera en chaise roulante alors qu’il n’a que 21 ans.

Retour sur la dernière saison de Jessy Nelson.

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Jessy Nelson

“En 2016, je fais une bonne intersaison et je commence à travailler avec Tyla Rattray, tout se passait très bien. C’était un entraînement bien différent de ce que je connaissais, c’était bien plus structuré. Je me réveillais à 5h30 du matin pour faire mes étirements, puis 45 minutes de cardio avant de faire de nouveau des étirements, puis de prendre mon petit-déjeuner, tout ça …

En Supercross, je me sentais bien. Sur le terrain d’entraînement, je me pointais et je roulais aussi vite que les pilotes 450. Je signe le holeshot à Anaheim 1, Cooper Webb est derrière moi, il me met la pression et moi, je roulais tendu. J’ai fait une erreur, il m’a doublé et j’ai décidé de me contenter de la seconde position.

Le mardi suivant, au terrain d’essai, je fais mes tours. Dans les whoops, ma roue arrière loupe l’avant-dernier whoops et je m’écrase dans le virage suivant. Sous l’impact, mon casque s’est ouvert en deux au niveau de la face, j’étais en sang. Cette chute m’a secouée. J’étais inconscient pendant 5 minutes, quand je suis revenu à moi, j’étais sur la civière et je me demandais ce qu’il s’était passé. Les gars autour de moi ont vraiment cru que je venais de me tuer.

Tyler Keefe [le team manager de l’équipe Troy Lee KTM] voulait vraiment que je prenne mon temps après cette chute avant de revenir. On a fait beaucoup de scanners, vu beaucoup de médecins, passé beaucoup de tests.

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L’équipe voulait me faire passer un dernier examen, mais mon assurance ne voulait plus les prendre en charge. On était à deux semaines de l’ouverture de l’outdoor à Hangtown et je n’avais rien fait depuis Anaheim 1. Je n’avais plus de symptômes mais Tyler Keefe ne voulait pas me voir rouler. Mon assurance ne voulait plus me couvrir car tous mes résultats étaient bons, « vous allez bien » qu’ils me disaient.  Red Bull a payé pour ma dernière visite chez le médecin avant de reprendre la compétition, 5.000$.

Même après ça, Tyler Keefe m’a fait attendre une nouvelle semaine. Je me pointe à Hangtown avec à peine deux semaines de roulage et je devais rattraper mon retard d’entraînement pendant la saison. Première manche, je signe le holeshot, je mène pendant 15 minutes avant que je ne m’effondre et ne termine 5ème.

À Glen Helen pour la seconde épreuve, je tombe 3 fois dans la première manche avant de décrocher le podium dans la seconde manche.

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J’ai oublié ce qu’il s’est passé dans ma première manche au Colorado, je suis tombé je crois. En seconde manche, avec Osborne, on remonte dans le paquet. Dans un virage à droite, je perds l’avant, et alors que je vais pour relever ma moto, j’entends une moto arriver plein gaz, Zach Osborne. Il relâche l’embrayage et me balaye la jambe, il me défonce le ménisque et la cheville au passage. Sa roue a touché ma botte et je me suis complètement tordu le genou et la cheville. Je ne vais pas dire qu’il l’a fait exprès, mais je connais au moins 3 autres pilotes à qui il a déjà fait le coup.

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Après le Colorado, je ne roule plus jusqu’à Washougal. Je reprends la moto 2 jours avant Washougal. Je tombe deux fois dans la première manche et termine 12ème. En seconde manche, je prends un bon départ et je termine 3ème. J’avais confiance en moi, je n’avais juste pas eu le temps de bien me préparer.

Arrive Unadilla, et c’est là que je me suis fracturé la colonne vertébrale. Le circuit était étrange, je n’étais pas à l’aise dessus, je ne me sentais pas dedans, j’avais des bandes qui me tenaient la cheville et le genou pour qu’ils soient stables.

Quand les gens voient un gars en chaise roulante, ils lui demandent « Qu’est-ce qu’il t’est arrivé ? Ton parachute ne s’est pas ouvert ? » où un truc comme ça alors qu’en fait, le mec a simplement glissé sur une plaque de verglas en sortant de chez lui en allant au travail. Moi, j’ai perdu l’arrière dans le virage, et avec mon guidon, j’ai percuté le piquet jaune qui délimite le circuit . D’habitude, ils se plient avant de reprendre leur position mais celui-là, c’était comme un mur et j’ai été éjecté de ma moto. Durant le weekend, RJ Hampshire est tombé dans un virage sur un de ces piquets et le piquet n’a pas bougé, il lui a complètement ouvert la main.

Je tombe, ma moto me percute, je n’ai rien eu le temps de voir venir. J’étais concentré sur mon virage, je n’ai même pas vu ce piquet. J’essaye de me relever, je n’avais pas mal, je pensais que j’allais bien. Je ne sentais plus trop mon torse, mon ventre, « putain il se passe quoi ? » j’avais l’impression d’avoir été coupé en deux. Je ne sentais plus rien, j’ai essayé de toucher mes jambes, je ne savais pas quoi faire, je paniquais, c’était l’horreur. Je n’y croyais pas, ce n’était pas possible, je n’avais même pas chuté lourdement.

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J’avais entendu des histoires, celle de Tickle qui avait perdu les sensations dans les jambes pendant une nuit, celle de Craig, de Ferry, je pensais que ça allait être pareil pour moi car je n’étais pas tombé si fort que ça. J’étais paniqué, mais dans ma tête, j’étais quand même confiant car je savais que c’était une petite chute. Arrivé à l’hôpital, je passe les scanners, ma colonne n’était pas déplacée, elle était juste fracturée, alors je me suis dit que ça allait s’arranger.

48 heures passent, 3 jours, puis j’ai commencé à me dire que c’était foutu pour moi.

Aucune blessure à la colonne vertébrale n’est identique, tu peux parler avec 3 blessés, rien ne sera similaire. J’ai rencontré un gars pas si longtemps que ça qui avait la même blessure que moi et qui me disait « je ne peux pas faire ça, ça et ça » et moi je pouvais faire tout ça. Et il me dit « Et ça, tu peux faire ? » et il s’est levé de sa chaise roulante et il s’est tenu debout devant moi. Ça n’avait aucun sens. Une copine d’une connaissance chez Troy Lee Designs a été en chaise roulante pendant 3 ans avant, un beau jour, de pouvoir bouger les jambes.

Je voulais me remettre, botter le cul à cette paralysie, j’ai été voir le chirurgien et je lui ai demandé ce que je pouvais faire pour repousser les limites, pour progresser dans ma vie, car je ne voulais pas abandonner, je ne voulais pas que les espoirs s’envolent pour moi. « Dites-moi ce que je dois faire, de la rééducation ? Est-ce que je dois aller dans un autre établissement voir de nouveaux experts au lieu de rester ici ? Dites-moi ».

Ce à quoi il m’a répondu « Pour l’instant, habitue-toi à être en chaise roulante ». Ça voulait dire quoi, qu’il n’y avait pas d’espoirs ?

« Habitue-toi à ta chaise roulante » Ça m’a tué.

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Quelques-temps après, j’ai appris qu’il était allé beaucoup trop loin lors de mon opération, que je n’aurais pas dû avoir tout ce matériel dans le dos. Ma blessure n’était pas si « grave ». Quand je suis rentré chez moi et que j’ai vu mon médecin, il m’a avoué qu’il ne comprenait pas pourquoi je ne récupérais pas du tout un minimum de ma blessure. Je ne sais pas si le chirurgien n’a pas commis une erreur lors de l’opération, on ne peut rien écarter, c’est vraiment fragile, une colonne vertébrale.

Je devais avoir 2 tiges, 2 vis, et me faire fusionner 2 vertèbres. Il m’a mis 12 vis et m’a fusionné de la T1 à la T7.

Un an plus tard, je suis repassé sur le billard pour enlever le matériel qu’ils avaient posé car j’avais mal, le matériel médical se coinçait au niveau de mes côtes quand je me penchais. Quand mon chirurgien m’a ouvert le dos, il a pu retirer les deux vis du haut et les deux vis du bas à la main, sans outil…

J’avais trouvé ma voie, j’avais tracé ma carrière, je pouvais prétendre aux podiums et si je ne me blessais pas, je pouvais prétendre aux victoires et aux titres. Si je ne gagnais pas de titre ? J’aurais gagné un paquet de manches et je me serais simplement dit « Merde, j’ai loupé le titre »

Ça aurait pu, et ça aurait dû se passer comme ça …”

Jessy Nelson – Budds Creek – 2012

Via: Whiskey Throttle Show – Jessy Nelson

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