Interviews

Jett Lawrence « dans ma situation, je n’ai plus de joker à utiliser »

Images: FELD

Après sa déconvenue d’Anaheim 1, Jett Lawrence remet le pied à l’étrier. Second à San Diego, vainqueur à Anaheim 1, le champion de Supercross 450 en titre est déjà de retour dans le top 3 du championnat. La concurrence n’a pas réellement su profiter des déboires de Jett lors de l’ouverture de la saison, et le garçon n’est plus qu’à 5 points de la plaque rouge. Une plaque rouge qui sera détenue par Ken Roczen à Glendale ce week-end. Une première depuis 3 ans pour l’Allemand, une première depuis 10 ans pour Suzuki. Micro avec l’Australien avant la première épreuve Triple Crown de la saison.

Jett. Tu t’es bien battu avec Jason Anderson à Anaheim 2, et tu as eu le dessus. C’était comment ?

Je me suis retrouvé derrière Jason aussi bien dans ma manche qualificative que dans la finale, ce qui m’a permis d’apprendre de ses trajectoires. Évidemment, la finale était complètement différente de la manche qualificative. On attaquait fort lors de la manche qualificative parce qu’on avait de l’adhérence, mais une fois en finale après la pluie, je me suis dit qu’il fallait que j’assure le coup, mes trajectoires, et qu’il ne fallait pas tout gâcher. Ça aurait été vraiment une mauvaise opération que de ne pas finir sur le podium à cause d’une chute. Je suis resté derrière Jason vraiment longtemps. Au bout d’un moment, je ne voyais plus de solutions ni de trajectoires alors je me suis dit qu’il fallait juste que je débranche dans les whoops. On s’est fait une frayeur en même temps dans la série de whoops, mais j’ai réussi à le doubler et à bien prendre la série suivante. Je suis content, je rebondis bien après Anaheim 1 et c’est une bonne chose à prendre. J’essaie juste de réduire l’écart aux points petit à petit. Pour l’instant, heureusement, je suis sur la bonne voie.

Tu étais le seul à sauter par-dessus la table dans le premier enchaînement. Pourquoi ?

Je n’aimais pas trop finir l’enchaînement par le triple, car je montais trop haut et je sautais trop loin, trop facilement. Après la manche qualificative, je me suis dit que s’il ne pleuvait pas, je pouvais tenter de faire la même chose et finir par un quadruple. Je savais que ça pouvait passer vu que j’avais plusieurs fois sauté trop loin sur le triple. Mais avec la pluie, j’ai préféré jouer la carte de la sécurité. Je me suis un peu tâté pendant quelques tours et j’ai gardé cette trace pour faire over-3-1, mais ça ne me faisait pas vraiment gagner du temps sur Jason, alors j’ai décidé de faire comme tout le monde, en essayant de mieux passer le triple au bout de l’enchaînement. Je faisais surtout en sorte de ne pas me monter en l’air sur l’enchaînement.

Il y a eu un drama la semaine dernière avec la famille Lawrence, et peut-être que ce week-end, au moment où tu en avais le plus besoin, tu as réussi à t’imposer. As-tu appris quelque chose en tant que personne et athlète, ainsi que sur les personnes qui t’entourent, au cours de ces dernières semaines ?

Honnêtement, ces dernières semaines, je me suis simplement concentré sur moi-même et sur la moto. Retourner en Floride et faire un reset, ça m’a fait du bien : revoir mon chien, mes deux lézards, mes amis et ma famille quoi [rires]. Je ne suis pas un grand fan de la Californie, devoir passer une journée entière à faire l’aller-retour en bagnole juste pour aller s’entraîner, ce n’est pas pour moi… C’était bien de pouvoir faire un petit break. Je n’ai roulé qu’une fois, mais juste le fait d’être chez moi m’a aidé à me recentrer. Je dois me concentrer sur le championnat, je n’ai pas le temps de me préoccuper des dramas de la semaine.

J’ai une très bonne agence – Wasserman – et mes managers Jacob Hayes et Travis Clark s’occupent de tout ça pour moi. Moi, je suis payé pour rouler, donc j’essaie de faire ça du mieux possible. Je n’ai pas besoin de distractions extérieures. Je me focalise sur la moto, sur moi-même, et je garde la tête dans le guidon. Ce soir, j’ai pu gagner une finale à nouveau, et ça fait du bien d’être de retour dans une bonne dynamique.

Tu as pensé quoi des whoops dernièrement ? Il y avait deux séries, préparées différemment.

Moi, j’aime quand les whoops sont plus techniques. Beaucoup d’entre nous, les meilleurs pilotes, s’entraînent dur dans les whoops pour progresser, car c’est une portion de la piste dans laquelle on peut gagner comme perdre beaucoup de temps. Le truc avec les 9 whoops, c’est que si tu n’es pas un bon dribbleur, tu peux juste les sauter trois par trois et t’en sortir. Ce n’est pas très juste selon moi, parce que les pilotes qui travaillent dur pour mieux dribbler et adapter leur moto en conséquence sont pénalisés au bout du compte. Dribbler, c’est très technique, tu dois toucher une toute petite partie de chaque whoops.

Avoir plus de whoops et des whoops plus difficiles, c’est bon pour le sport. Des pilotes comme Kenny, Jason, Eli, Chase et moi, on a un petit avantage dans les whoops, mais c’est parce qu’on a passé beaucoup de temps dedans pour être bons. Même si aujourd’hui, j’ai eu du mal et que je suis parti en travers plusieurs fois dedans, des whoops difficiles rendent les courses plus intéressantes. Donc oui, j’aime bien quand les whoops sont techniques, et que je galère dedans.

Ça ne s’est pas passé comme prévu pour toi à Anaheim 1, et tu t’es bien battu avec Eli à San Diego. Tu étais un peu inquiet après A1, où tu savais que tu allais rapidement retrouver ton niveau ?

Non, je n’étais pas inquiet, honnêtement. La galère du premier round, elle est en partie due à un problème avec la moto, et aussi à une erreur de ma part. Si je n’avais pas commis cette deuxième erreur en chutant en début de finale, compte tenu que j’étais devant Eli à ce moment-là, j’aurais pu finir quatrième ou cinquième, et personne ne parlerait de l’épreuve d’Anaheim 1 aujourd’hui. Là, je roule bien et je me sens plutôt bien sur la moto. Il faut juste trouver certaines petites choses pour m’aider davantage. Je suis humain, je fais des erreurs, je ne peux pas être parfait à chaque fois, même si j’essaie. Parfois, on fait des erreurs stupides, involontaires.

Avoir une moto bien réglée permet d’en éviter quelques-unes, et ce n’était pas le cas lors de la première épreuve. Mais on a toujours cherché à s’améliorer, que ce soit la moto, ou moi-même. Je ne mets pas tout sur le dos de la moto, je sais aussi voir quand c’est à moi de m’améliorer. Par exemple, ma deuxième chute à Anaheim 1 n’avait rien à voir avec la moto; c’était une erreur de ma part, et ce genre d’erreur me motive encore plus. Dans ma situation, je n’ai plus de joker à utiliser, donc je dois rester concentré et performer à chaque épreuve.

C’était fun de te voir te battre avec Jason comme ça. On sait qu’il y a eu des frictions entre vous deux par le passé. Est-ce que tu fais preuve de plus de prudence quand tu dois dépasser Jason, pour éviter la moindre contre-attaque de sa part ?

Il était surtout question de trouver le bon endroit pour dépasser sans aller au contact. L’idée, ce n’est pas d’aller au contact à chaque dépassement. Comme on en parlait le week-end dernier: avec Eli, on a fait une très belle course à San Diego, très propre. Ce samedi en finale, on était vraiment proches avec Chase sur la piste, mais on ne s’est jamais touchés. C’est ce genre de course que j’aime, quand c’est fun, propre, serré ! Jason est vraiment bon quand il faut défendre sa place, il reste bas dans les virages relevés, ce qui m’empêche de tenter quoi que ce soit. C’est encore et toujours de l’apprentissage pour moi.

Moi, j’essayais surtout de trouver le bon rythme et les trajectoires les plus sûres sur l’ensemble de la piste, parce que ça glissait vraiment et qu’on ne pouvait pas trop attaquer au risque de finir au sol. Il fallait être intelligent. J’ai finalement pu me rapprocher de Jason dans les whoops et j’ai juste débranché, il fallait tenter quelque chose pour le dépasser. Ces whoops … Ils étaient vraiment chauds, très glissants et piégeux. En fait, il fallait faire preuve de patience. J’ai voulu éviter d’en faire trop, d’attaquer trop fort, pour éviter de partir à la faute.

Jett Lawrence « dans ma situation, je n’ai plus de joker à utiliser »
Retour