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Saad Soulimani « Il faut vraiment sortir du lot pour réussir à décrocher un guidon en mondial »

Images: DailyMotocross

Le quatrième mandat de Saad Soulimani sur le championnat d’Europe 250 aura été le plus concluant. Pilote Ghidinelli Yamaha cette saison, le Franco-Marocain a décroché la cinquième place finale du championnat et tourne désormais son attention sur le championnat du monde MX2, qu’il disputera avec le team DVS Junior Racing TM l’an prochain. Soutenu par TM France, Saad sera également engagé sur l’Elite MX2, et le SX Tour en 2025. Un programme XXL, et une préparation largement anticipée: Saad a en effet participé aux dernières épreuves du championnat de France de Supercross pour découvrir la discipline et se mettre en jambes. Micro.

Saad, pour commencer, un mot sur ta saison 2024. Tu termines 5ème de l’Europe 250 cette année. Une belle saison 2024 pour toi, finalement.

Oui, finalement ! C’était un peu une surprise pour moi parce que pour 2024, je n’avais pas eu grand-chose, pas énormément de propositions. Ghidinelli, c’était la seule offre concrète que j’ai eue. Et puis, tout s’était surtout un peu fait au dernier moment, donc j’ai filé, et j’ai saisi ma chance comme je devais le faire.

On a énormément bossé. Et finalement, on arrive à décrocher une belle cinquième place au championnat. Donc, ça fait plaisir. C’était l’objectif. C’était une porte de sortie, on va dire, pour arriver sur le mondial. Maintenant, c’est fait, et l’objectif est de continuer en championnat du monde.

Tu as roulé en 250 2T cette année. Certains disent que tu as des avantages sur cette moto. J’imagine que s’il y en a, il y a aussi des inconvénients ?

La 250 YZ 2 temps, c’est une bonne moto. Au niveau des inconvénients, surtout sur toutes les parties un peu glissantes, les terrains un peu durs, béton. C’est une moto qui n’a pas de frein moteur, qui est un peu difficile à gérer au niveau de la puissance. Donc sur tous ces circuits-là, j’étais un peu désavantagé on va dire.

Côté avantages, on va dire que c’est un plus au départ, et aussi sur toutes les pilotes un peu sablonneuses comme Lommel; tu es bien avec un 2 temps dans ces conditions. J’ai signé ma meilleure course à Lommel, c’est là que j’ai été le plus rapide. J’ai réussi à prendre la tête d’une manche. J’ai montré de belles choses au guidon de la 250 YZ, mais ce n’était pas toujours facile.

Si le deux temps avait vraiment été un avantage, beaucoup de pilotes auraient roulé en deux temps. J’étais quasiment le seul dessus, dans le top 15. Ce n’est pas une moto facile à piloter non plus.

Est-ce qu’il y avait moyen de continuer en 2025 avec le team Ghidinelli ? Visiblement, ça a bien fonctionné cette association, on aurait pu penser que ça aurait pu déboucher sur quelque chose pour la suite.

On voulait, sauf qu’on a pu le voir, Ghidinelli est un team qui fait l’Europe. Donc, ils n’avaient pas forcément le budget pour me faire rouler en championnat du monde. Ils avaient aussi des plans pour rester en Europe pour 2025.

Malheureusement, nos chemins ont dû prendre des directions différentes. Ça me rend un peu triste, parce que je n’ai pas la chance de continuer au sein des teams où je signe la plupart du temps, parce que nos plans finissent par être différents.

Mais bon, ça me  fait apprendre, découvrir de nouvelles choses. Dommage qu’on ait dû se séparer, parce qu’il y avait vraiment une bonne entente au sein du team; on a passé de super moments ensemble.

Finir 5e de l’Europe 250, est-ce que ça ouvre des portes, finalement ?

Franchement, je pensais que ça en ouvrirait, que ça allait me faciliter la tâche et débloquer un peu ma situation. Finalement, non. Ça a été compliqué parce que les places sont chères en mondial. Il faut vraiment sortir du lot pour réussir à décrocher un guidon en mondial

Après, il y avait aussi un côté objectif personnel, objectif que je m’étais fixé depuis toujours. Je voulais rouler devant sur l’Europe, montrer de quoi j’étais capable après plusieurs années difficiles à jongler entre les teams. Au moins, ça, c’est fait. Ça a été une satisfaction personnelle pour moi, pour ma famille, pour mes proches. Donc, c’était super cool parce que j’ai été là chercher avec la manière, cette 5ème place.

On va dire que ça t’aide quand même un peu, parce que tu montres que tu suis le bon wagon, mais ce wagon est dur à tenir, et c’est plus facile de le lâcher que de le tenir. Moi, je le tiens encore. Je pense que je suis encore dans le wagon. Ça m’a quand même débloqué quelques possibilités pour 2025. De là, il fallait choisir la bonne, et s’assurer de continuer d’être dans le bon wagon.

Est-ce qu’on peut parler un peu de ta collaboration avec Didier Villemin ? Quels sont les axes de travail avec lui ?

Je n’ai jamais été coaché par qui que ce soit. C’est mon père qui m’a toujours entraîné. Mon père connaît bien Didier Vuillemin car à l’époque où il roulait, c’était bien la seule personne qui l’avait coachée.

Du coup, je me suis toujours bien entendu avec lui, et vu que je voulais faire mes débuts en Supercross – car la discipline m’avait toujours tenté – je me suis tourné vers Didier car je n’avais jamais eu l’occasion d’en faire. On a discuté, et il m’a fait rouler quelques jours en SX pour voir ce que ça donnait.

Finalement, on a décidé de bosser ensemble parce qu’il a vu que j’avais envie, et j’ai vu qu’il avait envie aussi. Didier va me gérer un peu. Je suis super content parce que c’est un honneur pour moi d’avoir cette personne – que j’admire beaucoup – à mes côtés. Je pense que ça va m’aider pour l’avenir, que ce soit en Motocross ou en Supercross.

Supercross de Paris, supercross de Lyon, supercross de Grenoble. Tu te lances un peu dans la discipline. Comment ça se passe finalement ?

C’est dur. C’est vraiment dur, parce que c’est quelque chose que je n’avais jamais fait. Même par le passé, je n’ai jamais fait de SX à l’entraînement. Donc, je découvre vraiment, et on sait que si tu n’as pas bouffé du Supercross, ça ne vient pas instinctivement comme le Motocross; j’en chie.

J’en chie mais je me régale, et je me fais plaisir. Je ne me mets pas dans le rouge, je suis là pour apprendre. Tu n’as pas le droit à l’erreur en Supercross. L’objectif, c’était de finir les trois courses du championnat et pour l’instant, ça va bien. J’ai fini toutes les manches, je ne me suis pas fait mal, j’ai montré quelques belles choses.

Je suis en train d’apprendre à chaque fois que je mets les roues sur la piste. Franchement, j’aime beaucoup. Si ça peut m’ouvrir d’autres portes, le Supercross, je ne dirais pas non.

Et après, ça aide toujours pour le Motocross. Je pense que ça rentre dans mon programme pour l’avenir, le Supercross. J’aime beaucoup cette nouvelle discipline.

Donc il y a quand même une logique de continuité ?

Oui, c’est sûr qu’on fait ça dans un but précis, et c’est de commencer le Supercross pour de vrai l’année prochaine. Que ce soit en SX Tour ou en WSX, qui sait ?

En tout cas, le but pour l’instant, c’est le SX Tour. Il fallait commencer quelque part, et c’est ce qu’on a fait. Maintenant, on sait sur quoi bosser car on a vu comment ça se passait.

J’ai pu prendre mes premières marques. Mais tout ça, c’est pour préparer le SX Tour bien comme il faut pour l’année prochaine.

Finalement, les sauts, les virages … Ok. Mais les whoops, ça doit être aussi un axe de travail sur lequel tu dois mettre l’accent aujourd’hui.

Les whoops, c’est chaud [rires]. Je savais que c’était dur, mais je n’imaginais pas à ce point. J’ai dû énormément bosser avec Didier pour essayer de rattraper le temps perdu dans les whoops. Franchement … c’est chaud. Tu dois vraiment être en contrôle de ce que tu fais à l’entrée de la série des whoops, et tu n’as pas le droit à l’erreur. C’est cool parce qu’en plus, en championnats de France, on a des belles séries de whoops.

On voit que je ne suis pas le seul à galérer. Il y en a beaucoup qui galèrent, beaucoup de chutes. Ça nous fait apprendre. Les whoops, ça va être un point clé pour l’année prochaine. Il faut bosser sur ça, mais ce n’est pas facile.

Tu intègres le Team DVS Junior Racing TM pour la saison 2025. Comment ça s’est fait, et qu’est-ce qui t’a séduit dans ce projet ?

J’ai commencé par discuter avec TM France. Pour l’année prochaine, on a trouvé un bon deal avec TM France, que ce soit pour l’élite et le SX Tour. Ça, c’était déjà pré-bouclé depuis le Supercross de Paris. C’est super cool, je suis super content de rouler avec les motos, j’aime beaucoup. Après ma cinquième place à l’Europe cette année, mon but était de continuer en mondial. On a essayé de trouver des solutions, que ce soit avec l’usine et avec ce Team TM en Belgique.

Le team m’avait déjà repéré durant l’année, sans même savoir que j’allais rouler avec TM France; ils m’avaient déjà démarché. Sauf que je n’étais pas intéressé à l’époque, parce que je n’avais pas pu tester la TM; je ne savais pas ce que ça valait. Après avoir testé la TM de TM France, on a pu faire un deal pour que je puisse continuer à viser mes objectifs en mondial.

On a réussi à trouver un bon deal. C’est super cool. Je ne pensais pas faire autant de Grand Prix, mais on part quand même sur une belle saison avec eux. Je vais faire un peu plus de 15 Grand Prix, donc c’est énorme. Je suis vraiment super content. C’était ce que je voulais depuis le départ, continuer en mondial, plus le SX Tour, plus l’Elite, donc ça me fait vraiment la saison que je voulais.

Ce n’est pas un secret, je pense que la TM n’est pas connue comme étant la moto la plus compétitive du plateau. Comment te sens-tu dessus, et sur quoi on va bosser pour préparer 2025 ?

La TM est très sous-cotée, donc il faut la tester avant de parler. Moi, je n’avais pas forcément d’a priori dessus. J’ai simplement testé, j’ai bien aimé la moto, surtout au niveau de la maniabilité. Après, on a encore beaucoup de développement à faire sur la moto pour qu’elle soit performante.

Mais déjà, avec le peu d’heures qu’on a faites, on a une bonne moto pour le moment, je suis content. Les 2025 marchent bien, que ce soit au niveau de la maniabilité ou de la fiabilité. Je pense que la moto ne va pas tarder à rentrer dans le classement avec les autres motos, parce qu’il y a le potentiel pour.

On s’est fixé quels objectifs sur le mondial MX2 l’an prochain ?

Ce sera une première saison en mondial pour moi, donc mon but, ça va être de me rapprocher au maximum des pilotes satellites. L’objectif, ça va être de batailler avec eux, et puis de progresser tout au long de la saison. Je vais peut-être être un peu moins bien lors des premières épreuves, mais ça fait vraiment beaucoup de courses à mon calendrier l’an prochain et le but, c’est vraiment de monter en puissance et d’essayer d’aller se rapprocher le plus du top 10 et des pilotes factory au fur et à mesure de la saison.

Saad Soulimani « Il faut vraiment sortir du lot pour réussir à décrocher un guidon en mondial »
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