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Bihr, le géant de la distribution Made In France

Images: Bihr

Vous connaissez le nom, vous avez déjà navigué sur le site internet. Dans le monde du deux-roues, Bihr est un incontournable et bien que ce statut soit acté auprès du grand public, que connaît-on réellement de l’entreprise Française ? Pour tenter de répondre à cette question, on a pris la direction de Bartenheim, en Alsace, pour en apprendre un peu plus sur le géant de la distribution et leader du marché Européen de la pièce et de l’équipement, qui fêtera ses 50 ans en 2025.

En poussant la porte du siège opérationnel de Bartenheim, difficile de ne pas poser le regard sur les quelques reliques fièrement disposées ici et là. Bureaux, couloirs, la décoration détonne et témoigne de l’histoire de l’enseigne au fil du temps. Pour retracer cette dernière, c’est donc 49 ans en arrière qu’il faudra remonter puisque c’est en février 1975 que Cyrille Bihr ouvrait son atelier de réparation cycle et cyclo dans le garage familial; l’histoire était en marche.

50 ans de passion.

C’est en premier lieu pour la distribution des pièces hautes performances destinées à la compétition que Bihr se fera un premier nom en France, avec une poignée de marques historiques via le biais desquelles l’entreprise Française se forgera sa réputation: Wiseco, Mikuni, Keihin ou encore Yoshimura.

Fier de son expansion jusqu’aux années 90′, Bihr surfera sur le développement croissant du marché du deux roues dans les années 2000, et ouvrira son site de Bartenheim en 2004. Devant les nouveaux enjeux économiques et l’évolution du marché, l’entreprise se concentrera toutefois davantage sur la distribution de pièces dites “consommables” et se détachera petit à petit de cet aspect racing. La nouvelle orientation de Bihr était alors en place, et l’entreprise continuera d’étoffer son catalogue de distribution avec l’arrivée de nouvelles marques phares: Motorex, Blackbird, Renthal, Kayaba, UFO, Pro Circuit … Le statut de leader Français est alors conquis.

En 2016, l’arrivée d’Arai au catalogue marquera un tournant pour Bihr, qui développera dès lors son portfolio d’équipement pilote en distribuant des marques bien implantées dans le paysage: Bell, Leatt, Answer ou encore Oakley pour la partie off-road. Une liste bien exhaustive, puisque Bihr propose aujourd’hui plus de 250 marques à son catalogue et n’a cessé d’asseoir son statut de leader de la distribution de pièces et d’équipement deux roues sur le marché Européen au fil des ans. Un statut notamment admis grâce à une poignée d’acquisitions stratégiques afin de couvrir la zone Européenne avec les rachats de Vicma (Espagne), Moto Direct & RaceFX (Grande-Bretagne) ou Paaschburg & Wunderlich (Allemagne).

À la conquête de l’ouest.

Dernière année phare pour Bihr: 2022. Année lors de laquelle le géant de la distribution Arrowhead – détenant une branche spécialisée dans le domaine du PowerSport et pesant au bas mot 1.5 milliards de dollars – a fait l’acquisition de la société Bihr pour se développer sur le marché Européen. Inversement, Bihr s’ouvre la porte du marché Américain pour y distribuer ses marques. Un rachat qui n’est pas sans aller dans une certaine logique de continuité pour le mastodonte Américain, qui avait également fait l’acquisition de Western Powersports – principal concurrent de Parts Unlimited aux USA, eux-mêmes concurrents de Bihr via Parts Europe – en amont. De quoi solidifier ses positions des deux côtés de l’Atlantique.

Dans les grandes lignes, voilà comment, aujourd’hui et en 2024, Bihr a décroché cette position de leader de la distribution à l’échelle Européenne, en comptant pas moins de 15.000 revendeurs implantés dans une vingtaine de pays. La France, marché qui représentait 42% des ventes réalisées en 2023, compte quasiment un tiers de ces dits revendeurs sur son territoire.

Bihr ne traite qu’avec les professionnels. Toutefois, comprenez que vous êtes un client indirect dès lors que vous commandez une pièce figurant à leur catalogue auprès de l’un de leurs revendeurs, à savoir un site web marchand, un atelier de réparation, une concession, une boutique … Avec un portfolio étoffé de plus de 300.000 références, on mettrait notre main à couper que bon nombre de vos pièces, accessoires et équipements ont un jour transité par le site historique de Bartenheim avant d’être expédiés en un temps record. Car c’est justement la promesse de pouvoir assurer une livraison en moins de 24 heures qui fait la grande force de l’entreprise. Pour y parvenir, Bihr a implanté pas moins de 54.000m² d’entrepôts en Europe, à travers l’Allemagne, la France, l’Espagne et la Grande-Bretagne.

Développer, et distribuer.

On aurait tort de penser que l’entreprise Française se cantonne à cette activité de distribution. Au sein du groupe Bihr, pas moins de 20 collaborateurs travaillent au développement produit afin de répondre aux demandes, suivre les tendances, rester au goût du jour et penser aux futures innovations. Ainsi, entre les nouveaux accords de distribution et les nouveautés produits, pas moins de 12.000 nouvelles références s’ajoutent au catalogue et donc au site internet chaque année; autant de références à faire ensuite connaître sur les marchés concernés.

C’est justement ce que nous détaille Benjamin Waymel, manager produit – pièces et accessoires – du secteur off-road de Bihr. “Aujourd’hui, il y a cinq personnes dédiées uniquement au travail des pièces et des accessoires off-road chez Bihr. Ça passe par les discussions avec les fournisseurs, par la création des produits. On est présents pour aider les approvisionneurs & acheteurs qui passent les commandes à avoir les bons stocks pour pouvoir lancer le produit à ses débuts, on soutient aussi les équipes marketing pour faire connaître les produits. On travaille également avec le commerce, afin d’être au plus proche du marché, de nos clients et de leurs attentes. On rend visite à nos clients avec les équipes commerciales pour leur apporter de nouvelles solutions. On a une position un peu centrale pour faire en sorte que tout fonctionne bien, et surtout pour essayer de suivre les tendances, créer les bons produits: c’est important. On regarde ce qui marche, les équipes commerciales sur le terrain nous font aussi des remontées, on échange, on étudie. On regarde également ce qui arrive dans les autres pays. On essaie d’aiguiller les stratégies des marques dans les bonnes directions.”

Exemple concret avec RFX, marque propre au groupe depuis le rachat de RaceFX. Les besoins variants entre les marchés Anglais et Français, les produits sont adaptés. Suivre la tendance est l’un des éléments clés pour rester à jour. Les besoins des pilotes, et donc des clients finaux – vous – ne sont pas les mêmes en période de préparation hivernale qu’en plein rush de saison.

Développer des produits cohérents pour répondre aux besoins et aux demandes sur l’instant T est l’un des fils directeurs de ce département produit présenté par Benjamin. Réactivité et écoute du marché, voilà les maîtres mots.

“Dès qu’il y a une nouvelle moto qui sort, on a une offre chez Bihr, et il faut répertorier toutes les pièces pour cette offre. C’est un gros travail. Quand KTM a annoncé ses modèles 2025, 24 heures plus tard, il était déjà possible de sélectionner le modèle sur le site, et il y avait déjà un catalogue produit. On était les premiers – en Europe – à proposer ça. On a anticipé car on sait à peu près quand KTM sort leurs nouveaux modèles, avec l’habitude. On a accès très tôt aux vues et fiches techniques et de fait, l’équipe va ouvrir chaque micro-fiche de chaque nouvelle moto, comparer les références d’origine, regarder ce qui a changé, ce qui n’a pas changé. On va regarder la presse, les sites internet, s’intéresser aux essais, etc. À partir de là, on va enrichir notre offre pour les nouveaux modèles.”

Notez que sur le seul secteur off-road, Bihr distribue une centaine de marques; de quoi étoffer le catalogue pièces de 1300 produits rien que cette année. On vous laisse imaginer le volume de pièces à répertorier quand Triumph et Ducati débarquent la même année sur le marché.

“On n’a pas encore eu la Ducati entre les mains, mais la moto est déjà prête dans le système. On est prêt à éplucher toutes les données techniques pour relier le plus de produits possibles et répondre rapidement aux demandes des clients. On a quelques échos en avance parce qu’aujourd’hui, quand Triumph ou Ducati prend une fourche, ils vont prendre sûrement du Showa ou du Kayaba. Ce sont des marques avec lesquelles nous travaillons, donc on est en mesure d’avoir des informations.”

En résumé, et à peine votre moto disponible dans le showroom de votre concessionnaire que vous voilà déjà en mesure de refaire cette dernière de A à Z grâce au catalogue de Bihr. “À l’exception du châssis, on peut se faire une moto complète, chez Bihr” conclura Benjamin, fier de son équipe.

Un marché “rider gear” en expansion.

À Bartenheim, on fera également la rencontre de Régis Oliviera, directeur des ventes du département équipement pilote; un marché sur lequel l’entreprise Française a sérieusement embrayé en 2016 avec l’arrivée d’Arai. Depuis, Bell, Oakley ou encore Fly Racing ont intégré le catalogue. Dernièrement, l’accent est mis sur la marque Américaine qui vise à s’étendre sur le marché Européen, et à jouir de la même notoriété qu’au pays de l’oncle Sam.

“Aux Etats-Unis, Fly Racing est une marque qui est très représentée, contrairement à l’Europe. Il y a donc beaucoup de travail à faire et c’est justement ce à quoi on s’attelle, notamment avec l’arrivée du nouveau Formula S” nous explique Regis, gestionnaire Fly depuis 2015 et récemment arrivé au sein de l’équipe de Bihr pour s’occuper du portefeuille ‘rider gear’ off-road. “Fly, c’est une marque qui intègre beaucoup de technologie, qui a vraiment franchi des étapes ces dernières années, et qui arrive à proposer des produits assez uniques, comme cette fonctionnalité Smart qu’on est les seuls à proposer sur le Formula S avec la détection d’impact intégrée, les appels d’urgence et l’analyse du pilotage en temps réel”.

Notamment sponsor du team Rockstar Energy Husqvarna 250 de l’autre côté de l’Atlantique, la marque a récemment annoncé son nouveau partenariat avec l’américain Cooper Webb. Fly Racing est également sur le point de débarquer en Europe pour équiper les pilotes de la structure officielle KTM De Carli, et donc les frères Coenen, mais aussi Simon Langenfelder. Outre l’aspect marketing et communication, le sponsoring est également un levier important pour développer l’attractivité d’une marque et créer son identité. Mission, revaloriser la marque sur le vieux continent, et retrouver des parts de marché.

“Aujourd’hui, l’objectif est de développer l’offre Fly pour qu’elle soit plus “Européenne”, et particulièrement dans ce qui est du domaine de la protection, puisque cette dernière est encore très orientée vers le marché Américain. On va prochainement présenter la collection 2026 avec de nouveaux produits et une toute nouvelle gamme de protection, qui sera plus destinée au marché Européen.”

De la théorie à la pratique.

C’est finalement lors de la visite de l’entrepôt que l’on réalise réellement l’ampleur des opérations de Bihr. Ici et dans le dédale d’allées, pas moins de 100.000 pièces sont stockées alors qu’une centaine d’employés s’affairent. D’ailleurs, en voilà un perché une dizaine de mètres au-dessus du sol, dans un chariot automatique filoguidé: gain de temps et de sécurité. Le manège au-dessus de nos têtes se poursuit également grâce aux convoyeurs – 3.5 kilomètres au total – qui charrient les colis d’un bout à l’autre de l’entrepôt, d’une “cellule” à l’autre. Une machine finement huilée.

Responsable Logistique, Quentin Trepaut prend le temps de nous expliquer les fondamentaux de cette mécanique XXL qui vise encore et toujours à remplir une mission principale: livrer le client en moins de 24h.

“On injecte 400.000 unités dans le stock chaque mois; on suit un planning de réception afin de prioriser les marchandises, et en fonction de leurs disponibilités dans le stock. Notre logistique est au point. Elle représente toutefois beaucoup de mouvement en interne et ce mouvement représente du temps; le client se fiche de savoir comment on gère le stock. Ce qu’il veut, ce sont ses pièces en temps et en heure. C’est à nous de faire en sorte que tout se passe bien de ce côté-là”.

D’un pas rapide, Quentin nous guide au sein des cellules, au rythme de ses explications. Le sujet est maîtrisé, et on mentirait si on se disait capable d’assimiler l’intégralité du fonctionnement de la partie logistique de Bihr en quelques minutes. Zone de pré-réception, zone de masse, zone de préparation, zone d’envoi. Préparateur de picking, de packing, de shipping; une organisation millimétrée.

Au fil des années et du développement de son activité, Bihr a dû repousser les murs, mais aussi les plafonds. Érigé en 2004, le site de Bartenheim a connu une première expansion de 5.000m² en 2009, puis une autre de 8.000m² en 2013. Dernier chantier en date, l’ajout d’une mezzanine de 4.000m², en 2023.

Il fallait bien ça, puisque depuis la plateforme française de Bartenheim partent désormais pas moins de 4.000 colis par jour, sans compter le gros millier de pneumatiques, gérés dans un bâtiment 100% dédié à leur cause depuis 2015. Une pièce commandée avant le cut-off commercial de 16h30, c’est une livraison assurée chez le client pour le lendemain, bien souvent avant midi. Dans les coulisses, on s’affaire donc à respecter ces délais à coup de process, d’automatisation, d’informatisation, de robotisation. Objectif, l’optimisation.

“Chez Bihr, nos préparateurs sont capables de faire une action de picking produit en une trentaine de secondes. On a vraiment misé sur l’optimisation, sur le gain de temps. En moyenne, on fait partir 4.000 colis par jour du site de Bartenheim, mais avec nos équipes et nos capacités, on serait en mesure de répondre à une demande 5 à 6 fois plus importante si le besoin s’en fait ressentir.” concède Quentin qui continue de nous guider dans ce labyrinthe de pièces.

Un énième virage à gauche, un nouvel escalier descendu, un dernier détour par une série d’échappements; nous voilà en zone de shipping, où sont effectués les derniers contrôles avant expédition. C’est donc là que notre voyage s’arrête, et où commence celui des colis qui quittent définitivement les mains de Bihr pour être déployés aux 4 coins de l’hexagone, après avoir été confiés aux transporteurs concernés. Une porte qui se ferme et, derrière nous, le cliquetis du convoyeur s’éloigne, le manège des opérateurs s’estompe.

Non. Bihr ne nous a pas encore dévoilé tous ses secrets, mais on se fait désormais une idée plus précise des missions et de la vision de la petite société Française qui a su – en l’espace de quelques décennies – devenir un véritable poids lourd sur le marché Européen, mais aussi un incontournable de notre secteur off-road. Ne reste plus désormais qu’à écrire la suite de la succès story.

www.mybihr.com

Remerciements: Laura Jehly, Florine Giroux, Quentin Trepaut, Benjamin Waymel, Regis Oliviera, Olivier Bazin.

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