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Hunter Lawrence “je ne peux m’empêcher de repenser à tous les sacrifices qu’on a dû faire”

Interview: Conférence de presse

Sept victoires en neuf épreuves disputées, jamais moins bien que troisième et voilà un premier titre AMA en poche. Hunter Lawrence l’a fait. Après les galères en Europe & les blessures à ses débuts aux USA, l’aîné des frères Lawrence a finalement décroché son premier titre de champion de Supercross US une épreuve avant la fin de saison. Le rêve enfin touché du doigt, Hunter Lawrence peut s’inscrire doublement dans l’histoire du sport à Salt Lake City. S’il intègre le top 6 lors de la dernière finale de l’année, il deviendra le pilote qui aura marqué le plus de points en une saison de Supercross 250 depuis la création du championnat. Micro.

Hunter, tu disais sur le podium que tu pensais que gagner un titre n’était qu’un rêve, que ça n’arriverait jamais. C’est vraiment ce que tu pensais ?

Quand j’étais gamin, j’en rêvais constamment parce que je regardais les courses à la TV. En Australie, ce sport n’est pas très répandu donc tu ne te dis pas vraiment que tu vas pouvoir faire une carrière dans la moto. Ton père travaille, et tu te dis que tu vas devoir travailler un jour toi aussi, parce que la vie c’est comme ça. Ce n’est que depuis qu’on a quitté l’Australie pour l’Europe que je me suis dit qu’un jour je pouvais peut-être y arriver moi aussi. Gamin, je ne me disais pas que j’allais devenir champion de Supercross US car pour moi, je regardais simplement des pilotes à la télévision avec mes copains le samedi soir. J’étais très, très loin d’imaginer un jour être dans cette situation. C’est dingue.

Quand tu as reçu le coup de fil pour venir rouler aux USA alors que tu étais encore en Europe, c’était comment ? Tu te souviens de ce moment ?

Oui. Ce n’était pas les émotions que vous pourriez croire, car j’étais content d’être en grand prix, c’était top. Je ne dirais pas que j’étais complaisant, mais à l’époque, j’étais content à l’idée de passer plus de temps en mondial car j’avais pour objectif de devenir champion du monde un jour. Quand on a reçu le coup de fil des USA, on leur a dit qu’on devait rester un an de plus en Europe. Donc on a signé notre contrat un an avant de venir ici. Quand tu penses que tu n’es pas prêt, c’est en fait le moment de sauter sur l’occasion que ce soit dans les affaires, dans ta vie, dans le sport. Selon moi, si tu ne te sens pas à 100% prêt pour faire un truc, c’est le meilleur moment pour le faire !

@Honda Racing

Tu t’es blessé d’entrée de jeu en Supercross en 2020. Tu es revenu en pensant être en bonne santé sur l’ouverture de l’outdoor à Loretta Lynn’s et tu as terminé 17ème en te blessant. De là, tu pensais que c’était terminé pour toi ?

En 2020, j’étais fini. J’étais avec Cynthia, mon père et Johny O’Mara dans le camion de l’équipe Geico Honda. Je venais de me déboîter l’épaule pour la seconde fois et je devais prévoir une quatrième opération en l’espace de 7 mois. Pour moi, c’était terminé. À chaque fois que tu te blesses tu dois travailler d’autant plus dur pour revenir à ton niveau, et devoir revenir à chaque fois pour te retrouver par terre et de nouveau blessé, parfois sans même tomber, c’est difficile. J’étais dans une très mauvaise posture mentalement. Je me disais que c’était terminé pour moi, qu’on allait soutenir Jett dans sa carrière parce qu’il avait ce qu’il fallait pour réussir. Deux ou trois jours plus tard, après avoir réfléchi, je me suis dit que j’allais revenir, continuer à me donner. Là, on est à Nashville au Tennessee, pas loin de cette piste où j’ai bien failli tout arrêter quelques années plus tôt, et je gagne mon premier championnat.

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En Europe, on s’était retrouvé dans la merde à cause de certains teams, mes parents avaient utilisé tout l’argent qu’ils avaient économisé en vendant la maison en Australie. Nos grands-parents nous ont envoyés de l’argent pour nous aider à rester en Europe mais ça partait vite à cause du coût de la vie, des voyages pour se rendre sur les épreuves et tout ça. Ça pèse sur les épaules, ta famille te soutient, tu cours après un rêve et quand tu te retrouves aussi bas autant de fois, tu te dis que ce n’est peut-être pas fait pour toi. C’est de là que je me suis dit qu’on allait soutenir Jett, que j’allais me trouver un job, tout ça.

Tu en a fais du chemin depuis l’Europe 250 avec CLS Kawasaki. Aujourd’hui, c’est le point culminant de ta carrière pour toi, ou plus le début de cette dernière ?

J’ai envie de dire les deux. Evidemment j’ai été celui qui a tracé le chemin, qui a expérimenté pour moi-même et pour Jett en Europe avant de venir ici. Je pense que pour moi, c’est le début d’une belle carrière mais c’est clair que je ne peux m’empêcher de repenser à tous les sacrifices qu’on a dû faire en Europe. C’était parfois galère mais il y avait des gens super qui sont restés à nos côtés. Il y a notre cercle familial et notre équipe ici désormais et c’est ce qui rend tout ça spécial pour tout le monde. J’étais un peu le prototype crash-test, pour qu’on apprenne au fur et à mesure. J’ai connu beaucoup de hauts et beaucoup de bas et les personnes qui sont avec nous aujourd’hui étaient déjà là à l’époque quand on était au plus bas. C’est pour ça que ce titre est encore plus spécial pour tout le monde.

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À l’époque chez Suzuki en Europe, tu travaillais avec Harry Everts. Qu’est-ce que tu as appris de lui ? Le contraste entre les jeunes en Europe et les jeunes aux USA a l’air bien différent.

La période Suzuki en Europe, ça me manque. On était avec Jeremy Seewer, Harry, Stefan Everts et Liam qui était encore très jeune; il roule en MX2 maintenant et il a décroché son premier podium à Arco, c’est dingue. Il y a certaines années dans ta vie que tu n’oublieras jamais et ces années-là en font partie. C’était génial, ça me manque. Je me souviens qu’il faisait froid, zéro degrés, il pleuvait, c’était la misère et on roulait dans du sable sur des pistes défoncées… On a pu voir Harry l’an dernier à Red Bud à l’occasion du Motocross des Nations et c’était top de notre côté comme du sien aussi car il a pu voir où on en était aujourd’hui par rapport à l’époque ou on était ensemble en Europe. Désormais il y a Liam en mondial, il est pilote usine KTM. À l’époque où je roulais pour Suzuki, il était encore en 65 !

Qu’est-ce qui a changé pour que tu parviennes à être champion cette année, par rapport à l’an dernier ?

L’an dernier, j’ai laissé filer le titre en début de saison et j’ai beaucoup gagné en fin de championnat. On a beaucoup travaillé sur mes départs pour cette année car même en outdoor on a pu voir que mes départs ne me permettaient pas d’être dans les meilleures conditions. J’ai hâte de disputer l’outdoor désormais même si on n’a pas trop fait de Motocross car on s’est concentré sur le Supercross. Je vais profiter du moment présent car je sais que dès le début de semaine prochaine, on sera concentré sur l’outdoor.

Peux-tu parler de l’influence de ton père, de son implication dans ton programme et de l’importance de l’avoir avec toi ce soir maintenant que tu as accomplis ce après quoi tu courrais depuis des années.

C’est une personne assez dure, il ne montre pas vraiment ses émotions à moins qu’il ne soit énervé, ça on le voit assez facilement ! Cette émotion là, il la montre très facilement [rires]. Je pense que ce trait de caractère finit par se retrouver chez Jett & chez moi; on est solide. Si je n’avais pas eu mon père, je ne sais pas si je serais revenu en 2021 quand je voulais arrêter. C’est un roc pour moi. Sa façon se nous éduquer, sa façon d’être, c’est ce qui fait qu’on est ce qu’on est aujourd’hui. Tout ça se transfère dans chaque aspect de notre vie d’aujourd’hui. Je pense qu’on est deux bons gars et on ne serait pas ce qu’on est aujourd’hui sans lui. J’espère qu’il est content, je sais que Jett a déjà trois titres mais j’espère qu’il est content quand même pour mon premier titre [rires]. Il avait fini aux urgences pour le premier titre de Jett à l’époque alors j’espère bien qu’il va y finir aussi pour fêter le mien !

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Hunter Lawrence “je ne peux m’empêcher de repenser à tous les sacrifices qu’on a dû faire”

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