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Gavin Towers “Je ne connais personne ici, et c’est un peu dur”


Jack Chambers n’est plus le seul pilote Américain dans le paddock de ce côté-ci de l’Atlantique. Encore présent en Supercross future pour le compte de Star Racing Yamaha le mois dernier, Gavin Towers a débarqué en Europe à la dernière minute pour reprendre le guidon de Janis Reisulis chez VRT Yamaha suite à la blessure du pilote Letton. À peine le temps de souffler et de s’adapter, l’Américain était déjà en piste en Allemagne et ramenait une prometteuse quatrième place. 22ème en Lettonie, le garçon a pris part à sa première épreuve du championnat du monde MX2 ce week-end à Maggiora. On a été à sa rencontre pour en apprendre un peu plus sur le nouveau “kid in the block”. Micro.

Gavin, tout d’abord bienvenue en Europe, ce n’est pas tout les jours qu’on accueille un Américain ici. Cette décision de venir rouler sur l’EMX250 semble avoir été une décision de dernière minute. Comment ça s’est fait, réellement ?

En réalité, et une semaine avant notre dernière course Supercross Futures de Salt Lake City Aaron Nixon de Monster Energy m’a appelé et m’a dit “Hey Gavin, qu’est-ce que tu dirais d’aller rouler en Europe ?”. Franchement, sur le coup, je ne savais pas trop. Je voulais juste faire ma dernière course – ici aux US – et me concentrer sur le Supercross Futures. Les résultats n’ont pas été ceux que j’espérais, ou que le team espérait. Il y avait aussi beaucoup de pilotes en 250 chez Star Racing pour l’outdoor, alors c’était compliqué pour eux de me trouver une place pour cet été. Autant dire que je n’avais pas beaucoup d’options aux USA. Dans ce contexte, je risquais de terminer dans une situation qui ne me convenait pas. Je risquais de ne pas trouver de guidon dans un bon team, de ne pas avoir une bonne moto, tout ça. Je voulais continuer à rouler, rouler au haut niveau, et engranger encore de l’expérience. L’Europe, c’était sur ma liste. Les gars de Monster ont contacté Yamaha Europe, et tout s’est mis en place très rapidement. Une semaine, une semaine et demie plus tard, j’étais en France.

Quand on est chez Star Racing, on a une bonne moto même si on ne sait pas exactement quel matériel tu avais en tant que pilote amateur. Comment comparerais-tu la 250 de Star Racing avec la 250 du team VRT ?

La Moto de VRT est vraiment bonne, les deux motos sont bonnes d’ailleurs. La plus grosse différence, selon moi, c’est au niveau de la façon dont la puissance est distribuée. Ça ne fait pas non plus une grande différence. Je ne sais pas si ça vient de l’essence utilisée, de la ligne d’échappement utilisée ou un combo des deux. Les deux motos sont très bonnes, ce n’est pas comme s’il y avait une différence drastique entre l’une et l’autre.

Il y a encore quelques semaines, le quotidien de Gavin Towers ressemblait à ça @DR

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Honnêtement, et avant de venir ici, tu savais ce que c’était, l’Europe 250 ?

Je savais ce que c’était, je savais que le niveau était relevé, que c’était un championnat où il fallait être compétitif. Je savais aussi que pour gagner une course en Europe, ce n’allait pas être facile, et même finir sur le podium ou dans le top 5. Je ne connaissais personne en fait, à part Benjamin Garib car j’ai eu l’occasion de rouler contre lui aux USA. J’ai trouvé mes nouveaux coéquipiers au sein du team VRT (Karlis et Ivano) sur Instagram pour leur parler, voilà tout en gros. Mais sinon, je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Je ne suis pas très familier avec le mondial MXGP car pour nous aux USA, c’est vraiment très tôt le matin pour pouvoir le regarder, et je n’ai jamais vraiment trop suivi. Mais maintenant, j’ai un pass MXGP-TV [rires].

Donc, quand tu t’es aligné derrière la grille en Allemagne pour ton premier EMX, tu ne connaissais personne ?

Non, à part mes deux coéquipiers chez VRT et Benjamin Garib, je ne connaissais personne. Voilà les trois personnes qui me disaient quelque chose, quoi. Autant dire qu’il y avait beaucoup d’inconnu pour moi en allant à la première course de l’Europe, c’était du positif comme du négatif finalement. Heureusement pour moi, le tracé de Teutschenthal n’était pas si différent de certaines pistes qu’on a aux US. J’étais du coup un peu familier, c’était un tracé où le rythme était un peu plus lent, le genre de tracé que j’aime car ça devient technique et on roule un peu moins vite. Je ne suis pas un grand fan des tracés très rapides, mais je vais m’améliorer de ce côté-là.

Un nouveau championnat, un nouveau pays, une nouvelle équipe. Tu n’es pas passé loin du podium en Allemagne pour ta première sortie. Honnêtement, tu t’es surpris ?

Oui et non. Aux US, je sais que je suis très bon quand il s’agit de sprinter, et surtout en Supercross. En Motocross, c’est aussi le cas d’ailleurs. Par contre, quand je suis arrivé aux essais en Allemagne, j’étais à l’arrêt, c’était horrible. Je n’arrivais pas à faire un tour correct. J’avais les avant-bras qui devenaient béton après 3 tours. J’ai appelé mes parents pour leur dire “Eh, je ne sais pas trop si j’ai envie de faire ça.” Je galérais vraiment beaucoup. Heureusement, en Allemagne, on pouvait prendre un bon départ de n’importe où sur la grille et la moto est vraiment solide au départ. J’ai fait le holeshot dans les deux manches, ça m’a bien aidé. Ces terrains sont moins larges que nos terrains aux US, donc il faut être plus créatif quand il s’agit de doubler. Si tu pars devant, tu peux creuser l’écart un peu plus facilement je dirais, car tous les mecs qui te suivent sont vraiment proches en termes de vitesse et sur la piste c’est donc plus dur de doubler. J’étais aux premières loges en Allemagne car j’ai pris un bon départ avant de tomber. Si tu n’es pas devant, à rouler dans le même rythme que les premiers, tu n’arriveras jamais à l’accrocher en étant dans le paquet.

Désormais, le pilote Américain découvre les joies de l’Europe et de son été clément … @Yamaha Racing

Un mot sur Kegums. C’est un tracé particulier, difficile. Ça s’est bien passé en Allemagne, mais beaucoup moins bien en Lettonie pour toi.

Ce n’était pas le meilleur des week-ends. Il y a eu un effet boule de neige, qui a commencé avec une mauvaise qualification. Je suis tombé et j’ai dû changer de moto, les deux n’étaient pas identiques au niveau des réglages car évidemment, on n’avait pas prévu de détruire une moto aux essais. Je n’ai jamais réussi à me sentir à l’aise après cette chute. J’ai fait deux tours en gros, et le temps que j’avais signé pendant ces deux tours m’a fait partir de loin sur la grille. J’ai fait un tour pourri, et un tour assez bon pour me permettre de me placer au milieu du paquet sur la grille.

J’ai pris un bon départ en première manche, mais je n’ai pas accéléré jusqu’au bout car je ne savais pas trop à quoi m’attendre dans le premier virage. Je me suis fait percuter par un autre pilote et ma chaîne a cassé, donc j’en suis resté là. Je suis tombé rapidement en seconde manche et de là, je suis reparti après avoir été doublé par tout le monde. C’était vraiment dur de doubler sur cette piste. Pour moi, c’était un week-end compliqué. On est de retour sur le dur ce week-end, ça me plaît bien. Ensuite, je vais passer un peu de temps dans le sable car, en général, je n’ai pas passé beaucoup de temps à faire du Motocross dernièrement. J’ai dû faire trois journées d’entraînement en Europe avant Teutschenthal, et seulement sur le dur. Avant de venir ici, j’ai dû faire dans les 10 jours de Motocross depuis Thanksgiving – en Novembre dernier – car jetais vraiment concentré sur le Supercross, donc je suis quand même un peu derrière les autres en termes de préparation.

Tu n’es pas le seul Américain dans le paddock; il y a Jack Chambers qui est un poil plus vieux que toi. Avant de venir en Europe, est-ce que tu l’as contacté pour savoir un peu à quoi t’attendre ?

Non, je n’avais jamais parlé à Jack. D’ailleurs, il m’a contacté pour savoir si j’allais vraiment venir en Europe quand il a entendu parler de ça. Par contre, j’ai parlé à Zach Osborne; je lui ai passé un coup de fil. Je lui ai demandé de me donner son avis, de me dire ce qu’il en pensait. Il m’a dit que c’était une bonne opportunité, mais que ce serait compliqué. Il m’a parlé des avantages, des inconvénients. Tu ne sais jamais vraiment à quoi t’en tenir jusqu’à ce que tu essayes toi-même, j’imagine.

Quel est l’enseignement le plus important que tu as tiré de ces deux premières épreuves? (n.b: interview réalisée le vendredi à Maggiora)

Qu’il faut que je sois meilleur lors des séances qualificatives, car le départ est vraiment très important. Comme je l’ai dit, ces terrains sont moins large qu’aux US, et il y a moins de possibilités de dépassement. Il faut être plus créatif, déborder les pilotes te prend plus de temps à moins que tu ne sois vraiment plus rapide qu’eux. Il faut avoir une bonne place sur la grille de départ, il faut aussi prendre un bon départ. Ici, c’est plus important et il faut se concentrer davantage là-dessus. Je galère un peu, oui. Parfois, j’en fais un peu trop. Même à l’entraînement, j’ai un peu de mal lorsque je fais des sprints alors que quand je fais une manche, je me retrouve a être plus rapide que lorsque j’essaye de faire des sprints pour m’entraîner et me préparer à faire face aux chronos…

Depuis que tu es arrivé en Europe, il y a quelques semaines, qu’est-ce qui t’a posé le plus de problèmes au niveau de l’adaptation ?

Le Français, la barrière de la langue est difficile. En tant qu’Américain, on ne connaît que l’Anglais, c’est tout. Les gars du team VRT Yamaha parlent un bon anglais donc ça va, le chauffeur de la semi-remorque est le seul qui ne le parle pas. Pela parle parfois Français, les autres aussi, mais ils ont un bon niveau d’anglais. Il y a aussi le fait d’être loin de la maison. Je ne connais personne ici, et c’est un peu dur. Il faut simplement que je m’y habitue. Chez moi, j’ai pour habitude d’être entouré de tous mes amis et là, je suis entouré de nouvelles personnes. C’est très différent, parfois un peu dur.

Intégré à l’équipe VRT Yamaha pour le reste de la saison 2024, qui sait de quoi sera fait l’avenir de Gavin Towers ? @Yamaha Racing

C’est quoi le plan ? Il y a un objectif sur le long terme, c’est juste pour la saison ? Tu seras présent en MX2 ce week-end, et il me semble que tu feras d’autres épreuves quand il n’y aura pas d’Europe 250. Tu sais ce que l’avenir te réserve ?

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Pour l’instant, il faut que je règle les problèmes liés à mon visa. Vu que c’était vraiment un deal à la dernière minute, je suis ici grâce à mon passeport, mais il va falloir que je rentre à la maison pour régler tout ça. Si tout se passe correctement, alors je finirais la saison. Pour l’heure, je n’ai aucune direction à suivre pour l’an prochain. Tout dépendra du reste de la saison 2024. Mon objectif, c’est de vraiment de donner le meilleur de moi-même et d’apprendre un maximum en étant ici.

Tu te verrais rester pour tenter l’aventure en mondial ? Évidemment, il n’y a que peu d’Américains qui viennent ici, et il y a aussi une bonne raison à cela. Tu dois peut-être te dire “Est-ce que ça en vaut la peine ?”

Ce serait cool de pouvoir évoluer sur le mondial MX2 mais là encore, il faut d’abord voir comment va se dérouler le reste de l’année. Je vois beaucoup d’endroits différents ces derniers temps, je pense que j’en saurais un peu plus d’ici un mois, un mois et demi.

Quels sont les objectifs pour ce week-end ?

Je veux juste être en mesure de rouler à 100% de mes capacités, et atteindre mon plein potentiel car le week-end dernier en Lettonie, ce n’était pas le cas … J’espère faire une bonne qualif’ et de bons départs. Le but, c’est d’apprendre le plus possible face à tous les autres pilotes; ils sont chauds que ce soit en MX2 ou en EMX250. Si je pars devant, l’objectif sera d’apprendre le plus possible des gars qui roulent devant; ils ont déjà un paquet de courses dans les jambes.

Maggiora est vraiment un terrain super cool. Les grandes descentes me font un peu penser à Glen Helen. La disposition du terrain est cool. Je n’avais pas réalisé qu’il serait aussi grand, que ça continuerait autant derrière la colline car le vendredi, lors des tests de départs, on ne voyait en fait qu’une petite partie du terrain. La piste est cool, le paysage est magnifique, c’est aussi l’un des trucs vraiment cool avec tous ces voyages. Pour moi, c’est le troisième ou quatrième pays en l’espace de quoi, trois semaines ?![

[Auteur d’un 22-20 en manches à Maggiora, Gavin Towers termine 22ème de sa première épreuve de championnat du monde MX2]

Gavin Towers “Je ne connais personne ici, et c’est un peu dur”
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