Du haut de ses 14 ans, Levi Townley est le premier pilote Néo-Zélandais à décrocher un titre de champion du monde Junior. Fils de Ben Townley – lui même sacré champion du monde MX2 20 ans plus tôt, Levi Townley a fait le (long) déplacement jusqu’au Pays-Bas dans l’objectif de prendre de l’expérience; il repart avec un premier titre mondial, signant un 1-3 en manches pour finalement devancer Lucas Leok et Dex Van de Broek au terme du week-end d’Heerde. Notre confrère Andy McKinstry s’est entretenu avec le nouveau champion du monde 85cc; place à la jeunesse.
Levi, ça a été un week-end incroyable pour toi. Ça te fait quoi, d’être le nouveau champion du monde 85cc ?!
C’est incroyable. Je ne pensais même pas que j’allais être en mesure de rouler car il y a une semaine, je pensais m’être fracturé le poignet à l’entraînement. Finalement, ce n’était qu’une grosse contusion osseuse, mais je n’arrivais même plus à le bouger. Finalement, l’adrénaline a pris le dessus, il y avait toute l’excitation sur le moment, lors des courses. Il se passait beaucoup de choses alors j’ai fini par oublier le poignet. Avance rapide, maintenant je suis ici et champion du monde Junior. C’est vraiment cool. Le voyage pour venir ici a duré 30 heures, c’est la plus longue distance pour nous depuis la Nouvelle-Zélande, mais ça en valait la peine.
Qu’as-tu pensé du tracé ? Du sable bien profond le samedi, un peu moins le dimanche, mais un tracé bien défoncé quand même.
J’ai vraiment bien aimé le tracé le samedi. C’était vraiment une belle piste, et je me dois de dire bravo à l’organisation car ils ont fait un super travail sur la piste, et ils ont organisé une superbe épreuve. Quand j’ai fait le tour de la piste le dimanche matin, c’est vrai que je me suis dit que c’était un peu plat: ils avaient refait toute la piste. Mais ça a fini par bien se défoncer, donc j’étais plutôt content. À la maison, on n’a pas vraiment de terrains de sable comme ça, on en a bien un mais il est assez loin de chez moi. Donc on a dû s’adapter quand on est arrivé en Europe; j’ai roulé dans le sable trois fois avant l’épreuve d’Heerde; je suis arrivé en Europe il y a deux semaines et demie, et vu que je me suis blessé au poignet, je n’ai pu rouler que 3 fois. Malgré tout, ça a bien fonctionné pour moi.
Les Pays-Bas, ce doit être bien différent de chez toi. J’imagine qu’avec son expérience, ton père t’aide à gérer ça ?
Oui, mon père m’aide à comprendre certaines choses. J’aime vraiment être ici, et je me verrais vraiment bien rouler sur l’Europe l’an prochain si une opportunité se présente.
Tu as connu deux manches différentes le dimanche. Lors de la première, Ernecker est tombé et tu n’avais plus qu’à contrôler ta course. En seconde manche, un départ moyen et de nombreuses bagarres. C’était comment, ce week-end ?
La première manche, c’était l’une de mes meilleures manches. Je ne pouvais pas franchement faire beaucoup mieux que ça. J’ai fait un départ incroyable, parfait, puis un pilote est arrivé à fond de l’extérieur, mais il a chuté en tentant de forcer sur une portion de piste bien dure. Moi, j’ai roulé ma propre course, en attaquant, et le pilote Français qui était derrière moi me mettait quand même un peu la pression car il n’était à 5 secondes. Mais j’ai tenu, j’ai fait une belle course, et j’ai gagné.
La seconde manche a été un peu différente. J’ai relâché l’embrayage trop vite au départ, et la moto n’est pas passée loin de caler. Je suis parti hors du top 10, et je me suis battu pour remonter. J’en ai fait un peu trop et j’ai fini par tomber dans le dernier tour alors que je tentais de faire un dépassement pour la seconde place. Je ne me suis jamais relevé aussi vite de ma vie, à peine tombé que j’étais déjà remonté sur ma moto et que j’étais reparti !
Lucas Leok a dominé la seconde manche; tu savais que tu avais besoin d’aller chercher la troisième place pour être champion ?
Non, même pas. Mon père m’a panneauté pendant la course pour me dire qu’il fallait que j’aille chercher la troisième place, mais je pensais que j’étais cinquième en piste, alors que j’étais en fait quatrième. Donc à la fin de la deuxième manche, je ne savais pas que j’avais le tire en poche. J’étais vraiment déçu et énervé d’être tombé; je pensais avoir perdu le titre mondial dans le dernier tour. Puis j’ai vu “World Champion” sur mon pitboard et tout le monde célébrait, j’étais là “mais non ?!”.
Quel est le plan pour le reste de la saison 2024, désormais ? Tu restes en Europe ou tu rentres à la maison ?
Là, je viens tout juste d’apprendre qu’après ma victoire sur le mondial 85cc, je suis engagé pour rouler lors de la finale de l’Europe 85 à Loket en République Tchèque le week-end prochain. Ça va être la folie d’enchaîner ces deux courses en l’espace d’une semaine. Ensuite, on va rentrer à la maison et se reposer un peu pour récupérer. De là, on ira en Australie pour participer au championnat de Supercross; c’est un très beau championnat. J’ai également été invité au Motocross des Nations pour rouler sur la Blu Cru Cup de Yamaha en 85cc. Il y a une opportunité d’aller rouler là-bas, ce serait vraiment cool d’y être !
Quand on te voit rouler, on ne se dit pas que tu es aussi rapide. Tu es très fluide, précis. C’est quelque chose que ton père t’a appris ? On dirait une copie conforme de Ben, 20 ans plus tôt.
C’est sûr qu’en me voyant rouler, les gens se disent probablement que je ne serai même pas en mesure de me qualifier pour le mondial Junior. Il n’y a pas de mouvements ni trop d’action sur la moto; je me concentre sur mes traces et sur ma technique. Voilà pourquoi je n’ai pas vraiment l’air très rapide mais si on regarde les chronos, on voit que ça marche plutôt bien.
Comment ça se passe avec ton père ? Il a déjà été dans ta situation à l’époque, à tenter de se faire un nom dans le milieu. Il est comment avec toi, il te laisse décider si tu veux aller faire de la moto ?
Mon père me donne son opinion de façon très honnête. C’est le meilleur papa que je pourrais avoir; il m’aide énormément au niveau de la technique moto, au niveau des pièces et tout ce que va avec. C’est pareil pour ma mère et ma famille à la maison. Ils sont restés debout toute la nuit car il y a presque 12 heures d’écart avec la Nouvelle-Zélande. Mes cousins et ma mère étaient scotchés au téléphone à 2 heures du matin pour savoir ce qu’il se passait ici; ma mère était super contente pour moi. Ma famille, c’est une grosse part de mon succès.
Il y a beaucoup de frères qui réussissent dans ce sport dernièrement. Les Lawrence, les Coenen, les Reisulis. Tu es venu ici avec ton frère, et il me semble qu’il débute seulement les compétitions. C’est comment, d’avoir un frangin qui roule et de pouvoir expérimenter ça avec lui ?
Les frères Townley vont venir pour vous battre ! [rires]. Non en vrai, mon petit frère [ndlr: Jaggar] est vraiment génial. Je suis persuadé qu’il sera en mesure de gagner un titre mondial Junior d’ici quelques années, à son tour. Il vient tout juste d’avoir l’âge de faire de la compétition et il était 12ème d’une manche pendant un temps, c’est vraiment top. Il a beaucoup appris ce week-end, sur beaucoup de points. C’est une très bonne expérience pour lui de venir ici et de pouvoir apprendre comme ça; j’espère qu’il sera en mesure de décrocher un titre ces prochaines années.
L’objectif est de rouler en 125 l’an prochain ?
Oui, c’est le plan. On va devoir voir comment ma croissance se déroule afin de ne pas trop se précipiter à travers les catégories. On va prendre ma croissance en compte et si je grandis assez, on viendra probablement rouler sur l’Europe 125 dès que je serai dans la catégorie; tout du moins c’est l’objectif, si l’option est sur la table. L’Europe, c’est un beau championnat et je pense que je pourrais en apprendre beaucoup en roulant dessus.