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Paolo Maschio “Ce week-end, j’ai vu que j’avais la vitesse pour jouer dans les 15 sur l’Europe”


La bonne surprise Française du week-end d’Arroyomolinos s’appelle Paolo Maschio. Engagé sur l’Europe 250 cette saison et ce, après avoir fait ses armes sur quelques rounds l’an dernier, le pilote Français – privé – a affiché une belle vitesse de pointe lui permettant de jouer des coudes pour intégrer le top 10. Leader du mondial des sables en catégorie 250, prétendant au titre sur le CFS mais aussi présent sur l’Elite, Paolo a fait la transition à la 250 à 14 ans, et sans passer par la catégorie 125. Désormais âgé de 17 ans, le garçon a de beaux jours devant lui et la marge de progression est encore importante. On est allé à sa rencontre en Espagne. Oui, Paolo est bien de la même famille que Mickael, champion du monde 125cc dans les années 2000; mais pas que. Micro.

Paolo, tu n’es pas le pilote le plus médiatisé alors pour en savoir un peu plus sur toi, rien de mieux que de venir te rencontrer directement. Je t’ai vu sur le Pro Hexis il y a quelque temps, sur l’Elite, le Sable, sur l’Europe 250 l’an dernier. Finalement, raconte nous ton parcours dans le monde de la moto, jusqu’ici.

J’ai une famille de motard, mon père a mis mon oncle dans la moto, Mickael est devenu champion du monde par la suite. Ce que les gens ne savent pas, c’est que j’ai un handicap au niveau de la main droite. Il me manque trois muscles dans le bras, ce qui fait que j’ai beaucoup moins de force dans le bras droit, et surtout dans la main droite. Ma première moto, je l’ai eue à 6 ans, mais j’ai attaqué vraiment tard car c’était dangereux pour moi, je n’avais pas assez de force dans la main. Jusqu’à mes 9 ans, je faisais de la moto mais pas de manière régulière, une fois par mois, ici et là. Je faisais plus du vélo, de l’escalade, j’ai touché a tout.

J’ai vraiment commencé à faire plus de moto une fois les 9 ans passés, et j’ai participé à ma première course de ligue 65cc; c’était relativement tard en comparaison avec d’autres et je n’avais pas fait de 50cc. J’ai fait deux ans de ligue de Provence en 65cc, puis je suis monté en 85cc et dès la seconde saison dans la catégorie, j’ai été champion de ma ligue; c’était en 2019. En 2020, c’était l’année de Covid et j’ai terminé vice-champion de Provence en 85cc sur une seule course, puis j’ai été de nouveau champion en 2021, mais aussi vice-champion de France Espoirs.

Je n’ai pas fait de Minivert; ma première saison en championnat de France, c’était en 2019. J’ai mis quelques points à Rauville-la-Place en Espoirs, mais rien de fou. Je tournais autour de la 18ème et de la 30ème place. J’ai accroché des top 10/15 en 2020 et je suis devenu vice-champion de France Espoirs derrière Mathis Valin en 2021. Je suis monté en 250 en 2022, sans passer par la catégorie 125cc.

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Pourquoi ne pas être passé par la case 125cc, finalement ?

Pour mon pilotage, ce n’était pas une moto qui me convenait et je n’aimais pas du tout cette moto. Je trouvais le moteur vraiment creux, ce n’était pas une cylindrée qui me plaisait. Le 250 convenait beaucoup mieux à mon pilotage, ce n’est pas une moto beaucoup plus lourde et ça l’a fait. En 2022, j’ai fait ma première saison d’Elite 250 à 15 ans, et j’ai tourné entre les 18-30 de nouveau, en mettant quelques points à Villars-Sous-Ecot mais rien de bien fou, je finis le championnat à la 50ème place de tête.

L’an dernier, j’ai fait ma deuxième saison sur l’Elite MX2. Ce n’était pas la saison espérée, j’ai fait beaucoup d’erreurs, je n’ai pas mis beaucoup de points; c’était compliqué car il y a aussi eu une blessure. J’ai fait mes trois premières courses sur l’Europe 250 et elles ont été très positives; de bons départs à chaque fois, du rythme devant.

En matinée, Paolo signera le 17ème chrono des essais chronométrés, à seulement 2.5s de la pole de Valerio Lata

C’était comment, ces premières expériences en Europe ?

En Italie par exemple, je roulais un peu avec la peur. Je partais dans les 15 et je passais mon premier tour à me retourner, à regarder où étaient les autres. Au Portugal, je suis passé à côté de mes premiers points en deuxième manche sur une erreur bête. J’ai laissé passer Reisulis et Grau en pensant que c’étaient les leaders, alors qu’ils étaient en fait 21e et 22e. Je fais 22ème et je loupe mon premier top 20. Ensuite, je suis venu faire l’Europe ici en Espagne, et j’ai marqué mes premiers points avec un 24-20. En fin de championnat Elite, c’était un peu de mieux avec une 12ème place de manche à la finale d’Iffendic; mais rien de très concluant.

Tu m’as parlé de tes problèmes au niveau de la main. Est-ce que ça a nécessité des ajustements sur la moto pour s’adapter à ce handicap ?

Non pas du tout. J’ai toujours roulé comme ça. Même au niveau de mon poids, pas d’ajustement. Quand je suis monté en 250, je pesais dans les 45 kilos et avec mon préparateur – Peter Germain de 4.42 suspensions – on a toujours mis un point d’honneur à ne rien changer. On a toujours adapté les réglages de la moto, mais on est toujours resté sur de l’origine, on n’a pas mis de kit cartouche comme certains le font. On est resté avec une moto d’origine, adaptée par Peter. Pour ma main, je n’ai jamais rien changé sur la moto, c’est moi qui m’y suis adapté.

Finalement, il ressemble à quoi ton quotidien aujourd’hui ? C’est 100% moto, ou il y a encore de l’école à côté ?

Je suis toujours scolarisé, je suis en terminale générale dans un lycée en Provence. Là, on va rentrer, je vais tout décharger et tout nettoyer le lundi matin et je vais aller à l’école l’après-midi. Le mardi après-midi j’ai sport et une heure d’italien, je peux aller faire de la moto; sinon je vais nager. Je n’ai pas de cursus aménagé, je vais à l’école toute la semaine. J’ai le mercredi après-midi de libre pour aller faire de la moto. Par exemple, je n’ai qu’une heure de cours le jeudi matin de 8 à 9 donc je vais à la salle, ou je fais de la moto. En général, le vendredi on repart sur des courses et si ce n’est pas le cas, je vais rouler un peu car je finis à 15h.

Paolo est un véritable couteau suisse, et a déjà touché à de nombreuses disciplines

C’est quoi le programme pour 2024 ? On t’a vu toucher un peu à tout; Supercross, sable, Motocross, Europe, Elite; il faut suivre !

J’ai fait du Supercross pour ma première année en 250 en 2022, sur le Pro Hexis. Je roulais très bien à l’entraînement, mais je manquais de lucidité en course; c’était dangereux. Avec mon niveau de débutant dans la discipline, je n’avais pas assez de temps pour faire les enchaînements comme je le voulais; au milieu des autres c’était très compliqué.

J’ai fait ma première course de CFS en 2021/2022 à Grayan-et-L’hôpital et j’ai terminé 16ème. On a décidé de faire le sable l’année suivante pour prendre du gabarit et au fur et à mesure de la saison, ça allait de mieux en mieux. Je termine 11ème à la première et 3ème à la finale au Touquet; je termine 3ème du championnat derrière Nuques et Bajeux. Une première année super cool sur le sable.

Cette année (ndlr: 2023/2024), on partait pour le titre mais j’ai rencontré quelques petits problèmes et ma fin de championnat ne s’est pas passé comme prévu. J’ai gagné les deux premières épreuves, je fais troisième lors de la finale au Touquet et je termine second du championnat. Actuellement, je suis leader de la coupe du monde des sables. J’ai gagné au championnat du monde FIM au Touquet car les deux devant moi ne sont pas classés sur ce championnat, puis je suis parti en Argentine pour la seconde épreuve. Je fais 15ème du scratch et je gagne la catégorie 250; c’était une belle expérience.

Là, on va faire l’Elite, l’Europe 250, championnat du monde des sables. Voilà mon programme 2024. Le Supercross n’est pas ce que je privilégie le plus, j’attends d’avoir un peu plus de gabarit, et aussi d’avoir l’envie de rouler en course dans la discipline.

Quels sont les ambitions et les objectifs sur l’Europe 250 et l’Elite MX2 cette saison, finalement ?

J’ai pris une grosse douche froide le week-end dernier à Basly. Je n’ai vraiment pas fait les résultats espérés. Je n’avais pas la vitesse que je voulais; c’était compliqué. J’aimerais bien aspirer à rouler tout le temps dans les 15 à l’Elite, et essayer de faire des top 10. Ce week-end, j’ai vu que j’avais la vitesse pour jouer dans les 15 sur l’Europe 250 et à la base, l’objectif était de viser les 20 à l’Europe en aspirant à faire de mieux en mieux. J’ai terminé 11ème de la seconde manche en Espagne en ayant été dans le top 10 toute la manche, je me suis fait doubler dans le dernier virage. C’était du positif. Sur le mondial des sables qui reprend en Septembre avec la Weston Beach Race, j’aimerais bien gagner, et décrocher le titre.

Parlons un peu de ce week-end. Tu es super bien parti, tu étais dans les 10 à chaque fois, mais tu as dû abandonner en première manche. Il va aussi falloir que tu me parles de ta moto, parce que tu sors devant sur l’Europe 250 avec des mecs qui ont des missiles entre les mains. Il y a quoi dans ce moteur, c’est de l’origine ?

Non; j’ai un moteur préparé par Jérome Salhi de SR Motorsport. En première manche, je suis sorti 8ème. J’ai fait une bonne manche, en bagarre dans le top 15 tout du long et à 5 tours de la fin, j’ai cassé la chaîne et malheureusement, je n’ai pas pu finir.

En seconde manche, je suis parti quatrième, j’ai assuré mes premiers tours et je me suis retrouvé en 12ème place en fin de manche. J’ai doublé un pilote pour passer 11ème, Karlis Reisulis a cassé dans le dernier tour et je me suis retrouvé 10ème mais … Nico Greutmann m’a doublé dans le dernier virage. J’ai tellement voulu assurer et éviter de faire une bêtise que j’ai ouvert la porte, j’ai pris le virage lentement, et il m’a doublé.

Doublé dans le dernier virage de la seconde manche, Paolo décroche une 11ème place dans la roue de Saad Soulimani, et Nico Greutmann.

Quand on voit que tu peux jouer le top 10/15 sur l’Europe, on se dit qu’on va revoir les objectifs à la hausse ?

Oui et non, car ce week-end j’ai enfin “roulé à mon niveau”. Au France, c’est très condensé, tout le monde roule très vite et il y a beaucoup de pilotes qui ne viennent pas faire l’Europe alors qu’ils auraient largement la vitesse pour jouer devant. En fait, je pense que quand je ferai des tops 10 sur l’Elite, je pourrai viser à jouer dans les 10 régulièrement sur l’Europe. C’est très homogène comme championnat, et les terrains Français sont vraiment différents. Je suis vraiment mieux sur les plus gros terrains de l’Europe 250. Après, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs, ce n’est que ma deuxième “saison” sur l’Europe 250, je n’ai que 17 ans. Arriver à faire dans les 15 régulièrement et aspirer à accrocher un premier top 10 serait vraiment bien. Il faut continuer à partir devant, et surtout bosser sur le physique, car c’est ce qui me manque le plus compte tenu de mon gabarit.

Concrètement, qui t’aide ? Il me semble que tu avais fait un appel aux partenaires sur les réseaux. Tu as un sacré gros programme; on se demande forcément comment tu arrives à joindre les deux bouts.

J’ai un soutien de Kawasaki france via JSL Kawasaki Toulon au niveau des motos. J’ai deux trois aides à côté par des amis de mes parents, j’ai aussi UP Design pour tout ce qui est équipement moto, AGS pour les échappements, etc. J’ai surtout des sponsors extra-sportifs. J’ai fait un appel aux partenaires car l’Argentine représentait un très gros billet. En faisant l’Argentine sans aides, je cramais mon budget pour faire l’Europe 250. À l’heure actuelle, je sais que je ne peux pas faire toute l’Europe 250 car même avec le camping-car, c’est compliqué. La Suède, la Turquie, c’est quasiment sûr que je ne pourrais pas y rouler. Ce sont des déplacements compliqués. J’avais fait un appel aux partenaires pour faire le plus de courses possibles; on est dans une structure privée avec mes parents, et même si j’ai de bons partenaires, c’est toujours compliqué.

Quand on parle de toi, il y a toujours la même question qui revient. Tu dois la connaître à force … Est-ce que Mickael est impliqué, de près ou de loin, dans ton programme ?

Le nom est sympa, car les connaisseurs le reconnaissent. Hier (ndlr: samedi) sur la grille, il y a un ancien pilote qui est venu me parler car il roulait avec mon oncle à l’époque. Mickael était sorti de la moto, il ne s’occupait plus trop de ça. On roulait un peu ensemble de temps en temps, il me donnait des conseils mais il n’était plus vraiment impliqué dans la moto. Il est revenu cette année, et je m’entraîne avec lui pour la partie technique et il m’apporte beaucoup. Moi, je me suis beaucoup entraîné avec Quentin Thomas, qui coache Alexis Fueri, et c’est avec lui que j’ai beaucoup évolué aussi, depuis 2019. Une grande part de mon évolution ces dernières années a été faite grâce à lui, et aussi à Christophe Meyer pour la partie sable. Je dois beaucoup à ces deux personnes-là.

Paolo Maschio “Ce week-end, j’ai vu que j’avais la vitesse pour jouer dans les 15 sur l’Europe”
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