Quentin Prugnières a fait son retour en piste à Arnhem ce week-end. Absent depuis le GP de Lombok², le pilote F&H Racing team signe un retour positif même si les résultats sur le papier ne sont pas ceux ambitionnés. Quentin signe un top 10 en manche qualificative le samedi, et deux manches dans les 15 le dimanche en affichant une bonne vitesse, et un bon rythme. On a été faire un point alors que la fin de saison 2024 pointe le bout de son nez. Ça parle Arnhem, ça parle objectifs, ça parle avenir, contrôles anti-dopage ou encore FFM. Micro.
Quentin. Tu signes un 14-12 en manches à Arnhem pour finir treizième du GP des Pays-Bas pour ton retour en piste. C’est quoi, le bilan ?
Franchement, j’en tire un bilan plutôt positif, parce qu’avec les roulages de cette semaine, je ne m’attendais pas à rouler comme ça.
J’avais une très bonne vitesse en première manche. J’étais en train de revenir sur Langenfelder, et on sait très bien que c’est un bon pilote de sable. C’est juste dommage pour la chute parce que, franchement, c’était une belle première manche. Et puis, même après la chute, apparemment, j’ai quand même réussi à refaire des bons tours, et je me suis battu jusqu’au bout.
En deuxième manche, je pars dans les 10. J’avais un bon rythme au début, mais après un mois sans moto c’était un peu compliqué physiquement à certains moments. Du coup, derrière, forcément, j’ai eu une vague de fatigue qui est tombée, mais j’ai essayé de me battre jusqu’au bout. C’est comme ça. J’en tire quand même vachement de positif parce que j’ai pris du plaisir tout au long du week-end. Même si c’était difficile physiquement, peu importe.
On sait que ce n’est pas le grand prix le plus facile de la saison et, même si les résultats ne sont pas incroyables, le bilan est plutôt positif. J’avais une bonne vitesse et je pense que si on arrive à faire deux manches sans tomber, on peut se rapprocher du top 8 et se rapprocher de mes meilleurs résultats de la saison; c’est quelque chose de possible.
Franchement, c’est plutôt cool car même après un mois sans rouler, j’arrive encore à faire des choses comme ça. Comme je l’ai dit, vu les entraînements de la semaine, je ne m’attendais pas forcément à pouvoir rouler comme ça; donc c’est top.
Tu as fait un excellent départ le samedi en manche qualificative. C’est en roulant devant qu’on apprend … Comment rouler devant. T’en as tiré quoi, comme leçon ?
Lors de cette manche qualificative, j’ai pu tirer des leçons directement pour le dimanche. À certains endroits, j’ai vu que j’avais tendance à être un peu trop sur la retenue par rapport aux autres, à me reposer un peu trop. Aujourd’hui [dimanche], je me suis dit que ce n’était plus le moment de se reposer. Je pense que j’en ai trop gardé sous la pédale pour le dimanche lors de cette qualif’. Et puis, j’ai encore vu des choses dans le sable, c’est bien de voir tout ça. Je ne suis pas forcément satisfait d’avoir fait une marche arrière de deuxième à dixième, mais c’est comme ça. Je suis là pour apprendre. Ça faisait un moment que je n’avais pas pris de plaisir comme ça sur la moto et même si les résultats ne sont pas foufous, encore une fois, la vitesse était bonne. On sait qu’il manque du roulage, de toute façon. Le plus important, c’est d’avancer grâce aux erreurs qu’on commet. Je pense que c’est ce que j’ai fait dans les deux manches, par rapport à la manche qualificative.
Qu’est-ce qu’on a pensé de la piste d’Arnhem et de ce premier virage ? Il avait l’air franchement dangereux.
Pour le premier virage, j’ai trouvé que ça allait. Après, je pense que c’est parce que j’ai fait des départs dans les 10 donc en comparaison à d’habitude, j’ai fait trois bons départs ce week-end. D’habitude, ça passe dans les 15 voir 20 dans le premier virage. Là, j’ai fait des départs qui étaient plutôt corrects. Ça ne m’a pas choqué plus que ça. En fait, c’est surtout le deuxième virage qui était un peu chaud.
La piste en elle-même, je l’ai trouvée vraiment sympa. Je me suis vachement amusé. Il y avait beaucoup de points techniques, beaucoup d’options. On pouvait aller sur les extérieurs car certains étaient plus rapides que les intérieurs. Franchement, j’ai trouvé cette piste vraiment cool.
Tu dis que tu n’as pas fait de moto pendant un mois. Qu’est-ce que tu as fait pendant un mois ?
J’ai continué à m’entraîner physiquement. J’ai pris un peu de recul aussi par rapport à tout ça. J’ai passé du temps avec ma famille. J’ai discuté avec ma famille, avec mon agent, de comment ma saison avait commencé, etc. À un moment donné, je pense que j’étais arrivé à un point où il fallait que je fasse un peu un step-back de mon côté. Aussi pour remettre quelques petites choses en place par rapport à l’entourage, etc. Je pense qu’il y avait un petit step-back à faire. Parce qu’après, on sait comment se passent les Grands Prix. Je pense qu’il y avait un petit tri à faire. J’avais besoin de passer du temps avec ma famille, de régler quelques petites choses. C’est tout simplement ça.
On avait discuté avant le début de la saison. Forcément, le jeune qui arrive en MX2, que ce soit pour toi ou Marc-Antoine Rossi, il y a de l’excitation, beaucoup d’ambition, des objectifs. On peut atteindre ces objectifs, comme ne pas les atteindre. Est-ce qu’on avait mesuré le step, finalement, que ça allait être de monter en mondial MX2 ?
Non. Sincèrement, non. J’ai quand même été surpris du rythme qu’il y avait. Et même encore aujourd’hui. On est à 4 courses de la fin de la saison et ça met encore énormément de rythme; c’est dingue.
Il y a aussi des pilotes de l’Europe qui sont arrivés en cours de saison et ça continue à mettre vraiment du gaz. C’est sûr que les ambitions sont toujours là; c’est clair, net et précis. Mais il faut vachement bosser parce que les autres mecs, ils sont à 200%. Et comme on voit, il y en a qui se blessent, il y en a qui ne tiennent pas la saison. Mentalement, ce n’est pas facile. Physiquement, ce n’est pas facile non plus. Je pense que ce qui fait qu’on arrive à garder le cap toute la saison, c’est de s’amuser sur la moto et de pouvoir garder un minimum de concentration. C’est ce qui aide à être constant sur toutes les courses.
Mes objectifs, personnellement, cette année, ne sont pas atteints du tout. Peut-être que j’ai mis la barre un peu trop haute, je ne sais pas. Mais je m’en suis rapproché quelques fois. Je n’étais pas loin de faire des top 5.
Maintenant, je reprends du plaisir sur la moto. Il manque un peu de physique…. On verra bien; il me reste encore des courses pour atteindre mes objectifs. Je garde la patate. Je garde le sourire aux courses car je pense que c’est le plus important. Un pilote content est un pilote qui va vite.
D’ici la fin de la saison, comme tu dis, il reste 4 Grands Prix. Un objectif que tu aimerais cocher, ce serait quoi ?
Un top 5. Franchement, forcément je vais te dire un podium. Ce serait magnifique pour finir la saison mais après, je reste réaliste. Ça ne sert à rien de se faire des idées, des plans sur la comète mais après, tout est possible.
On a vu qu’il y a eu des faits de course qui ont emmené certains pilotes sur le podium cette année. Mais franchement, de faire deux manches dans un top 5 ou un top 5 à l’overall, ça pourrait déjà être très bien. Ça renforcerait aussi la confiance.
Pour moi, ça serait quelque chose qui serait vraiment bien. Être dans un top 5 à la fin d’une journée, je serais super content.
Il y avait la 250 Bud Racing et maintenant, la 250 F&H. On avait un peu parlé des différences en début de saison. On va refaire un bilan maintenant. Mécaniquement parlant, cette moto te permettrait d’aller chercher ce top 5, tu penses ?
Oui, tout est possible. On avait parlé des motos de Bud Racing la dernière fois, mais encore une fois, il y a une différence de budget entre les deux teams. Bud est un très bon team d’Europe. Ils font avec ce qu’ils ont, et ce qu’ils ont aujourd’hui, c’est une bonne moto.
On voit par exemple que Mathis arrive à performer. Moi, je suis un pilote qui est quand même bien plus lourd que Mathis. Il y a quasiment 10 à 12 kilos d’écart. Je pense que c’est pour ça que tout le monde se dit que cette année, les motos de Bud marchent. Mais ça n’a jamais été un poumon la moto de Bud, c’est simplement que le pilote d’avant était un peu lourd, et il fallait que la moto emmène le pilote.
Aujourd’hui, on est dans un team de MX2 qui a un budget différent, on a une bonne moto, oui. Bud, ça reste un très bon team; je n’en garde que du positif. Même Stephane [Dassé], malgré toutes les personnes qui sont venues mal parler de moi pendant que je n’étais pas là, il a dit des choses super bien sur moi. Il sait comment je suis, c’est super de voir qu’il croit toujours en moi. Être soutenu par ce genre de personnes, c’est plutôt cool parce qu’il a de l’expérience dans le motocross, en MX2, dans le supercross… Voilà, c’est mon petit clin d’œil à Steph !
C’est un milieu qui ne pardonne pas, le motocross.
Non, ça ne pardonne pas. La seule chose qui pardonne, ce sont les résultats en quelque sorte. Si tu fais un week-end de m*rde, la seule chose qui te pardonne, c’est de faire un bon résultat le week-end d’après.
C’est sûr que ce n’est pas un monde facile, et il faut rester accroché. Après, des fois, on a l’impression que la marche est énorme mais en fait, pas forcément. Il suffit que tu arrives à avoir ce déclic et après, ça part tout seul. Sauf que ce déclic, il faut parvenir à le déclencher.
En ce moment, j’essaye de faire un sujet sur les contrôles anti-dopage et c’est compliqué … Par curiosité, tu as déjà été contrôlé que ce soit en Europe ces dernières années, ou cette saison ?
Non, jamais.
Est-ce que ça te surprend ?
Est-ce que ça me surprend ? Pas forcément. Après tu peux forcément commencer à te poser des questions si tu vois tous les pilotes sortir d’une manche en étant morts, et qu’il y a un mec qui est le seul à être en plein forme, avec la patate.
Or, je pense qu’à chaque fois que j’ai fini une manche, je ne vais pas dire que je me suis écroulé sur la moto mais je ressemblais un peu à tout le monde. Tout le monde avait à peu près la même gueule, donc je pense que c’est pour ça. Après, je ne suis pas forcément surpris.
Je pense que s’il y a des contrôles à faire, ce sera plus vers les mecs de devant. Pour l’instant, je ne pense pas avoir atteint le niveau pour que les gens puissent se poser des questions.
Je voulais savoir si le manque de contrôles – en général – te surprenait.
Sur les mecs de devant, parfois oui. Mais après, regarde Jeffrey Herlings. Il s’est fait contrôler bien plus d’une fois et le résultat est ressorti à zéro à chaque fois. Vu qu’ils se disent qu’Herlings ne se dope pas, ils ne vont pas aller chercher plus avec les autres pilotes. Des fois, on voit des trucs bizarres mais bon … ce n’est pas mon problème [rires].
Quand on parle aux «anciens», aux pilotes qui ont la trentaine, ils s’inquiètent assez globalement de l’évolution des grands prix. On voit que c’est de plus en plus compliqué pour tout le monde. Toi, tu viens d’arriver en MX2, c’est quelque chose que tu prends en compte ou qui t’inquiète pour l’avenir ? Est-ce qu’il t’arrive de te demander «Dans 5 ans, ce sera comment pour moi ?»
Aujourd’hui, on va dire que j’ai une vision des choses un peu différente parce que, encore une fois, pendant ce mois de pause, j’ai pu réfléchir à plein de choses et je me dis que je suis encore jeune. J’ai une fine expérience en supercross, j’adore ça.
J’ai 19 ans; je pense qu’il y a plein de choses qui peuvent s’offrir à moi et après, c’est à moi d’aller les chercher. Je suis ouvert aux opportunités. Je pense qu’il y a d’autres opportunités qui s’ouvrent aujourd’hui, ailleurs qu’en GP, mais que les pilotes n’y vont pas forcément. Après, je n’ai pas envie de rentrer dans les trucs de politique par rapport au World Supercross, où on sait que certaines personnes ne veulent pas que les pilotes US évoluent, etc … Moi, je trouve que le WSX, par exemple, c’est une super idée et je trouve un peu dommage qu’il n’y ait pas assez de jeunes qui aient des opportunités pour y aller parce que même en 250, tous les pilotes qui y sont ont quasiment tous plus de 30 ans, ou se rapprochent de la retraite. Ils font ça pour prendre des sous avant d’arrêter. Je trouve ça un peu dommage. Après, c’est un titre de champion du monde à la clef et les pilotes qui y vont, ce sont des mecs qui ont prouvé des choses et qui mettent du gaz; je ne critique pas du tout ça mais c’est un constat.
Je trouve dommage que les promoteurs ne travaillent pas ensemble. Par exemple, si on pouvait allier le World Supercross et le mondial MXGP pour faire un calendrier comme aux US, ce serait top. Et pourquoi pas essayer de concurrencer un peu l’AMA, ce pourrait être intéressant ! Ou même que l’AMA puisse se rapprocher du World Supercross pour faire un vrai championnat du monde de Supercross, ça pourrait être super intéressant même si on sait que certains pilotes n’aiment pas forcément le SX … Le MXGP à sa valeur, le Supercross à sa valeur, et ce serait énorme au niveau du show pour les spectateurs, ça pourrait vachement relancer le sport.
Après, ce n’est que mon avis, c’est mon point de vue. Le Supercross, j’ai toujours trouvé ça top. C’est dans des stadiums, il y a de l’argent à prendre, c’est une belle ambiance, un show, on va au contact; c’est un peu à l’ancienne et je trouve ça beau. C’est ça, la beauté de notre sport pour moi.
Après, pour moi, mon avenir, je vais dire que j’y vais au jour le jour. J’aime rouler en mondial, j’aime le Supercross. Je suis ouvert à toutes les opportunités. Pour l’heure, je me concentre sur le championnat sur lequel je roule et puis après, si j’ai une belle opportunité pour aller en Supercross, pourquoi est-ce que je dirais non ?
Je voudrais avoir un retour de ton expérience avec la FFM depuis tes débuts, et jusqu’à aujourd’hui. Tu as rapidement été l’un des meilleurs Français, donc j’imagine qu’ils étaient là. L’encadrement de la FFM, tu dirais que c’est vraiment quelque chose qui t’a permis de progresser et d’aller de l’avant, ou tu penses que tu en serai quand même là aujourd’hui s’ils ne t’avaient pas aidés ?
Je n’irais peut-être pas non plus jusqu’à dire que ça m’a fait progresser. Moi en tout cas, personnellement, mon expérience avec la FFM a toujours été bonne. J’ai toujours eu de bonnes relations avec les entraîneurs. Je ne suis pas un pilote qui se plains; je ne m’occupe pas forcément des histoires des autres non plus. Je sais qu’il y a des pilotes qui n’ont pas eu forcément la meilleure des expériences, mais moi en tout cas je n’ai rien à dire. Même encore ce week-end, Lucas Bechis et Gautier Paulin ont été là pour me donner des conseils. Or, Lucas c’est l’entraîneur des 125cc et Gautier n’a pas forcément à me donner des conseils parce qu’il est là pour faire son travail, s’occuper des pilotes MXGP et les recruter pour les Nations. À chaque fois, Gautier a pris le temps pour m’expliquer des choses, me donner des traces, me dire de faire telle chose ou telle chose. Personnellement, mon expérience avec la fédération – depuis que je suis en 65cc – a toujours été bonne. Ils nous ont aidés financièrement, jusqu’à aujourd’hui.
Après, je suis un vrai patriote français. Dès qu’il y a des Nations ou quoi que ce soit, je suis partant. J’ai donné ma vie aux nations Européennes l’an dernier pour gagner, et ce sera la même chose pour cette année ! Ce genre de course, c’est vraiment le top. Ça te donne des frissons. Quand l’équipe de France a gagné les Nations de Matterley en 2017 ou 2018, j’ai pleuré comme un bébé.
Je soutiens ce que fait la fédération, parce que dans le passé, on a rencontré des moments compliqués et je pense que si on n’avait pas eu ces petites aides, même si ce n’est pas non plus un truc de fou, ça aurait été encore plus compliqué.