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Ruben Fernandez “J’ai toujours cru en moi”

Images: Thibault Gastaal

Ruben Fernandez – 23 ans – sera coéquipier de Tim Gajser chez Honda HRC la saison prochaine. Le pilote Espagnol s’était révélé au grand jour sur le mondial MX2 en 2021, après avoir rejoint l’équipe Honda 114 Motorsports de Livia Lancelot. Un temps leader du mondial MX2 en début de saison, le garçon terminera finalement la saison 2021 sur le mondial MXGP pour tenter de venir en aide au Slovène dans sa quête du titre mondial. Monté en MXGP à temps plein cette année, Ruben Fernandez s’est rapidement montré comme un prétendant aux podiums de grand prix en parvenant à s’y hisser à deux reprises lors de sa “rookie season”. Armé jusqu’aux dents pour 2023, et désormais pilote Full Factory Honda HRC, Ruben Fernandez n’attend plus que le début de saison pour en découdre et tenter de remplir ses nouveaux objectifs: gagner des manches, et intégrer le top 3 final. Micro.

Ruben, pour commencer. Dis nous. Comment as-tu commencé le motocross ?

J’ai découvert le motocross grâce à mon père. C’était un truc de famille car mon père était pilote et il était bon à son époque, l’un des meilleurs en Espagne; il évoluait au Portugal et même en Argentine. À cette époque, il n’était pas courant de sortir de son pays pour rouler, mais il était d’un bon niveau et il a pu le faire. Mes frères et moi, on avait l’habitude de le regarder lors des courses et un jour, on a pu monter sur une moto et on a adoré ça. Du coup, mon père nous a acheté nos propres motos. On a commencé tous ensemble, mes deux frères aînés et moi. Lors du championnat régional, on était 4 à rouler: mon père, mes frères et moi. C’était vraiment fun.

Quel est ton tracé préféré ?

Je dirais qu’Agueda au Portugal, Matterley Basin en Angleterre et Kegums en Lettonie sont mes trois tracés préférés. Je pense qu’Agueda est mon préféré parce que c’est une piste qui est proche de chez moi et donc beaucoup de fans viennent; j’aime le tracé et la surface et j’aime le Portugal en tant que pays et du fait de ses habitants, donc j’aime bien y aller.

Y avait-il d’autres sports que tu voulais faire, plus jeune ?

Pas vraiment. J’ai essayé beaucoup d’autres sports en grandissant, le basket-ball et le football, des choses comme ça. J’ai même joué pour l’équipe de football locale et je me suis bien amusé, mais depuis que je suis enfant et que j’ai commencé à rouler, j’ai toujours aimé et voulu me diriger vers le motocross. En dehors du sport, il y avait une carrière qui me plaisait: pompier. Ça m’intéressait.

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Lors du mondial Junior 125 en 2015, tu es sorti du lot. Que te souviens-tu de cette épreuve ?

C’était une très bonne course. Je n’avais fait que quatre courses sur l’Europe 125 donc ce type de course, c’était nouveau pour moi; je n’avais jamais vraiment roulé en Espagne. J’ai décroché la pole position lors des qualifications, c’était quelque chose pour moi. J’ai pu faire ma première interview télévisée avec Lisa Leyland. Je ne parlais pas très bien anglais à l’époque, alors on avait dû préparer l’interview avant qu’elle ne commence, mais au final, cette dernière était trop courte, alors Lisa a voulu la rallonger, mais je ne comprenais pas ce qu’elle me demandait et j’ai probablement dit des choses qui n’avaient rien à voir avec les questions.

Ensuite, lors des courses, j’étais à la bagarre pour la victoire. J’ai terminé troisième dans la première manche et quatrième du général. Mais comme je l’ai dit, c’était tout nouveau pour moi, de participer à ce genre d’épreuve, donc c’était une bonne expérience et quelque chose dont je me rappelle avec fierté. Je crois surtout que ça m’a donné confiance, je me suis dit que j’avais ma place à ce niveau.

Tu as dû travailler dur pour gagner ta place, en alternant l’Europe 250 et le mondial 250. Avais-tu des doutes, à cette période ?

Évidemment, j’ai eu des doutes parce qu’il y avait des hauts et des bas, et j’ai connu des moments difficiles. Je ne savais pas vraiment de quoi serait fait mon avenir. Les choses n’allaient pas bien après ma séparation avec F&H, c’était ma première grande équipe et je suis vraiment très reconnaissant envers eux. Mais je ne savais pas ce qui allait se passer par la suite, pour mon avenir. Heureusement, j’ai eu une nouvelle chance sur le championnat européen. C’était un pas en arrière, mais j’ai considéré ça comme une chance de revenir plus fort. Cependant, je n’ai jamais eu la chance de rouler sur une machine compétitive, donc je n’ai jamais eu la chance de montrer mon vrai potentiel. C’était une bataille physique mais aussi mentale. Pour autant, je n’ai jamais abandonné, je me suis toujours dépassé, j’ai essayé de donner tout ce que j’avais pour surmonter ce désavantage. C’était difficile, c’est sûr, mais j’ai toujours cru en moi.

Tu signes ton premier podium sur le mondial MX2 en 2021. C’était comment ?

C’était incroyable ! Comme je l’ai déjà dit, j’ai dû passer par des moments difficiles, mais j’avais changé d’équipe et je roulais sur la Honda cette année-là et c’était la première fois que je me sentais bien avec la moto et que j’étais assez compétitif pour monter sur le podium; je suis arrivé à la première épreuve du championnat après avoir réalisé une bonne préparation hivernale. Monter directement sur le podium, c’était incroyable pour moi, et c’était une excellente manière de commencer la nouvelle saison.

Tu avais la plaque rouge jusqu’à la troisième épreuve en Italie, ça t’a mis la pression ?

C’était une expérience plus qu’autre chose. Je n’avais jamais pensé porter la plaque rouge, et pouvoir la conserver, c’était vraiment dingue. J’aurais aimé la garder plus longtemps, mais en Italie, j’ai chuté dans le premier tour, ce qui m’a fait perdre beaucoup de points ce week-end là. Mais bon, c’était génial de l’avoir sur ma moto et après quelques années difficiles, de signer mon premier podium et ensuite d’avoir la plaque rouge, c’était vraiment du positif pour moi. Je n’ai pas vu la plaque rouge comme une pression supplémentaire parce que j’ai pris beaucoup de plaisir.

Comme beaucoup de jeunes pilotes, tu avais la vitesse, mais tu commettais aussi des erreurs. C’était compliqué de trouver l’équilibre ?

Je crois que j’ai créé ce style de pilotage pour moi, ce style agressif parce que j’essayais de surmonter les désavantages de ma moto, donc je devais donner un peu plus de moi-même pour me battre avec les autres gars qui avaient du meilleur matériel. J’ai dû donner plus, et c’est forcément un peu plus risqué. Quand on flirte avec la limite, les chutes arrivent. Mais maintenant, j’ai appris à être plus intelligent, à mieux me contrôler et je me sens plus à l’aise sur la 450 CR-F. Du coup, ça me permet de me détendre un peu plus et même si j’ai commis quelques erreurs en début de saison, j’ai roulé de mieux en mieux au fil de la saison. L’expérience aide vraiment et permet de faire moins d’erreurs.

Ta carrière en MXGP a très bien commencé fin 2021. Est-ce que c’était tout de même difficile de passer du MX2 au MXGP ?

C’était vraiment difficile, parce qu’un week-end, je disputais une épreuve sur la 250 et le suivant, j’étais déjà sur une épreuve en 450 donc je n’ai pas eu de temps de préparation et je n’ai pas eu le temps de faire les réglages correctement. Rien n’était vraiment réglé comme je le voulais, donc c’était assez difficile, mais d’une certaine manière, la 450 correspondait vraiment bien à mon style de pilotage et je savais que la moto était bonne. Mais, comme je n’étais pas assez bien préparé, j’ai ressenti beaucoup de pression sur mes épaules. J’ai quand même pris du plaisir et je suis content d’avoir eu l’opportunité de le faire et de montrer aux gens ce dont j’étais capable en catégorie reine.

Comment c’était, de monter sur ton premier podium MXGP en Lettonie cette année ?

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C’était vraiment incroyable, même dans la deuxième manche, je me suis fait dépasser un mètre avant la ligne d’arrivée, mais comme je savais que j’étais sur le podium, j’étais vraiment content. Après coup, ça m’a un peu énervé, mais sur le moment, c’était tellement spécial que ça ne m’a pas traversé l’esprit. Gamin, je n’ai jamais vraiment pensé que je monterai un jour sur le podium en catégorie reine. Même en y étant parvenu, c’était encore difficile d’y croire. J’étais très tendu dans cette deuxième manche parce que je savais que c’était possible et c’est peut-être pour ça que j’ai perdu cette position à la toute fin.

Tu as signé un second podium en Indonésie mais tu as chuté en République tchèque, tu devais être frustré.

J’étais en excellente forme, je venais de monter sur le podium en Indonésie, et je me sentais vraiment bien. J’étais le plus rapide lors de la séance d’essais libres et je venais de signer le meilleur tour lors des essais chronométrés, mais je sentais que je pouvais aller encore plus vite et c’est peut-être un aspect que je dois contrôler un peu plus, apprendre à me calmer dans ces moments-là. Je  roulais bien, mais une petite erreur a eu de grosses conséquences. Après quoi, c’était difficile, je voulais remonter sur la moto aussi vite que possible, mais j’ai dû me rendre à l’hôpital. C’était difficile à surmonter et je voulais finir la saison mais je savais que j’avais besoin de faire une pause.

Tu semblais être de retour à ton niveau au Motocross des nations. Vous aviez de bonnes chances de podium, et même de victoire.

J’ai eu un peu de temps pour récupérer avant les Nations; c’était mes premières Nations. Les courses du mondial MXGP étaient très rapprochées et je n’ai pas eu le temps de me préparer correctement, mais pour les Nations, il y avait un peu plus de temps et je me sentais beaucoup mieux là-bas. Même si ça s’est bien passé, j’ai toujours l’impression que ça aurait pu être mieux et je sais qu’il y avait plus à faire, mais c’était quand même un bon résultat pour l’Espagne et je pense que nous avons un bel avenir devant nous et que nous serons capables de monter sur le podium et d’avoir de très bons résultats à l’avenir.

Signer pour le Team HRC, c’est un rêve devenu réalité ?

Bien sûr, c’est un rêve qui se réalise et c’est une belle récompense pour tout le travail et toutes les difficultés que j’ai dû traverser dans ma carrière auparavant, donc je suis excité de commencer la nouvelle saison. Pour l’heure, place au repos, mais j’ai hâte de travailler afin d’assurer que j’arrive en 2023 dans les meilleures conditions possibles.

La relation étroite entre Honda 114 et HRC signifie que tu connais déjà beaucoup des personnes avec lesquelles tu vas travailler en 2023, ça facilite les choses ?

Oui, sans aucun doute. Je connais presque tous les membres de l’équipe et j’ai déjà tissé de bonnes relations avec eux. Je pense que ça fait une vraie différence d’avoir pu entretenir une bonne relation et déjà quand j’étais chez Honda 114, on a pu travailler auprès du Team HRC et j’ai eu le sentiment qu’avec tout le monde chez HRC, ce sera beaucoup plus facile dans les saisons à venir. Je suis espagnol, et beaucoup de membres de l’équipe sont italiens; nous avons une culture similaire, ce qui facilite les choses et me permet d’être à l’aise.

Quels sont tes objectifs pour la saison 2023 ?

J’ai atteint tous les objectifs que je m’étais fixés en 2022, donc maintenant je dois passer à la vitesse supérieure. J’ai signé deux podiums cette année, donc je veux m’assurer que je me batte plus souvent pour les podiums et bien sûr, je vais tenter d’aller signer ma première victoire; mon objectif est de viser le top 3 au championnat. Maintenant, je sais que je dois travailler pour pouvoir y arriver; on verra comment tout se déroulera en 2023.

Un communiqué Honda HRC

Ruben Fernandez “J’ai toujours cru en moi”
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