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Bogdan Krajewski “si je roule à mon niveau, je peux faire quelque chose sur l’Europe”


Intégré à la structure GT Racing Igoa KTM pour disputer sa première saison de championnat d’Europe 250 complète en 2023, Bogdan Krajewski anime également le championnat de France Elite MX2 ces dernières saisons. Du haut de ses 20 ans, Bogdan a décidé de se consacrer à 100% à son sport cette saison et pointe actuellement troisième de l’Elite après un podium signé dans les conditions difficiles de Castelnau-de-Levis. Au retour d’une ouverture de championnat d’Europe compliquée dans le sable de Riola Sardo, on fait le point avec le pilote Lorrain avant l’épreuve de Romagné. Micro.

Bogdan. Tu n’es pas le garçon le plus médiatisé alors pour ceux qui se demandent, c’est quoi ton parcours jusqu’à présent dans la moto ?

Un jour on est passé devant un magasin qui vendait des motos, je suis monté derrière le fils du propriétaire, j’en ai vite voulu une, mon père en a acheté une et ça a commencé comme ça. J’ai débuté la moto a mes 4 ans sur une PW, j’ai commencé par des courses en Belgique en 50cc vers les 5 ans. Ensuite, j’ai fait le Minivert 65, puis le cadet, le junior, puis l’Elite et désormais de l’Europe !

Certains se souviennent de tes perfs’ sur le CFS chez les Juniors. Tu n’as plus ce championnat à ton programme ?

Non. C’est vraiment différent par rapport à l’Elite où même à l’Europe. Maintenant, je suis obligé de rouler chez les “grands” donc ce sont des manches de trois heures. Ce n’est pas dans mon programme pour le moment mais j’en referais peut-être un jour, comme un Touquet par exemple. Là, il faudrait rouler chez les adultes, c’est plus une question d’endurance et ça n’a rien à voir. Ce n’est plus la même préparation hivernale.

Tu as eu l’occasion d’évoluer sur le junior, et sur l’Europe 125. Le niveau est-il comparable selon-toi ?

Non, ça roule bien plus fort en Europe, c’est une certitude. L’Europe est un championnat particulier. Il faut vraiment en faire, être à l’aise sur ce genre de piste car les tracés n’ont rien à voir. Les terrains sont vraiment plus défoncés, les ornières plus profondes, trouées. On n’imagine pas vraiment ce que c’est avant d’y avoir été, mais c’est vraiment plus difficile que le championnat de France. En soi, il faut se préparer en faisant des courses d’un plus haut niveau car ces courses en France ne nous préparent pas trop. Cette année, ça roule tout de même vraiment pas mal devant en Elite mais il y a encore un bel écart avec l’Europe.

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En 2019, Bogdan décrochait le titre chez les Juniors sur le CFS

Finalement, on ne t’a pas vu sur l’Europe 250 en 2020 et 2021. Pourquoi ?

À l’époque, j’étais sur Yamaha pour ma première saison en 250. J’ai choppé un virus – type mononucléose – et je n’ai pas roulé de la saison, mis à part sur le championnat de France des sables en fin d’année. J’avais fait la dernière course du championnat, mais j’étais complètement crevé et je n’arrivais pas à rouler. Pendant 6 ou 8 mois ça a vraiment été la misère. En 2021, j’ai fait l’Elite mais j’avais des problèmes avec les Yamaha et je suis passé sur GasGas, ça s’est mieux passé mais il aurait fallu que je roule tout de suite en GasGas car avec mes motos, c’était vraiment difficile. Je n’étais pas dans les conditions pour rouler sur l’Europe à l’époque. Le changement de Yamaha à GasGas à fait qu’on n’avait pas beaucoup de matériel, plus beaucoup de budget et c’était la galère. Il y avait aussi le manque d’entraînement. En 2022, j’ai eu une proposition d’un team Allemand – AMX -pour rouler au Portugal; j’ai roulé un peu avec eux et ensuite je suis parti sur l’Elite et j’avais bien progressé cette année-là.

Je me demandais ce qu’il s’était passé pour toi parce que la transition 125 – 250 avait été plutôt chaotique. C’est à cause de ce virus en grande partie ?

Je me suis entraîné tout l’hiver en 250, ça s’était bien passé, j’ai choppé ce virus juste avant le début de la saison et je ne pouvais plus rouler du tout. En 2020, j’avais tenté de faire la dernière course de l’Elite à Rauville-la-Place mais c’était impossible, j’étais lessivé. Jusqu’à la première course de 2021, ça a été vraiment compliqué pour moi. En fait, j’ai pu reprendre réellement la moto à l’intersaison 2020/2021 mais ce n’était pas encore vraiment la grande forme, je n’étais pas à 100 %. C’est un peu tombé au mauvais moment, même s’il n’y a jamais vraiment de bon moment pour ça …

Fin 2022, j’avais entendu parler d’un deal avec KMP Honda sur l’ADAC. Ça ne s’est finalement pas fait ?

En fait, après ma saison d’Elite, j’ai eu une proposition pour rouler à L’ADAC et sur l’Europe avec KMP. Franchement, tout était top, j’avais tout ce qu’il fallait mais au final, la moto ne marchait pas très bien. La 250 CR-F avait du mal, ils avaient un contrat avec Öhlins pour les suspensions et c’était compliqué, on n’arrivait pas à les régler, le moteur pêchait beaucoup. J’ai préféré arrêter avec eux car je roulais beaucoup plus vite avec ma GasGas qu’avec leur moto. C’est dommage car tout le reste était vraiment bien, le team était bien structuré mais la moto n’allait pas. À l’époque, je connaissais déjà l’équipe GT Racing KTM, on avait déjà discuté une ou deux fois avec Gilles Torres. Quand je suis rentré de cette course en Allemagne, je lui ai passé un coup de fil pour voir si on pouvait reprendre les discussions. Il m’a dit qu’il serait possible de rejoindre l’équipe et on a dû se débrouiller pour avoir une moto rapidement. J’ai eu une semaine de préparation avec la KTM et on a été sur l’Europe 250 à Saint Jean. C’était un peu “just” !

Bogdan a fait une pige sur l’ADAC avec KMP Honda en 2022 @DR

Dernièrement, on discutait des opportunités qui s’offraient aux pilotes roulant devant sur l’Elite avec Jimmy Clochet. Il disait qu’il était plus intéressant pour un jeune qui voulait évoluer au plus haut niveau de se faire repérer sur l’ADAC ou le Dutch Masters qu’en Elite; tu partages ce constat ?

Oui je partage ce constat. Pour rouler sur l’ADAC, il faut déjà être dans un team, et par la suite, tu peux espérer intégrer une équipe encore meilleure. Ça roule également plus fort sur l’ADAC et le Dutch Masters qu’en championnat de France.

Au sein de l’équipe GT Racing Igoa KTM, comment est structuré ton programme ?

Je me suis bien entraîné avec Lisandru – le fils du manager – pendant l’hiver. Je suis allé pas mal de fois chez eux. J’ai aussi bossé avec Anthony Boissière même s’il a désormais tourné la page de l’entraînement moto. Au niveau des courses, vu que ça s’enchaîne beaucoup, je roule un peu par chez moi et avec l’équipe, on se rejoint sur les épreuves. Dès qu’on aura un peu plus de temps entre les courses, je retournerais chez eux pour rouler. Pour l’heure, c’est moi qui gère mes motos, qui les amènent sur les courses. On n’a pas encore de mécanicien et c’est moi qui m’en occupe. J’ai tout avec moi, c’est plus simple que de devoir faire des allers-retours sur les épreuves de l’Europe, je préfère tout avoir et tout amener moi-même sur les courses.

Finalement, qu’est-ce ça change pour toi par rapport à un programme privé comme en 2022 ?

C’est beaucoup mieux. Gilles m’aide sur tout, avec les motos, avec les tenues et les pièces, il m’apporte tout le matériel. On a des lignes, des moteurs, de bonnes suspensions, tout ce qu’il faut. Il s’occupe de tout le côté logistique. Pendant l’hiver, j’ai l’occasion d’aller m’entraîner avec eux et le jour des courses, il y a la structure, la semi-remorque, tout ce qu’il nous faut pour être dans de bonnes conditions le jour de la course. On est plus structuré, c’est plus professionnel et c’est vraiment plus simple. Si j’ai besoin de quelque chose, je demande et le team me donne ce dont j’ai besoin. Avant, je devais courir partout pour avoir des pièces et du matériel. C’est un énorme gain de temps également.

Un nouveau podium sur l’Elite à Castelnau pour le pilote Lorrain @Elite Motocross

C’est tout frais, l’ouverture de l’Europe à Riola Sardo. 17-22. Ça s’est passé comment ?

Ça ne s’est pas bien passé. Je me suis rendu compte que je me suis beaucoup entraîné dans la terre cet hiver et pas assez dans le sable. Niveau vitesse, ce n’était pas fou même si j’ai pris de bons départs. Physiquement, j’étais complètement mort. La technique, ça allait, mais il manquait du roulage et des manches dans le sable. Physiquement, j’arrive à tenir mes manches sur la terre comme à l’Elite par exemple mais dans le sable, c’est beaucoup plus fatiguant. J’en tire des leçons, je vais faire plus de physique à côté de la moto pour que ça ne se reproduise plus.

Pas de positif à tirer ? Tu mets quelques points.

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Non, j’aurais été content si pour la première de l’année, je faisais dans le top 10, c’était ce que je voulais faire. Je ne me donne jamais trop d’objectif et je fais toujours du mieux que je peux mais c’est sur qu’en faisant 17ème, j’ai du mal à être content.

Qu’est-ce qu’il s’est passé pour toi à Lacapelle-Marival pour l’ouverture de l’Elite ?

Pas de bol. Dans la nuit du samedi, à 3h du matin, je me suis levé pour vomir. Je pensais que c’était le stress. J’ai vomi toute la nuit, sur le trajet pour aller jusqu’à la piste, et toute la journée entre les manches. J’avais la gastro et évidemment j’ai super mal roulé. J’étais au plus mal, dégouté, et j’ai même failli ne pas rouler. J’ai tout de même pris quelques points, mais ça fait chier. C’était une ouverture pourrie à oublier. Pour la seconde épreuve, à Castelnau, j’étais en meilleure forme par rapport à Lacapelle et j’ai pu prendre de bons départs. C’était beaucoup mieux avec une deuxième place et à Romagné, on va faire encore mieux.

Tu as bien rebondi à Castelnau dans des conditions difficiles. Pierre est un garçon qui avait été chatouiller le top 10 en MX2, Quentin est un des favoris sur l’Europe. Réussir à rouler avec eux en France montre que tu aurais aussi ton mot à dire sur l’Europe, il ne reste plus qu’à concrétiser ?

C’est sûr que si je roule à mon niveau, je peux faire quelque chose sur l’Europe. C’est pour ça qu’il faut que je m’entraîne dans le sable car il y a beaucoup de pistes sablonneuses sur le championnat d’Europe 250 cette année, il va falloir que je m’entraîne bien physiquement et sur la moto. Si je réunis ça, ce sera possible de faire quelque chose.

Le pilote GT Racing Igoa KTM est actuellement troisième de l’Elite MX2 après deux épreuves

Jusqu’à l’an dernier il me semble que tu suivais un cursus scolaire. Tu as décroché un diplôme et tu t’es lancé dans le sport à 100% cette année ?

J’ai passé mon bac, et désormais je roule à temps plein. Mes parents ne voulaient pas que j’arrête les études avant, j’aurais probablement plus progressé si je m’étais consacré exclusivement à la moto mais j’ai continué jusqu’au bac et de là, ils m’ont dit que je pouvais me consacrer à la moto à 100% cette année, et c’est vraiment top.

Ça ressemble à quoi une journée type aujourd’hui, dans la vie de Bogdan ?

Jusqu’à maintenant, c’était un peu de physique, un peu de moto, c’était peu structuré. Là je me suis préparé un vrai programme physique car j’ai été vraiment dégoûté de voir que j’étais mort physiquement à Riola. On va faire beaucoup de sport, et beaucoup de moto. Niveau coach, je travaillais avec Anthony Boissière mais il a arrêté et pour le moment, je n’ai pas d’autre entraîneur. Je roule un peu tout seul, ce n’est pas trop un choix mais autour de chez moi – vers Nancy – il n’y a pas beaucoup de pilotes pour me tirer vers le haut donc c’est compliqué.

À l’heure d’aujourd’hui, un pilote comme toi qui roule devant sur l’Elite et qui essaye de performer sur l’Europe, il est aidé par la fédération ?

Non. Je suis aidé par la ligue, mais pas par la FFM. En 2023, j’ai récupéré le statut de sportif de haut niveau qu’on m’avait enlevé lors des années précédentes, surement à cause de mon année d’absence en 2020 après avoir contracté ce fameux virus.

Bogdan Krajewski “si je roule à mon niveau, je peux faire quelque chose sur l’Europe”
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