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Harri Kullas “Je me suis un peu surpris, mais je savais que c’était possible”


Harri Kullas a fait partie de la vague d’Européens qui ont traversé l’Atlantique pour tenter leur chance sur quelques épreuves du championnat d’outdoor US, et le pilote Estonien est également le pigiste ayant ramené le meilleur résultat de la saison en terminant 6ème à Unadilla et ce, dès sa première course de la saison sur le sol Américain. Pilote Cab Screens Crescent Yamaha en Angleterre, pigiste sur le GP de Lommel, sélectionné pour les prochaines nations d’Ernée, le globe-trotteur Harri Kullas s’est prêté au jeu de l’interview pour nous raconter son expérience aux USA cet été. Micro.

Harri. Pour débuter, on est en mesure de se demander pourquoi – après avoir roulé en GP mais aussi sur la moitié du globe – tu as dû attendre aussi longtemps avant de tenter l’aventure Américaine ? Qu’est-ce qui a fait que cette année, c’était la bonne ?

Il y a cinq ans de ça, j’avais tout organisé pour aller rouler aux US que ce soit au niveau de la moto, des hôtels, des billets d’avion mais je me suis fracturé les vertèbres et je n’avais pas été en mesure de m’entraîner correctement donc je ne voulais pas aller aux USA en n’étant pas à 100%. Après ça, je me suis toujours battu pour le titre sur le championnat Britannique puis le Covid est arrivé. À la mi-saison, on s’est rendu compte que je n’étais plus vraiment en mesure de jouer le titre sur le championnat Anglais donc mon équipe a été d’accord pour que je puisse suivre l’un de mes rêves, et c’est ce que j’ai fait. Je me dois de remercier le boss de mon équipe et le staff du team Cab Screens Crescent Yamaha de m’avoir prêté un paquet de pièces et de m’avoir autant soutenu. Merci à Luc Myre & Tarvo Jurima qui m’ont aidé de l’autre côté de l’Atlantique. Également, un merci supplémentaire à Jukka Pekkarinen, Kenomer, Valley Developments, Tim Chambers, Palms, SP Landscapes, Korjaamo S&V Varis, Reio Engman & Ermo Veltson !

J’imagine que tu avais des attentes, mais décrocher une sixième place à Unadilla, c’était une petite surprise pour toi ? Tu as fait une première épreuve de dingue avec un 7-7 en manches.

Évidemment j’étais un peu sous pression mais aussi bien stressé pour la première épreuve car c’était un nouveau championnat, avec de nouvelles règles, et je ne savais pas trop comment la moto allait réagir. J’ai tenté de faire en sorte que tout se déroule du mieux possible, pour ne pas trop avoir à m’inquiéter du résultat. Tout s’est bien passé à Unadilla, j’ai pu rouler lors de la journée de presse du vendredi, ce qui m’a vraiment beaucoup aidé vu que c’était un nouveau tracé pour moi. Avec 90 pilotes engagés, le premier objectif est déjà de se qualifier pour les courses. Une fois que je me suis qualifié, j’ai pris deux bons départs dans les deux manches en partant second. J’avais vraiment un bon rythme et un bon flow et j’ai terminé septième dans les deux manches, je me suis un peu surpris, mais je savais que c’était possible si tout se passait bien; mais peut-être que je n’attendais pas à ça dès la première épreuve !

Tes départs étaient incroyables à Unadilla. Un paquet de préparateurs moteurs ont dû se tirer les cheveux ce jour-là. Concrètement, tu avais quoi sur cette moto pour ces 3 rounds ?

En ce qui concerne la moto, les pièces les plus importantes que j’ai prises avec moi, c’était un ECU et une sortie Akrapovic. Autrement, j’avais une 450YZ-F avec un moteur d’origine. La moto est assez puissante pour s’en sortir face aux pilotes factory. En Angleterre, j’ai un moteur un poil plus puissant mais peut-être que je devrais songer à retourner sur un moteur d’origine [rires]. On a dégoté des pneus Pirelli aux USA. J’avais aussi mon amortisseur et ma fourche avec moi et quelques autres pièces pour avoir le même feeling que sur ma moto en Angleterre, comme mes tés de fourche, mon guidon RFX, mes poignées ODI, mes disques de frein Moto Master, mes filtres à air DT1, mes leviers et mon kit déco fait par GP Grafix. Autrement, le reste était d’origine.

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Peu de garçons ont réussi à sortir devant Jett Lawrence au départ cette année. Harri Kullas y est parvenu, et avec un moteur stock ! @Align Media

Tom Vialle roule aux US désormais. Il a avoué avoir eu beaucoup de mal avec le peu de temps accordé aux pilotes pour apprendre les tracés pendant les essais. C’est quelque chose qui t’a posé problème à toi aussi ?

En réalité pour moi, ça a été. Évidemment, et vu que j’ai été en mesure de rouler à chaque journée de presse le vendredi avant l’épreuve lors des 3 épreuves, ça m’a aidé. J’ai pu rouler sur 90% des tracés le vendredi, avant d’attaquer les qualifications du samedi. Les tracés sont tellement bien préparés qu’il n’y a pas vraiment de surprise. Tu peux envoyer les sauts et prendre les virages à la bonne vitesse dès le second tour. Je ne pense pas que j’aurais décroché de meilleurs résultats si j’avais passé plus de temps en piste lors des essais.

Tu termines 12ème à Budds Creek avec un 12-12 en manches. Ce round a été plus difficile pour toi; que s’est-il passé ?

Oui. Mentalement, je m’étais préparé pour rouler sur un terrain de sable et du coup, mes réglages moto n’étaient pas bons à cause de ça. Je n’étais pas vraiment confiant dans les virages, et j’ai fait de mauvais choix au niveau de mes pneus. J’ai tout de même pris du plaisir en pilotant mais bon, les résultats n’étaient pas aussi bons qu’à Unadilla. J’ai un peu loupé mes départs et en première manche, j’ai rencontré des petits pépins avec mon embrayage dans les premiers virages et c’est pourquoi je suis sorti très loin, hors du top 20. Le terrain était vraiment piégeux mais ça reste une épreuve sur laquelle j’ai été solide, car je me suis battu aux portes du top 10 à la fin de chaque manche.

Tu as terminé 10ème à Ironman. Tu as fait les mêmes épreuves que Justin Barcia et tu as marqué autant de points que lui au championnat. Est-ce que certains de ces mecs sont venus te voir pour savoir qui était l’Estonien qui leur bottait le cul ?

Oui, j’ai parlé à quelques gars sur les courses et certains étaient surpris de voir le programme avec lequel j’évoluais ! 

Comment comparerais-tu le niveau AMA avec le niveau des GP, mais aussi avec ton championnat National en Angleterre ?

Le haut du panier est vraiment très rapide aux USA et en mondial, je dirais que le milieu de paquet est un peu plus rapide qu’aux US. Une fois encore, ce sont des championnats différents, des tracés différents donc ce n’est pas simple de comparer. En Grande Bretagne, on a de très bons pilotes qui savent rouler vite, surtout en terre Britannique.

Harri Kullas est l’un des incontournables globe-trotteurs Européens. Le garçon a fait tourner quelques têtes aux US cet été et a même décroché un ticket d’entrée pour les LCQ du SMX, en seulement 3 rounds ! @Align Media

Qu’est-ce qui t’a le plus surpris aux US ?

De voir à quel point l’organisation était relax’, de voir comment ils parlaient et écoutaient les pilotes pour toujours s’assurer de s’améliorer et de rendre leur championnat encore meilleur.

On doit aussi parler de Lommel. Tu as fait une pige et tu as terminé 11ème du GP de Belgique en battant quelques pilotes factory. On peut dire que tu es dans l’une de tes meilleures formes de carrière cette année ? Tu le ressens comme ça ? Tu es au top et ce, peu importe où tu roules.

Je ne dirais pas que je suis dans l’une de mes meilleures formes. On a eu beaucoup de travail à abattre sur la nouvelle moto et vu qu’on est un petit team, on n’a pas toujours les pièces qu’il nous faudrait. Ça nous a pris vraiment beaucoup de temps avec l’équipe et pour moi, en tant que pilote, ça devenait parfois très stressant. J’ai loupé pas mal d’entraînements, et pas mal de courses. Je travaille dur tout le temps, j’aime ça, et je sais que sans travailler dur, ce n’est pas possible. J’ai été en mesure de rassembler toutes les pièces du puzzle sans trop rencontrer de problèmes en GP comme aux USA cette année. J’ai tout de même rencontré des petits pépins en première manche à Lommel. J’ai déjà signé de bons résultats en GP par le passé mais ce n’est pas toujours simple quand tu ne fais que quelques épreuves de ramener les résultats sur le papier quand tu évolues aux côtés de pilotes qui font ça chaque semaine.

Faire une saison complète sur l’outdoor US avant que tu ne décides de raccrocher, c’est quelque chose que tu considérerais ?

Je suis ouvert à tout. Ce serait vraiment une bonne chose de pouvoir faire une saison entière en Motocross aux USA avant que je ne prenne ma retraite.

Après 3 épreuves, tu es 34ème du championnat SMX. On sait que quelques pilotes ne seront pas là et tu pourrais très bien avoir ton ticket d’entrée pour les LCQ du championnat. Si l’opportunité se présente, quelles sont les chances de te voir t’aligner sur le championnat SMX ces prochaines semaines ?

En fait, je me suis qualifié pour les LCQ du SMX. J’ai reçu un email de l’AMA après Ironman donc de là, on a commencé à regarder les options qui s’offraient à nous. J’ai discuté avec un team aux Etats-Unis, j’ai parlé aux gars qui m’avaient aidé à faire ces trois épreuves sur l’outdoor et on a aussi regardé s’il était possible de le faire avec nos propres moyens en prenant une remorque, en achetant une moto et en traversant le pays de cette façon. C’était un peu trop à mettre sur la table sur le plan financier et je devais prendre une décision le vendredi après Ironman. On n’a pas pu trouver de solution à temps. L’an prochain, j’espère !

Le team Estonien n’a pas encore été officiellement annoncé pour les nations, mais j’imagine que tu es partant pour une nouvelle sélection à Ernée en octobre ?

D’ici à ce que tu publies cette interview, je pense que l’Estonie aura annoncé son équipe ! Donc je suis évidemment très heureux de rouler de nouveau au Motocross des nations cette année, pour la 13ème fois ! Evidemment, Tanel Leok sera mon coéquipier donc on dirait bien que je ne risque pas de battre son record car il semblerait qu’il n’ait toujours pas prévu d’arrêter de rouler [rires].

[NDLR: Jorgen Matthias Talviku sera le pilote MX2 de l’équipe Estonienne aux nations, aux côtés d’Harri Kullas et Tanel Leok]

Depuis, Harri Kullas est rentré au bercail et a déjà retrouvé son championnat national en Angleterre @DR

Harri Kullas “Je me suis un peu surpris, mais je savais que c’était possible”
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