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Jeremy Seewer “cette année, il y a eu du très bon et du très mauvais”


En terminant quatrième de la seconde manche de Maggiora, Jeremy Seewer ne pensait pas avoir victoire d’épreuve en poche, et pourtant. En Italie, l’officiel Yamaha a signé son troisième succès de saison mais le pilote Suisse n’a pas vraiment réalisé la saison 2023 escomptée. Victime d’une grosse chute en Argentine dès la première épreuve, Jeremy Seewer a enchaîné les galères et a dû patienter jusqu’à la seconde moitié de saison pour se sortir de sa mauvaise passe. Alors que le garçon dispute ses toutes dernières courses en bleu avant de rejoindre Romain Febvre chez Kawasaki KRT, il répond à nos questions. Micro.

Jeremy, ça a dû être un week-end spécial pour toi en Italie. Tu signes une troisième victoire de GP cette saison avec un 2-4, c’est assez inhabituel de gagner un GP de cette manière là.

C’était un week-end très spécial. En temps normal, tu montes tout juste sur le podium avec un 2-4 et ce week-end, je gagne avec ces résultats. Il faut aussi prendre en compte ce qu’il s’est passé pendant les manches mais c’est comme ça en Motocross. Cette victoire, je la prends. Cette année, j’ai souvent terminé au pied du podium quand ce genre de situation se présentait, j’ai terminé 4ème fois à quelques reprises, je suis aussi passé à côté de quelques victoires de grands prix et ce week-end – et pour une fois – la chance était de mon côté. On va dire que ça fait la balance chance/malchance. Je ne suis pas très content de gagner de cette façon, mais je suis content de mon pilotage surtout après ce qu’il s’est passé samedi matin. J’ai chuté vraiment fort, je me suis pris un gros trou que je n’avais pas vu dans la boue et je suis tombé vraiment très fort. Je me suis ouvert le bras; le week-end ne débutait pas bien et c’est toujours difficile de remonter la pente dans ces conditions donc au final, je suis content de mon grand prix d’Italie.

Vous avez rencontré des conditions vraiment différentes ce week-end. Un samedi dans 20 cm de boue, un dimanche assez sec. Comment on s’adapte aussi rapidement quand les conditions sont aussi différentes d’un jour sur l’autre, que ce soit sur la piste, ou même au niveau des réglages de la moto ?

Le plus gros des ajustements, c’est le pilote qui les fait. Bien sûr, on fait quelques petits trucs sur la moto au niveau des pneus, des suspensions, des trucs ici et là mais au final, c’est plus au pilote de s’adapter aux conditions. On a rencontré des conditions différentes le samedi et le dimanche c’est certain, mais Maggiora est l’un des circuits de la saison qui accepte le mieux la pluie car il y a beaucoup de dénivelé. La pluie s’écoule et stagne en bas des montées et les organisateurs peuvent s’en débarrasser ensuite. Le samedi, vu toute la pluie qui s’est abattue, on a eu vraiment de la chance de pouvoir rouler; il y avait quelques traces. C’était difficile de doubler, mais c’était pareil pour tout le monde.

Le dimanche, c’était vraiment différent; on a évolué sur un circuit très sec, on a retrouvé le Maggiora de d’habitude. C’était un peu plus simple que d’habitude parce qu’avec les conditions météo, ils ont vraiment dû refaire beaucoup de portions de la piste pour s’assurer que tout se passe bien. C’est pourquoi en seconde manche, c’était un peu le petit train train, personne ne pouvait réellement faire la différence. J’ai gagné le GP après tout, donc je ne me plains pas [rires].

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Il reste un GP; c’est quoi le bilan de cette saison 2023 ? J’imagine que tu n’as pas connu le début de saison que tu espérais, un peu comme l’an dernier d’ailleurs. Tu as lourdement chuté en Argentine, il t’a fallu du temps pour revenir à ton juste niveau et de là, tu as gagné trois grands prix.

Si je dois évaluer la saison dans sa globalité, je dirais que cette année, il y a eu du très bon et du très mauvais. Déjà, on a dû parvenir à faire marcher la nouvelle moto correctement et ce n’était pas simple à l’intersaison. 

Avant cette chute en Argentine, je sentais que j’avais atteint un niveau que je n’avais jamais atteint auparavant. J’étais vraiment en forme, on avait trouvé des solutions et finalement la moto fonctionnait plutôt bien, j’étais prêt à me battre mentalement et cette chute est arrivée. C’était une chute aussi étrange que malheureuse. J’ai un peu perdu confiance après ça et ça a été un vrai revers pour moi, même si j’ai eu de la chance de me relever sans me blesser. Après ça, j’ai un peu galéré.

Lors du troisième GP en Suisse j’ai tapé assez fort au niveau de la tête, ce n’était pas une commotion cérébrale trop méchante mais j’ai dû prendre deux semaines de repos, j’ai dépensé beaucoup d’énergie pour retrouver la forme et les problèmes ne s’arrangeaient pas, j’ai lutté contre pas mal de petits pépins et de là, on a commencé à rencontrer des problèmes sur la moto. Ça s’enchaînait un peu. La moto était nouvelle, on ne connaissait pas grand-chose, et ça prenait plus de temps de résoudre certains problèmes. Pendant quelques épreuves, on avait presque tout contre nous, mais on a dû faire avec. Il fallait sortir du trou et j’y suis parvenu même si les gens ont tendance à dire que je suis toujours un peu en retrait en début de saison. Cette année, ce n’est pas comme ça que j’ai ressenti les choses; j’ai gagné les premières courses d’intersaison sur l’international d’Italie, j’étais rapide, présent, prêt à me battre en début de saison mais finalement, ce n’est jamais arrivé.

J’ai beaucoup appris de cette année et ça va me servir pour le futur. J’ai retrouvé la forme et ce n’est pas simple car mes concurrents ne se reposent pas sur leurs lauriers, tout le monde essaie de s’améliorer – comme moi. Là, je gagne mon troisième GP, c’est toujours un sentiment incroyable de gagner même si je ne suis pas champion du monde, ce qui reste le but ultime pour beaucoup de pilotes. Gagner des GP, ça te procure quand même de bonnes émotions, tu rentres chez toi satisfait; c’est pourquoi on vient ici, et on fait ça. J’essaie de profiter de ces moments-là et je vais tenter de réitérer la performance ce week-end à Matterley.

On a parlé de cette chute en Argentine. Tu n’as pas loupé un seul grand prix depuis 2014. Tu détiens un gros record de GP consécutifs. Certains pilotes doivent se demander c’est quoi, le secret de Jeremy Seewer …

Il n’y a pas de secret. Je travaille dur tous les jours, je ne sais pas [rires]. Je pense qu’il y a un peu de chance, d’instinct aussi. En Motocross, tout le monde tombe, même les meilleurs. Certains pilotes tombent plus, d’autres moins, mais on chute tous. C’est plus la façon dont tu tombes, comment tu approches la chute, comment tu chutes, la position que tu adoptes quand tu chutes. Tu ne peux pas vraiment t’entraîner à ça, tu réagis à l’instinct sur le moment. Selon moi, c’est aussi lié à l’aspect physique. Les gars plus grands et plus lourds sont désavantagés face à la chute en comparaison avec un gars comme moi, plus petit, plus léger. Il y a beaucoup de facteurs mais je ne vais pas me coucher le soir en pensant à ça. J’essaie juste de ne pas tomber, de ne pas me retrouver dans des situations trop compliquées. Mon but, ce n’est pas de participer au plus grand nombre de GP consécutifs; mon but, c’est de gagner les grands prix ! Cette statistique est cool et peut-être que personne ne battra ce record, mais je n’y prête pas trop attention. En fin de compte, ça ne m’apporte pas grand-chose [rires]. Je crois que j’en suis à 180 GP consécutifs, je ne suis pas certain, 170, 180, par là.

Tu changes de couleurs à la fin de l’année. Tu avais besoin de souffler un coup et d’essayer autre chose pour 2024 ?

Honnêtement, il y a eu quelques facteurs qui m’ont fait prendre cette décision. Pour l’heure, je veux simplement me concentrer sur ma fin de saison en bleu, je ne me soucie pas de la couleur de la moto qui est sous moi en ce moment. Je veux juste gagner que ce soit sur du bleu, du rouge, ou même du vert. Peu importe pour moi. Pour l’heure, je me concentre simplement sur les prochaines courses: Matterley Basin et les nations d’Ernée et de là, le futur sera différent pour moi. Concernant la décision, on pourra faire une interview pour en parler après la fin de saison. Il s’est passé certaines choses, je suis content d’avoir pris cette décision, et j’ai hâte d’y être !

Vous avez une belle équipe pour les nations cette année. Quel est l’objectif ?

Je pense qu’aller chercher un top 5 doit être notre objectif. C’est un objectif réaliste. Si tout se passe bien, si Arnaud [Tonus] est dans un bon jour, si je suis dans un bon jour et que Valentin est dans un bon jour, je suis sûr qu’on pourra faire quelque chose de bien. Pour l’heure, je ne me mets pas trop la pression, cette course est là pour nous permettre de finir la saison d’une bonne manière, et de se battre contre les meilleurs pilotes. C’est toujours cool de voir les Américains venir, et aussi les Australiens avec Jett et Hunter.

Jeremy Seewer “cette année, il y a eu du très bon et du très mauvais”
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