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Marc-Antoine Rossi “je me donne à fond pour réussir”

Images: VRT KTM / MX July

Intégré à l’équipe VRT KTM Factory Juniors à l’intersaison, Marc-Antoine Rossi – 16 ans – s’apprête à prendre part à sa première saison en championnat d’Europe 250. Auteur de belles performances sur l’Europe 125 en 2021 & 2022, le pilote Corse attaque la saison 2023 en confiance après avoir montré de belles aptitudes sur l’international d’Italie, tout comme à Lacapelle-Marival où il s’adjuge la cinquième place à l’occasion de l’ouverture du championnat de France Elite. Micro. 

Marc-Antoine, il y a bien longtemps qu’on n’avait pas discuté. Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’aimerais aborder tes saisons sur l’Europe 125. On a vu du bon, du très bon, du moins bon. Avec le recul aujourd’hui, quel regard portes-tu sur ces saisons 2021 & 2022 ?

Ma première saison a été vraiment importante. 2021, c’était une belle première saison en championnat EMX pour quelqu’un qui n’avait jamais fait des courses de l’Europe. La deuxième saison – 2022 – a été un peu gâchée. J’ai loupé pas mal de courses, je me suis blessé en fin de saison; j’ai quand même signé de bons résultats mais je ne roulais pas tout le temps a mon niveau. J’ai eu pas mal de soucis en milieu de saison, je me suis beaucoup remis en question mais finalement, je me suis réveillé quand KTM est venu m’aider après Teutschenthal, j’ai développé la nouvelle 125 à injection et j’ai fait quelques courses pour eux sur l’ADAC. J’ai fini par me blesser à Uddevalla mais ce revirement m’a bien motivé et de là, j’ai signé avec VRT. Cette dernière saison m’a aidé à me forger. La première saison d’EMX125 était belle, la seconde un peu moins, mais je n’ai pas de regrets.

2021, c’était l’année de la découverte. En 2022, je savais déjà comment ça se passait et j’étais là pour gagner, mais je n’ai pas réussi à tout mettre en place pour. En fait, je n’avais pas encore vraiment conscience de ce qu’était le haut niveau, et tu finis par le comprendre quand tu te prends une grosse claque comme celle que j’ai prise. J’ai limite fait des moins bons résultats qu’en 2021 mais au final le classement en fin de saison reste le même, je termine dans les 10, en loupant beaucoup de manches. Ça reste un résultat correct vu le nombre d’épreuves loupées, mais il n’y avait pas assez de régularité.

Fin 2022, le pilote Corse faisait une pige sur l’ADAC avec Sturm Racing, qu’il remportera @Sturm Racing

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Il y a eu cette séparation à la mi-saison 2022 avec Tech 32, avant que tu ne te débrouilles par tes propres moyens avec le soutien de KTM. Qu’est-ce qu’il se passe, à ce moment-là de la saison ?

C’était une période assez floue. Je n’ai pas décroché les résultats que j’espérais. La séparation avec Tech 32 n’était pas prévue mais c’était comme ça. Moi, je ne me sentais plus à l’aise, je n’étais pas au meilleur de ma forme. Après la séparation, j’ai soufflé un coup et de là, KTM m’a passé un coup de fil pour aider au développement de la nouvelle 125. On a fait quelques entraînements et ils m’ont proposé de rouler sur l’ADAC. Ça s’est bien passé et de là, ils m’ont proposé de finir l’Europe 125 en me passant des motos. Je devais faire les courses avec mes parents et mon camion. C’était une bonne période car je n’avais plus de stress, je roulais décompressé comme je savais le faire et ça se passait plutôt bien. J’ai gagné sur l’ADAC et j’ai bien roulé à Uddevalla même s’il y a eu cette chute.

Plus d’obligations de résultat, moins de pression ?

Ce n’était pas tant les obligations de résultat, c’était une période étrange. En fait, je roulais pour moi, personne n’était derrière moi, ça m’a fait du bien.

Fin 2022, après Uddevalla et avant de signer avec VRT KTM, tu te demandais comment ça allait se passer pour toi en 2023 ?

Franchement, après la séparation avec Tech 32, je n’étais même pas sûr de finir la saison d’Europe en 125 car je voulais monter en 250 pour me préparer pour 2023. Je ne savais pas où j’allais finir, mais je voulais rester chez KTM car je sais qu’ils font vraiment les choses bien pour les jeunes, ils ne les lâchent pas. C’est top ce qu’ils font et je voulais rester chez eux pour avoir un suivi et c’est de là que j’ai signé avec VRT KTM Factory Juniors.

@VRT KTM/MX July

Rouler pour une équipe officielle KTM, comparativement à tes expériences précédentes, ça change la façon d’aborder la préparation & la saison ?

Il n’y a pas photos. Ça m’a fait un bien énorme. Même aujourd’hui, j’ai le sentiment de progresser tous les jours, je suis encadré, tout est réglé, tout se passe au top avec Mickael [Vrignon], Pierre-Alexandre [Renet] et tous les mécaniciens. Tout est bien planifié au niveau des entraînements et du sport; l’an dernier ce n’était pas la même dynamique, c’était assez vague. Je n’avais pas d’entraîneur l’an dernier, à part en fin de saison où j’ai travaillé avec Steven Frossard avec qui ça s’est très bien passé. Là, je suis vraiment suivi et ça aide vachement, il n’y a pas tous les problèmes à gérer. En fait, tu peux faire le travail de pilote, tu n’as pas 15.000 trucs à penser.

Concrètement, elle a ressemblé à quoi cette intersaison ? Il y a eu la blessure au pied fin 2022, tu as repris en février sur l’international d’Italie. Entre cette période, il fait quoi, Marc-Antoine ?

J’ai dû me faire opérer de la cheville, l’opération s’est bien passée et je me suis vite remis, j’ai très vite repris la moto, je ne pensais pas que j’allais pouvoir revenir si vite mais c’était top car j’avais l’envie, avec la nouvelle équipe, j’étais très motivé. Je suis parti m’installer aux Sables-d’Olonne début Novembre. Les débuts étaient un peu difficiles; je n’étais pas reparti de zéro mais physiquement et sur la moto, je subissais beaucoup. J’ai eu quelques problèmes avec la cheville et le talon par la suite – une fracture du talon juste après la cheville – et ça m’a pas mal bloqué sur la moto et je n’ai pas beaucoup roulé cet hiver. Ce n’est vraiment que depuis janvier que je roule, quand on est parti s’entraîner en Sardaigne. Depuis, je roule énormément sur la moto mais avant ça, je travaillais principalement sur le physique avec Pierre-Alexandre. J’étais en manque de roulage mais là, ça commence à revenir.

La transition 125 / 250 est importante. C’est un peu une transition à double tranchant, certains jeunes très bons en 125 se ratent complètement en 250 alors que d’autres réussissent. C’est là que tout se joue pour certains. Ta transition, de ce qu’on a vu jusqu’à présent, se déroule très bien. J’imagine que le gabarit a joué en ta faveur.

L’an dernier, j’étais également sous contrat KTM et ils voulaient que je roule sur l’Elite MX2 pour préparer la saison 2023. Ça m’a beaucoup aidé car je savais déjà comment était la moto même si la nouvelle a bien évolué.

C’est sûr que mon gabarit a aidé à la transition, je suis grand, je la tiens bien. Il faut aussi prendre en compte que ça fait un moment que je roule en 250. Lors de ma première saison en 125, j’avais acheté une 250 pour m’entraîner de temps et temps, pour m’amuser et prendre du plaisir. L’an dernier, je n’ai pas pu faire tant d’entraînement que ça en 250, je ne roulais qu’avec sur l’Elite car je voulais éviter de m’handicaper au niveau de l’Europe 125. Finalement, la moto me plaisait, j’arrivais à vite basculer de la 125 à la 250 donc je n’ai pas eu tant de mal que ça à m’adapter. Je pense avoir un pilotage adapté à la 250, donc ça se passe bien jusqu’ici.

Ce qui te réussit vachement bien, c’est les chronos. Tu l’as encore montré ce week-end à Lacapelle. En manches, on voit encore de l’irrégularité cependant. On travaille là-dessus ?

C’est drôle parce qu’avant j’étais mauvais aux chronos et meilleur en manche, et là, c’est devenu l’inverse [rires]. J’ai pas mal travaillé sur les chronos, il reste les départs à peaufiner car ce n’est pas mon point fort mais on y travaille. Le départ, c’est important, si tu pars devant la course est déjà plus où moins tracée.

Tu as Ferruccio Zanchi en coéquipier, qui fait le même parcours que toi de la 125 au 250. Vous montrez tous les deux de belles choses en ce début de saison que ce soit en Italie ou à Lacapelle. Avoir un coéquipier comme ça, qui te permet de te pousser à l’entraînement, ce doit être intéressant.

Ferruccio s’entraîne avec Jacky Vimond, donc on ne s’entraîne pas tout le temps ensemble. On a eu l’occasion de passer un mois en Sardaigne ensemble et c’est top, on est proche en piste, dans la même seconde aux chronos, ça nous tire tous les deux vers le haut et ça nous aide à progresser. Le truc, c’est que Ferruccio est en Italie car il va toujours à l’école, je suis le seul à vivre au team. Je suis souvent à l’entraînement avec David Herbreteau qui reçoit un coup de main de la part de Mickael Vrignon. Il est rapide, donc ça me tire aussi vers le haut.

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@VRT KTM/MX July

Premières épreuves d’intersaison en Italie, ça s’est passé comment ?

Pour la première course de la saison, ça faisait un bail que je n’avais pas pris le départ d’une manche. J’ai fait direct de bons chronos mais en première manche, j’ai eu un petit souci avec le frein avant. Ça me faisait bizarre d’être devant des Everts, Adamo & Co sur la grille de départ, sur le coup. Dommage, car je n’ai pas trop réussi à me relâcher pendant la journée, j’ai pris des mauvais départs et je n’ai pas roulé comme je savais le faire à l’entraînement. Finalement, c’était du positif car après ça, on a vu sur quoi il fallait travailler. J’ai montré que j’avais la vitesse, mais je n’ai pas réussi à la transposer lors des manches.

À Arco, j’ai montré cette vitesse lors des manches même si les résultats sur le papier n’étaient pas les meilleurs à cause de chutes, et de mauvais départs. J’ai montré une belle vitesse à Arco, encore plus à Lacapelle ce week-end. J’ai pris de bons départs, j’ai chatouillé Pierre Goupillon jusqu’au dernier tour en première manche pour la troisième place, c’était serré. Je vois que je peux être présent sur les manches, je vois que j’ai progressé globalement, c’est positif.

Si je t’avais dit fin 2022 que tu allais faire des chronos plus rapides que Roan Van de Moosdijk à Lacapelle. Tu m’aurais cru ?

Franchement, même à Ponte A Egola et à Arco, je ne m’attendais pas à être aussi vite aux chronos. J’ai vraiment franchi un cap après les deux premières épreuves de l’international d’Italie. Du coup, je suis arrivé en confiance à Lacapelle. On a une très bonne moto, je me sens bien dessus, je commence à être plus régulier donc ça ne m’a pas tant étonné de voir que j’étais en mesure de rouler devant de cette façon-là.

On s’est fixé des objectifs pour la saison 2023 ?

Je n’aime pas vraiment me fixer des objectifs de résultats. Je n’y pense pas vraiment. L’Europe est un championnat assez long, et les objectifs changent tout le temps. C’est sûr que j’ai des envies, d’aller chercher un top 3 final, d’aller chercher les victoires de manche et d’épreuve, ce serait top et je sais que j’en suis capable mais je dois encore progresser sur certains points. Le plus important, ce sera d’être plus homogène, régulier, ne pas faire comme lors de la saison 2022.

La saison d’Europe s’ouvre à Riola Sardo. Ce n’est pas une mince affaire; une loterie chaque année. On va se préparer comment ? Imaginons que le résultat ne soit pas celui escompté à Riola, comment on fait pour ne pas laisser cette épreuve impacter le mental pour le reste de la saison ?

J’ai passé pas mal de temps à Riola Sardo, je sais que c’est un terrain très dur, qui cogne fort. C’est un tracé qui me plapit, je suis à l’aise dans le sable, pas de raison que ça se passe mal. On va passer un peu de temps à Lommel, développer les motos, je suis confiant. Si ça se passe mal, on verra les ajustements à faire pour la suite.

Tu es à un âge où tu dois faire un choix entre les études ou te lancer à 100% dans une carrière dans le sport. Je te souhaite de réussir mais toutefois je me dois de te demander, est-ce qu’on pense à un plan B pour assurer ses arrières, au cas où ?

J’ai eu mon brevet, j’ai commencé une année de seconde mais c’était trop difficile à suivre. Je passais plus de temps à l’entraînement physique et sur la moto qu’à étudier et j’ai dû faire un choix. J’ai pris le choix de me lancer à fond dans la moto.

Je vais faire 17 ans au mois de mai. Je n’ai pas de plan B, ce n’est pas quelque chose à quoi je pense car je me donne à fond pour réussir, pour que ça marche. Je me dis que je suis obligé de réussir, je n’ai pas d’autres solutions. Je me donne à fond tous les jours pour ça.

Le mondial MX2 en 2023, c’est quelque chose qui te tente ?

Oui, bien sûr. Pourquoi ne pas s’essayer sur quelques courses. Rentrer dans les points, ce serait pas mal. J’aimerais beaucoup faire le grand prix de France à Villars-Sous-Ecot.

Vu ton âge, tu peux encore prétendre à l’EMX250 pendant quoi, 5 ans ? J’imagine que ce n’est pas vraiment ce que tu envisages de toute façon. Dans 5 ans, tu te vois faire quoi ? Tu aimerais faire du mondial, suivre la mode et tenter les USA ?

Ce que je sais, c’est que je ne refuserais pas une proposition aux USA [rires], c’est un rêve de gamin même si je n’ai pas été trop habitué à rouler en Supercross. J’en ai déjà fait pour le fun, c’est quelque chose que j’aime bien, je suis assez fin et à l’aise en l’air alors pourquoi pas ? C’est sûr que les USA, ça fait rêver, mais en soi, le mondial aussi.

Marc-Antoine Rossi “je me donne à fond pour réussir”
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